Le président soudanais Omar el-Béchir doit se rendre ce lundi à Juba pour parler avec son homologue sud-soudanais Salva Kiir du conflit armé au Soudan du sud alors que les combats font rage dans plusieurs régions. Des représentants du gouvernement et des rebelles au Soudan du Sud se sont rencontrés dimanche soir à Addis Abeba, avant l'ouverture attendue des négociations directes sur un cessez-le-feu alors que les combats s'intensifiaient, selon des sources officielles. A Khartoum, la radio officielle a annoncé que le président soudanais Omar el-Béchir allait se rendre lundi à Juba pour discuter avec son homologue sud-soudanais Salva Kiir du conflit armé au Soudan du sud. Les négociations directes qui devaient démarrer en milieu de journée à Addis Abeba ont été retardées par des "questions de protocole", selon certains diplomates, qui n'excluaient pas un report à lundi. Le secrétaire d'Etat américain John Kerry avait exhorté samedi soir les deux parties à ne pas utiliser ces négociations comme un "stratagème" pour gagner du temps. "Il faut que les négociations soient sérieuses, elles ne peuvent pas être une manière de gagner du temps, un stratagème" pour prendre l'avantage militaire, a-t-il déclaré lors d'une visite à Jérusalem. Les responsables doivent avoir "du courage" et "une volonté claire de trouver une solution politique". Les pourparlers à Addis Abeba visent à mettre fin à trois semaines de combats entre les soldats de l'armée fidèles au président Salva Kiir et les troupes dissidentes alliées à des milices ethniques dirigées par l'ex-vice président Reik Machar. Les violences ont déjà fait plusieurs milliers de morts dans la plus jeune nation du monde, riche en pétrole. Les médiateurs craignaient dimanche que les négociations n'aboutissent pas. De violents combats ont été signalés dans la nuit de samedi à dimanche dans la capitale Juba et de nouveaux affrontements ont éclaté dans le reste du pays. En outre, des désaccords sur la libération de rebelles présumés par le gouvernement de Salva Kiir n'ont toujours pas été résolus. Le porte-parole de la délégation du gouvernement sud-soudanais, le ministre de l'Information Michael Makuei, a réitéré ses accusations de tentative de "coup d'Etat" envers le chef rebelle Riek Machar. "Il nous est demandé de négocier avec les rebelles. Mais tout rebelle qui est tombé entre nos mains, devra répondre à la question de savoir pourquoi il ou elle a pris les armes contre un gouvernement démocratiquement élu", a souligné M. Makue. Selon le porte-parole du gouvernement éthiopien, Getachew Reda, l'IGAD - le bloc régional des pays d'Afrique de l'Est médiateur des pourparlers - a demandé au gouvernement sud-soudanais de libérer 11 détenus, dont la plupart sont d'anciens hauts responsables du gouvernement, comme preuve de "bonne volonté". Une des solutions proposées a été que les prisonniers soient transférés sous l'autorité de l'IGAD. Washington, qui a soutenu le Soudan du Sud pour gagner son indépendance, a également exhorté Juba à "libérer immédiatement les détenus politiques" afin qu'ils puissent participer aux négociations. Des atrocités dans les deux camps Les combats ont commencé le 15 décembre, quand M. Kiir a accusé M. Machar - limogé de son poste en juillet 2013 - d'avoir tenté un coup d'Etat. M. Machar a rejeté cette accusation, reprochant au président d'avoir voulu éliminer ses rivaux. La rivalité politique se double d'un conflit entre ethnies, Dinka de M. Kiir et Nuer de M. Machar. Les combats touchent désormais une bonne partie du Soudan du Sud - indépendant depuis 2011 -, les rebelles contrôlant plusieurs zones du nord riche en pétrole. Le conflit a déjà fait plusieurs milliers de morts, selon l'ONU, qui a dénoncé des atrocités dans les deux camps. Juba a également été secouée par des tirs nourris samedi soir, des échanges de tirs d'armes automatiques et d'armes lourdes ayant été entendus dans un quartier du sud de la ville. Des habitants de Juba ont été vus dimanche fuyant au sud vers la frontière ougandaise, s'ajoutant aux près des 200.000 personnes déplacées en trois semaines de conflit. Les bases des forces de maintien de la paix de l'ONU ont été dépassées par le nombre de civils cherchant refuge. La plupart d'entre eux ont fui les violences ethniques opposant la communauté Dinka de Salva Kiir et la tribu Nuer de Riek Machar. M. Philip Aguer a également signalé des affrontements dans les Etats producteurs de pétrole de l'Unité et du Haut-Nil dans le nord. Selon lui, les forces gouvernementales avançaient dimanche sur les deux capitales Bentiu et Malakal, aux mains des rebelles. Les forces de l'armée soudanaise (SPLA) "avancent" vers Bentiu, capitale de l'Etat stratégique riche en pétrole de l'Unité, dans le nord, aux mains des rebelles, a affirmé M. Aguer. Dimanche, les troupes gouvernementales se préparaient à reprendre Bor, capitale de l'Etat de Jonglei, a déclaré l'armée. Selon le porte-parole de l'armée, les soldats gouvernementaux n'étaient plus qu'à 15 km dimanche de la ville, située à 200 km au nord de Juba. "C'est une question de temps. Nos forces avancent vers Bor", ville stratégique qui a changé de main trois fois depuis le début des affrontements, a dit M. Aguer. Le porte-parole a admis que l'armée régulière avait connu deux défections. Une unité de la ville de Yei, au sud de Juba, est passée dans le camp de la rébellion, abandonnant plusieurs véhicules militaires. Une autre défection a eu lieu dans l'Etat de l'Equateur occidental, dans le sud-ouest, qui avait été jusqu'ici plutôt épargné par les combats.