L'instruction du vice-ministre de la défense nationale d'interdire d'autres drapeaux que l'emblème national a suscité une vive tension au cœur de la capitale où les forces de sécurité ont fait usage de violence et de brutalité non justifiés envers les manifestants portant l'étendard berbère. Pour ce 18e vendredi consécutif de manifestations populaires contre le système politique en place, les Algériens se sont montrés plus que jamais unis et solidaires entre eux, et surtout focalisés sur un même objectif. Cette nouvelle journée de manifestation s'est tenue dans un contexte particulier, marqué par un enchaînement de poursuites judiciaires contre d'ex-hauts responsables et hommes d'affaires. Une procédure largement saluée par de nombreux manifestants réclamant des procès transparents et que la justice soit rendue. Ils ont également renouvelé leur revendication quant au départ immédiat de toutes les figures du système, insistant sur le départ du chef de l'Etat par intérim Abdelkader Bensalah, du premier ministre Ahmed Bédoui et tout son staff, ainsi que du président de l'Assemblée populaire nationale, Moad Bouchareb. Ils ont exigé aussi l'arrestation de toutes les personnes impliquées dans des affaires de corruption ayant ruiné l'économie du pays. Cependant, un climat de tension a régné hier dans la capitale. L'instruction du vice-ministre de la défense nationale, Ahmed Gaid Salah, d'interdire d'autres drapeaux que l'emblème national a suscité une vive tension au cœur de la capitale où les forces de sécurité ont fait usage de violence et de brutalité non justifiés envers les manifestants portant l'étendard berbère. Il a même été fait usage de grenades lacrymogènes contre les manifestants, qui, depuis le 22 février dernier, ont conféré un caractère pacifique à leur mouvement. A noter que le chef d'état-major de l'ANP, dans son discours depuis Béchar le 19 juin, avait déclaré que seul le drapeau national serait toléré lors des manifestations. L'application de cette instruction s'est transformée en chasse au drapeau amazigh et vécue comme un grave dérapage des forces de l'ordre. En effet, vers 10h, les policiers déployés en force à la place de la grande poste et au niveau des autres rues principales du cœur d'Alger ont réprimé les premiers manifestants ayant brandi le drapeau amazigh. Tous les sacs à dos ont été fouillés et les drapeaux berbères confisqués systématiquement. Ils ont également procédé à des arrestations parmi les jeunes citoyens ayant brandi le drapeau berbère. A 11h00, des échauffourées entre manifestants et policiers ont éclaté à la rue Abdelkrim Khettabi, alors que des vieilles femmes s'interposaient entre les deux parties pendant que des cris «silmya silmya» étaient lancés par la foule. Les manifestants sont pour leur part restés pacifiques en témoignant d'une solidarité sans faille. Ils ne se sont pas laissé faire en scandant fort leur refus de cette décision. Des dizaines de milliers de manifestants ont insisté sur l'union entre Algériens. «Tous des frères, pas de régionalisme». «Arabes, Kabyles, Chaouis, mozabites, Targuis…, nous sommes tous frères, non à la division», «Le temps où vous imposiez les présidents est révolu», «Notre identité est le roc sur lequel votre arrogance se brisera», peut-on lire sur les pancartes hissées au-dessus de la foule. Ils ont crié à tue-tête «Imazighen», «Nous ne nous arrêterons pas…»