La revanche du "match de la honte" de 1982 si l'Algérie l'emporte, une simple formalité sur la route d'un favori si l'Allemagne s'impose: comment l'histoire basculera-t-elle lundi le huitième de finale de Porto Alegre (17h00 locales, 22h00 françaises) ? En tous cas, le vainqueur affrontera en quart du Mondial-2014 la France ou le Nigeria, vendredi au Maracana de Rio. Pour l'heure, l'histoire, la sale histoire, est présente dans toutes les têtes ou presque. "On n'a pas oublié, on parle tout le temps de ce match. 1982, l'histoire se répète après 32 ans", a rappelé le sélectionneur de l'Algérie, Vahid Halilhodzic, dans la foulée de la qualification arrachée face à la Russie (1-1). A la Coupe du monde 1982, l'Algérie avait créé la sensation en battant la puissante Allemagne de l'Ouest (RFA) dès leur entrée en lice (2-1). L'exploit était d'envergure, mais c'est un autre match qui est passé à la postérité, pour son caractère antisportif: en clôture de ce groupe, la RFA et l'Autriche avaient gelé par une mascarade de football, au bout de dix minutes, un résultat (1-0) qui qualifiait les deux équipes. Et éliminait par ricochet l'Algérie, dindon de la farce du "match de la honte". C'est davantage l'environnement qui convoque ce spectre que les Fennecs eux-mêmes, avides d'écrire leur "propre histoire", selon le milieu des Fennecs, Nabil Bentaleb. Vieille histoire ? "Je pense que les joueurs allemands vont se souvenir de la défaite de 1982 et ce sera un point positif pour nous", espère tout de même Abdelhafid Tasfaout, le sélectionneur-adjoint de l'EN (équipe nationale). Côté allemand, c'est "nein": "Pourquoi des joueurs qui n'étaient même pas nés voudraient-ils prendre une revanche ? Je ne comprends pas", a lâché le sélectionneur Joachim Löw. Le patron de la Nationalmannschaft veut délester cette rencontre de toute pression historique. Son équipe, présente au moins dans le dernier carré des quatre derniers tournois majeurs, est déjà archi-favorite et une élimination dès lundi serait considérée comme une réplique du séisme qui a englouti l'Espagne dès le premier tour. Au contraire, l'Algérie, en atteignant pour la première fois les huitièmes de finale, a déjà réussi son tournoi. "C'est très important pour tout le peuple algérien et le foot en Algérie, et c'est très important pour nous aussi, on en est très fier", a souligné Bentaleb. Vahid Halilhodzic jouera sans doute sur le ressort de l'euphorie et de la confiance qu'elle suscite et sur la générosité qu'ont démontrée ses joueurs au premier tour. C'est aussi là-dessus que pourrait jouer l'Allemagne, comme l'a pointé Oliver Kahn sur la chaîne ZDF, en parlant d'un jeu algérien qui "coûte énormément d'énergie. Sa force ira donc en s'affaiblissant". Jeûne ou pas ? L'ancien gardien pensait-il également aux effets du ramadan ? Les joueurs de l'EN refusent d'en parler clairement, se réfugiant derrière le choix personnel. Feront-ils le jeûne jusqu'à l'heure de sa rupture, fixée à 17h35 à Porto Alegre, soit à dix minutes de la mi-temps, sachant que l'hiver y est frais et humide, et donc moins propice à la déshydratation qu'ailleurs au Brésil ? Ou bien s'en passeront-ils en invoquant le fait d'être en voyage, exception prévue par la tradition musulmane ? La Fédération algérienne (FAF) a publié un communiqué pour dire que les joueurs étaient libres de décider. "Vahid Halilhodzic est très respectueux de la religion musulmane, en trois années à la tête de l'équipe nationale, aucun problème relatif aux questions religieuses ou politiques qui relèvent du libre arbitre de chaque personne ne s'est posé", a écrit la FAF dans un communiqué. Les Fennecs compteront en tout cas sur leur trio Brahimi-Feghouli-Djabou pour bousculer l'Allemagne, en s'inspirant, pourquoi pas, du Ghana qui y était parvenu (2-2). La Nationalmannschaft, de son côté, sera privée de Podolski (cuisse) et Götze devrait reprendre sa place en attaque pour épauler Müller, déjà auteur de quatre buts. Özil, quelconque pendant trois matches, sera-t-il reconduit sur le côté droit, ou bien a-t-il épuisé son crédit ? Une autre question porte sur l'entre-jeu. Celui aligné face aux Etats-Unis (1-0) tient la corde après les éloges de Joachim Löw: "Le milieu, avec Kroos, Schweinsteiger et Lahm, était très fort". Mais le sélectionneur a aussi brouillé les pistes en assurant qu'il avait "ménagé" Khedira, titulaire lors des deux précédentes rencontres. Voilà un joueur né en 1987. Lui reparlera-t-on après le match de ce qui s'est passé cinq ans avant sa naissance ?