Le ministre des Affaires religieuses et des Wakfs a appelé les imams à consacrer, ce vendredi, une partie de leur prêche pour parler du sujet, et aider à convaincre tous ceux qui, parmi les Algériens, seraient tentés de traverser la Méditerranée à la recherche de meilleurs horizons, de ne pas le faire. L'on s'attendait à une prise de conscience sérieuse du gouvernement, quant à l'explosion du phénomène, à des mesures en direction des jeunes candidats à l'immigration clandestine, à un débat national,…etc. il n'en est rien ! Les autorités n'ont pas trouvé mieux que de faire appel aux imams, pour lutter contre le drame de la harga, qui touche désormais, toutes les franges de la société. Le ministre des Affaires religieuses et des Wakfs a appelé les imams à consacrer, ce vendredi, une partie de leur prêche pour parler du sujet, et aider à convaincre tous ceux qui, parmi les Algériens, seraient tentés de traverser la Méditerranée à la recherche de meilleurs horizons, de ne pas le faire. Mohamed Aïssa espère créer «un élan national» à travers toutes les mosquées de la République, «pour sauver nos enfants des embarcations de la mort». «J'ai invité les imams à consacrer des passages de leur prêche du vendredi 28 décembre 2018 à parler du sujet», a indiqué le ministre sur sa page facebook, tout en se disant ouvert «à toute initiative qui contribuerait à conscientiser la société». Certes, il n'y a pas de mal à ce que les imams soient impliqués dans cette affaire, pour dissuader les candidats à l'émigration clandestine. Mais les pouvoirs publics sont-ils à ce point en manque de solution, pour implorer l'aide de la mosquée, faire appel à la morale pour éradiquer un phénomène qui ne cesse de prendre les vies de jeunes et de moins jeunes par dizaines ? De plus, même cette réaction d'un ministre de la République est venue tardivement. Depuis plus d'un mois, le nombre de harraga morts en mer, déclarés disparus, ou encore arrêtés sur les côtes de différentes wilayas du pays, ne cesse d'augmenter. Lundi, un rassemblement de citoyens a été organisé à Oran par les amis et les proches de 20 harraga, disparus en mer depuis une semaine. «Allez chercher nos frères disparus», était la revendication portée en bleu sur une banderole levée par les manifestants, qui faisaient face aux brigades ant-émeutes, déployées sur les lieux. Cette action exprime, en fait, un ras-le-bol au sein de la population. Tout le monde se sent désormais concerné. Pourtant, depuis plus d'un mois, avec les cadavres de harraga repêchés au large de Tigzirt à Tizi-Ouzou, en passant par le drame de Rais Hamidou dans la capitale, où une dizaine de jeunes ont été engloutis par la mer près des côtes italiennes, jusqu'à ce début de semaine où les unités du groupement territorial des gardes-côtes d'Oran, ont mis en échec une tentative d'émigration clandestine de 11 personnes, aucune initiative sérieuse n'a été prise par les autorités. Osons le constat : le gouvernement est démissionnaire. Prise dans le débat sur la prochaine élection présidentielle, la classe politique n'a pas classé la question dans ses priorités. Le Parlement, lieu où tous les sujets d'ordre d'intérêt national peuvent faire l'objet d'un débat, est aux abonnés absents. Aucun groupe parlementaire, du pouvoir ou de l'opposition soit-il, n'a introduit au bureau de l'APN, comme l'autorise pourtant la Constitution, une demande d'ouverture d'un débat. Même la société civile ne s'en mêle pas. Il n'y a ni conférence ni journées consacrées à la question, malgré la multiplication, ces derniers jours, d'activités organisées par des associations connues pour leur «présence». C'est le vide. «Il s'agit d'un vrai malaise social, les jeunes ne s'intéressent plus à avoir une vie ici, tout le monde veut partir, c'est grave», a expliqué, dans une déclaration récente, le sociologue Nacer Djabi. Tandis que le professeur Mustapaha Khiati de la Forem, (Fondation nationale pour la promotion de la santé et du développement de la recherche) a lié la recrudescence du phénomène à «la mal-vie des jeunes, aux mauvaises conditions de vie des gens, avec des horizons bouchés». Devant ces constats, les pouvoirs publics continuent d'adopter, soit la méthode répressive envers les harraga, sinon le recours au discours religieux, que prêcheront donc ce vendredi, les imams à travers toutes les mosquées d'Algérie. Mais sont-ce des solutions sérieuses ?