L'Espagne, troisième client et cinquième fournisseur de l'Algérie, regrette les mesures restrictives relatives à l'importation instaurées par les autorités algériennes pour faire face à la crise financière qui frappe de plein fouet le pays à cause de la chute des prix des hydrocarbures. Mais dans ce contexte de crise, les responsables de ce pays expriment leur compréhension des mesures d'Alger. C'est le sentiment partagé, hier, au Centre international des conférences d'Alger à l'occasion de la conférence de presse animée conjointement par le Premier ministre, Ahmed Ouyahia et le Président du Gouvernement d'Espagne, Mariano Rajoy Brey qui a effectué une visite en Algérie. «Les Espagnols comprennent parfaitement les mesures transitoires concernant les importations. Ils sont compréhensifs d'abord parce que ces mesures sont transitoires et ensuite parce que les relations entre les deux pays ont dépassé le niveau des relations ordinaires, ce sont des relations de voisins qui ne concernent pas uniquement les intérêts économiques. Aussi, les accords de partenariats entre l'Algérie et l'Espagne accordent le droit à chaque partie de prendre des mesures exceptionnelles en cas de crise», a expliqué M.Ouyahia. Mariano Rajoy a rebondi sur la question juste après son homologue. Il a déclaré l'Algérie traverse une situation difficile et exceptionnelle, ajoutant qu'il faut comprendre les décisions de nos homologues. «Le gouvernement espagnol ne voit pas d'inconvénients dans ces mesures», a-t-il tranché. Cela même si les exportations de l'Espagne vers l'Algérie ont reçu un coup dur à cause de ces mesures. Selon la ministre de l'Economie espagnole qui est intervenue au forum d'affaires algéro-espagnol, tenu en marge de la réunion intergouvernementale de Haut niveau, les importations de son pays vers l'Algérie ont baissé de 11% en 2017. Mais loin de crier sa colère, l'intervenante a affirmé, elle aussi, sa compréhension de ces mesures, autrement dit des licences d'importation imposées par le gouvernement pour plusieurs produits. En tout cas, les relations économiques entre les deux pays semblent évoluer dans le bon sens. Selon le président du gouvernement espagnol, 250 entreprises de son pays activent en Algérie. Les échanges commerciaux en 2017 ont atteint 17,3 milliards d'euros. Hier, pas moins de huit accords ont été signés entre les deux pays. Compensation Ahmed Ouyahia a évoqué «la qualité remarquable» des relations algéro-espagnoles, affirmant que la coopération bilatérale«progresse harmonieusement». «Notre satisfaction découle de la qualité remarquable des relations qui existent entre nos deux pays, des relations historiques sans contentieux, qui s'appuient sur le Traité d'amitié de bon voisinage et de coopération, conclu en 2002 par son excellence le président de la République Abdelaziz Bouteflika et sa majesté le roi d'Espagne», a-t-il déclaré. Cependant, M. Ouyahia a reconnu que l'environnement des affaires en Algérie n'est pas parfait, soulignant que le gouvernement travaille avec acharnement pour son amélioration. Critiquant ceux qui s'abstiennent de venir investir dans le pays à cause des mesures restrictives, comme la règle 51-49%, le Premier ministre a déclaré que pendant le temps où certains hésitent, d'autres s'installent dans le pays. «Quant aux critiques sur l'environnement des affaires en Algérie, je voudrais relever qu'il n'a pas empêché la venue de centaines d'investisseurs venus d'autres régions qui sont en train de prospérer dans mon pays, prenant ainsi de l'avance sur leurs concurrents», a-t-il lancé, en allusion aux opérateurs de la Chine. Il réitérera dans ce contexte que les mesures de restriction sont transitoires, souhaitant qu'elles soient levées dans trois ans. Affirmant que ces mesures pèsent sur les relations commerciales entre l'Algérie et l'Espagne, l'orateur a appelé les opérateurs espagnols à venir s'installer en Algérie et à la compréhension de ces dispositions. «Nous savons que ces mesures pèseront transitoirement sur les exportations de nos fournisseurs traditionnels, et nous espérons leur compréhension. Dans le même temps, ces mesures de sauvegarde commerciale constituent de nouveaux incitatifs à investir en Algérie, où les opportunités sont multiples (...). L'Espagne pourrait ainsi compenser son manque à gagner commercial par les dividendes que rapatrieront ses entreprises qui s'engageront en Algérie», a expliqué M. Ouyahia. Vers le retour des harraga détenus en Espagne Interrogé sur les harraga algériens dans les prisons espagnoles, le Premier ministre, Ahmed Ouyahia a d'abord souligné que la situation des ressortissants algériens, au nombre de 50 000 en Espagne, est «bonne». Cela avant d'ajouter qu'en ce qui concerne les Algériens immigrés clandestinement qui se trouvent dans les prisons, les autorités espagnoles ont pris les mesures nécessaires. «Nous avons pris des mesures avec les autorités espagnoles pour le retour de ceux dont la nationalité algérienne sera établie», a-t-il dit. Qualifiant le décès d'un jeune il y' a quelques semaines dans un centre de détention de «dramatique», M.Ouyahia a présenté ses condoléances à sa famille, précisant que l'affaire est entre les mains de la justice en Espagne. Toutefois, a-t-il affirmé, cette affaire ne pose pas un problème dans les relations entre les deux pays. Pour sa part, le Président du Gouvernement d'Espagne, Mariano Rajoy, s'est dit «content» de ce qui a été réalisé par les deux pays en matière de lutte contre l'immigration clandestine.