Plus encore que le buteur Gonzalo Higuain, c'est le nouvel entraîneur Rafael Benitez qui peut faire franchir à Naples un vrai palier, notamment en Ligue des champions dès mardi à Marseille. Un buteur de niveau mondial, le Napoli en avait déjà un, Edinson Cavani, parti au Paris SG. Avec Diego Maradona, le bouillant club parthénopéen a admiré une légende vivante. Mais jamais un technicien avec le palmarès de l'Espagnol (trois coupes d'Europe), prédestiné pour ce métier, ne s'était assis sur son banc. Benitez le rondouillard, avec ses joues rouges et son bouc, a élevé encore un peu la culture tactique d'un groupe déjà à bonne école avec Walter Mazzarri, qui n'a pas l'aura de l'Espagnol. "Don Rafè" a déjà fait oublier le bouillant toscan. Il s'est bien adapté grâce à ses sens de la diplomatie et de l'humour. "Si Maradona s'entraîne une semaine, il peut jouer et nous faire gagner", a-t-il plaisanté quand l'Idole était assise en tribunes pour AS Rome-Napoli (2-0). Entraîneur à 13 ans Benitez use de petites formules, façon Rudi Garcia, pour éviter de dévoiler les secrets de sa cuisine tactique. "Le foot est mensonge, a-t-il dit dans une interview à la Repubblica. On ne peut pas dire certaines vérités en public. Moi aussi je le sais quand un de mes joueurs a été mauvais, mais je ne l'admettrai jamais à la télé ni dans les journaux car je le brûlerais alors que j'ai besoin de lui." Il s'est surtout imposé grâce à ses résultats. Le Napoli reste sur une défaite dans le match au sommet contre la Roma, mais l'Espagnol a déminé en rappelant que son équipe avait eu ses occasions et avait perdu faute de réalisme. Avant, le Napoli avait remporté six victoires et concédé un seul nul en championnat. La victoire contre le Borussia Dortmund (2-1) au premier match de C1 a également démontré que le Napoli s'était élevé tactiquement, Benitez battant Jurgen Klopp. Pour atteindre le gotha des techniciens, l'Espagnol a commencé très tôt. A 13 ans, il donnait des notes à ses coéquipiers, mais sans leur dire, car "le foot est mensonge, mais aussi discrétion", glisse-t-il. 'Arrête un peu de parler!' "Déjà à l'époque je pensais en termes collectifs, poursuit Benitez, j'étais une sorte d'entraîneur sur le terrain. J'entends encore les sifflets de mon père, qui me criait: +Arrête un peu de parler et monte pour marquer!+" Il est passé du terrain au banc à 26 ans à cause d'une blessure, aux Universiades de 1979 au Mexique, le genou brisé par "le N.10 du Canada" dont il dit ne plus se souvenir du nom. "Mon genou n'a jamais vraiment guéri", raconte-t-il. Ce souvenir brûle-t-il encore ? "Pas tant que ça, peut-être parce que je me sentais déjà un peu entraîneur quand je jouais", répond celui qui a fait ses classes à la tête des équipes de jeunes du Real Madrid. Un bon résultat à Marseille effacerait le seul match raté de Benitez cette saison, ce 2-0 à Arsenal où le Napoli a si peu joué. Les superstitieux tifosi napolitains ont noté que l'Espagnol gardait d'excellents souvenirs de l'OM. Il a remporté son premier trophée européen contre Marseille, avec Valence en 2004 en finale de la Coupe de l'UEFA. Puis à la tête de Liverpool, il a gagné trois fois sur quatre contre le club français dans les phases de poules de la C1 2007-2008 et 2008-2009, avec notamment un cinglant 4-0 au Vélodrome effaçant la défaite à Anfield (1-0) sur le but de l'entrée sur la scène internationale de Mathieu Valbuena. S'il sort de ce groupe difficile, Benitez sera encore plus adulé. "Le problème pour moi c'est que si je vais au restaurant, ça bloque la circulation". Naples rêve des embouteillages géants qu'entraîneraient les festivités d'un titre.