Le chef des forces armées égyptiennes, le maréchal Abdel Fattah al Sissi, a implicitement confirmé sa volonté d'être candidat à l'élection présidentielle en déclarant qu'il ne pouvait rester sourd aux demandes de la "majorité" des Egyptiens, rapporte mardi l'agence de presse officielle Mena. Lors d'une cérémonie de remises de diplômes à l'Ecole de guerre du Caire, le maréchal Sissi, qui a destitué en juillet dernier le président islamiste Mohamed Morsi, premier chef d'Etat égyptien démocratiquement élu, a précisé que les "procédures officielles" concernant sa candidature seraient lancées dans les prochains jours. "Je ne peux pas tourner le dos alors que la majorité des Egyptiens me demandent d'être candidat à la présidentielle", a-t-il dit, selon Mena. L'Egypte, a-t-il ajouté, traverse une période difficile qui rend encore plus nécessaire l'unité du peuple, de l'armée et de la police. Souvent comparé à Nasser, le père de la République égyptienne, le maréchal Sissi est donné comme grand favori de l'élection présidentielle prévue au printemps. Confirmé le mois dernier au poste de ministre de la Défense, il avait déjà clairement indiqué sa volonté de se présenter à l'élection dans une interview début février au journal koweïtien Al Seyassah, expliquant "ne pas avoir d'autre choix". "Je ne rejetterai pas cet appel", disait-il alors. Attendue de longue date, cette candidature n'a pas été confirmée de manière officielle mais ne faisait plus guère de doute depuis l'adoption mi-janvier de la nouvelle Constitution par référendum, suivie quelques jours plus tard du feu vert du Conseil suprême des forces armées (CSFA). CULTE DE LA PERSONNALITE L'élection présidentielle se tiendra avant les législatives, contrairement à ce que prévoyait la feuille de route présentée après le renversement de Morsi. La candidature du ministre de la Défense devrait aggraver les tensions en Egypte où les partisans de Mohamed Morsi, issu de la confrérie des Frères musulmans, dénoncent la répression qui a suivi la destitution de l'ancien chef de l'Etat. Plus d'un millier de membres de la confrérie ont été tués et ses principaux dirigeants, dont Mohamed Morsi, incarcérés. Le mouvement lui-même a été officiellement déclaré organisation terroriste par les autorités provisoires mises en place avec l'appui de l'armée. De nombreux partisans de Mohamed Morsi ont manifesté mardi soir dans le centre du Caire malgré la législation interdisant les rassemblements de ce type. Ils ont scandé "A bas le régime militaire". Pour une partie de la population égyptienne, Abdel Fattah al Sissi, objet d'un véritable culte de la personnalité, est l'homme fort dont le pays a besoin pour sortir de la crise politique et économique et relever les défis sécuritaires, notamment dans le Sinaï où une insurrection islamiste a fait des centaines de morts parmi les forces de sécurité. Sa candidature devrait donc aboutir, trois ans après la "révolution du Nil", au retour au pouvoir de l'armée, qui a dirigé l'Egypte sans discontinuer du renversement de la monarchie en 1952-1953 à la chute d'Hosni Moubarak, en février 2011. Des diplomates occidentaux confient toutefois que Sissi, qui est âgé de 59 ans, a longtemps résisté à l'idée d'une candidature, redoutant une tâche trop lourde à assumer.