La présidentielle est annulée, le peuple est dans la rue, le gouvernement a remis sa démission et un autre Exécutif composé de «technocrates» devra être installé dans une semaine : tout cela n'a pas infléchi Ali Ghediri. Le général à la retraite continue de se considérer comme candidat à un scrutin qui a disparu de l'agenda du pays, appelant au respect du cadre constitutionnel. «Nous constatons que le Conseil constitutionnel vient d'archiver les dossiers remis par les candidats au motif que l'annulation de l'élection présidentielle du 18 avril 2019 avait été annulée par une décision politique qui a trouvé en un décret présidentiel abrogeant celui par lequel le corps électoral a été convoqué, un semblant de fondement juridique», a écrit Ali Ghediri, dans un communiqué, commentant la décision du Conseil constitutionnel d'archiver les dossiers des candidats. Et de s'interroger : «Est-il utile de rappeler que le texte abrogé a déjà produit son effet ?». Pour lui, «le Conseil constitutionnel, institution suprême de l'Etat de droit garante du respect des lois, n'a fait qu'entériner une violation grave de la loi régissant la matière pour des considérations politiques subjectives». L'ancien général à la retraite, ne mâchant pas ses mots contre le régime politique, l'accuse d'«avoir usé et abusé des pouvoirs que lui confère la Constitution dans le seul but de sauver un système politique arrivé à son terme et que le peuple rejette». «Il prive de la sorte des citoyens qui n'ont fait que se conformer aux prescriptions de la loi, de leur droit constitutionnellement consacré», s'insurge Ghediri, qui se considère encore candidat à… la présidentielle. «Pour notre part, si nous prenons acte de cette violation flagrante de la Constitution, nous n'en exigeons pas moins que le cadre constitutionnel soit respecté et que l'élection prévue puisse se dérouler dans les délais impartis», a-t-il insisté, invitant ainsi Tayeb Belaiz à maintenir le scrutin du 18 avril 2019. Pour rappel, le Conseil constitutionnel, réuni les 12 et 13 mars 2019, a décidé que le fait de statuer sur la validité des candidatures pour l'élection du président de la République, qui était prévue pour le 18 avril prochain, est désormais «sans objet» en vertu du décret présidentiel 19-92 du 11 mars 2019 portant annulation des dispositions du décret présidentiel portant convocation du corps électoral en vue de l'élection du président de la République, et que «les dossiers des 21 candidats à la candidature pour la présidentielle, déposés au niveau du Secrétariat général du Conseil constitutionnel, seront gardés au niveau des archives du Conseil». Il faut dire que le peuple a, à travers ses manifestations de rue depuis le 22 février, rejeté et l'opération électorale, et le cinquième mandat de Bouteflika et le régime en place à qui il a demandé de «partir». Seulement, en déphasage avec la dynamique populaire et probablement rongé par le seul désir d'arriver au fauteuil du président de la République, Ali Ghediri s'enfonce dans un «délire» qui ne dit pas son nom. Organiser une présidentielle dans près d'un mois alors que l'urgence est de trouver une issue à la crise avec l'implication de tous les acteurs qui doivent s'asseoir autour de la table serait suicidaire. Ghediri, semble-t-il, veut coûte que coûte être président, et ne lâche rien !