Le ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, considère que la construction de l'Union du Maghreb arabe (UMA) n'avance pas à la "vitesse nécessaire" pour rattraper le "temps perdu" et observe que les relations algéro-marocaines ne sont pas "réductibles" à la seule question de la "fermeture" de la frontière terrestre. Interrogé, dans un entretien accordé au mensuel Afrique Asie dans son édition de janvier à paraître mardi, sur la "panne" observée quant à la construction de l'Union du Maghreb arabe (UMA), ainsi que sur la vision de l'Algérie quant aux conditions d'une "véritable normalisation" des relations avec le Maroc, M. Lamamra s'est demandé "s'il est juste de dire que la construction maghrébine est en panne". En revanche, a-t-il jugé, "il est clair que dans un environnement dynamique, qui n'avance pas recule". "Et le Maghreb n'avance manifestement pas à la vitesse nécessaire pour rattraper le temps perdu et s'ouvrir de nouveaux horizons en termes d'intégration économique", a-t-il constaté. Rappelant que l'Algérie est la principale économie de la région, il a soutenu qu'elle est le pays maghrébin qui partage des frontières avec tous les autres et que c'est aussi celui qui a ratifié le plus de conventions et d'accords de coopération intermaghrébine, soit vingt-neuf sur les trente-huit réalisés au sein de l'UMA. Il a assuré que l'Algérie "croit profondément" en une communauté de destin des peuples maghrébins et qu'elle était prête à "consentir des sacrifices, à la hauteur de ses moyens, pour la concrétiser". "Comme toute démarche d'intégration, l'irréversibilité de la construction maghrébine et sa protection contre des accidents de parcours, commandent qu'elle soit solidement articulée autour d'une communauté de valeurs et d'une communauté d'intérêts", a jugé le chef de la diplomatie. "Sous cet éclairage, il est aisé de comprendre que les relations algéro-marocaines ne sont pas réductibles à la seule question de la fermeture de la frontière terrestre", a-t-il alors répondu à une question sur ce sujet. "Il y a entre l'Algérie et le Maroc, un tissu de relations particulièrement dense, avec des dimensions matérielles et immatérielles indissociables, des référents historiques, des questionnements et des projections qui dépassent la conjoncture", a relevé M. Lamamra, observant que la conjoncture "n'est certainement pas sans influence sur la trame de la relation bilatérale". "Nul ne peut ignorer l'ampleur du dommage causé à cette relation par l'agression perpétrée contre le consulat général d'Algérie à Casablanca et par la profanation de l'emblème national algérien un certain 1er novembre, c'est-à-dire le jour qui a vu s'accélérer la marche des peuples maghrébins vers leur libération solidaire de la domination coloniale", a-t-il déploré. "N'étant pas amateur de la +politique du mégaphone+, je m'empresse (…) d'assurer que les frères marocains savent parfaitement ce qu'ils pourraient et devraient faire pour que les relations bilatérales connaissent un cours normal, indépendamment, et dans l'attente de la résolution de la question du Sahara occidental, qui est une question de décolonisation relevant de la responsabilité des Nations Unies", a-t-il soutenu. "Indépendamment aussi de la nécessaire relance de l'Union du Maghreb arabe, en fonction de ses mérites propres, car vingt-cinq ans après sa fondation par les dirigeants des cinq Etats membres, l'UMA doit se soumettre au jugement critique de tous les peuples maghrébins, du point de vue de leurs attentes et de leurs ambitions légitimes", a-t-il conclu.