Hervé Gourdel, un passionné de montagne venu en Algérie vivre un autre moment de sa passion dans un autre espace, sur d'autres hauteurs et sous un autre pan du ciel a été kidnappé du côté de Tikjda. Que l'acte criminel soit le fait d'un groupe terroriste ou d'une bande de malfaiteurs, la question n'embarrasse plus personne. Nous avons maintenant l'habitude de nous interroger sur la nature des enlèvements en Kabylie, sur leurs auteurs et sur leurs motivations. L'historique des kidnappings en Kabylie, et ailleurs dans le reste du pays, ne renferme pas de cas où un étranger a été enlevé par des bandits de grand chemin mais on ne va pas en remettre une couche dans la floraison des «analyseurs» de circonstance, il y en a déjà assez comme ça. A tout seigneur tout honneur, les plus perspicaces parmi ces «analyseurs» n'ont pas été bien loin pour… douter : il est quand même louche qu'un kidnapping de ressortissant étranger intervienne au lendemain de la réunion du haut conseil à la sécurité ! Et d'autres pourparlers multilatéraux sur la sécurité en Afrique du Nord et dans le Sahel ! D'autres, moins savants mais plus paranoïaques ont été chercher l'«explication» chez l'ennemi étranger qui, décidément, pense à tout quand il s'agit de nuire à notre cher pays : l'Algérie ne veut pas s'impliquer dans la guerre à mener contre Daech ? Et bien, on introduira le Daech en Algérie, quitte à ce que ce soit un «faux» qu'on enverra en service commandé dans les montagnes de Kabylie, histoire de donner une idée à ses autorités de ce que sont les pratiques et les desseins du khalifat qui sévit loin de ses frontières, en Irak et à Bilad Echam. Tout le monde sait que les pratiques comme les desseins de nos terroristes du «terroir» ne diffèrent en rien de leurs frères d'ailleurs mais bon… D'autres, enfin, plus… terre à terre, ont monté en épingle l'«imprudence» du touriste français «et de ses accompagnateurs» qui ont eu la mauvaise idée d'aller en balade de santé dans une «zone connue comme étant le fief des terroristes». Les terroristes auraient donc un fief - ils auraient pu dire des «territoires libérés», tant qu'à faire - et on ne le savait pas. Mais les «tant qu'à faire», on en a eu, sans qu'on ne le demande, puisqu'on a poussé l'outrecuidance jusqu'à suggérer que les braves Hervé Gourdel et ses amis de Bouira l'ont «un peu cherché» en allant… chercher la gueule du loup ! Il y a même cette géniale boutade d'un confrère sur le net qui ironisait en ces termes sur toutes les inepties qui ont accompagné ce criminel enlèvement : «C'est à croire qu'il (Hervé Gourdel) est venu spécialement pour se faire kidnapper» ! Bien sûr, la piètre communication officielle en l'occurrence n'a pas arrangé les choses, il se peut même que les choses vont au-delà de la communication. C'est à regretter le temps du «kituki» qui, lui, avait le mérite de la clarté. Qu'on partage ou non, c'était un positionnement politique. Heureusement qu'il y a encore quelques brebis galeuses pour nous le rappeler avec autant de clarté : en prenant cet acte pour ce qu'il est. Un kidnapping terroriste qu'il faut condamner avec fermeté en demandant la libération immédiate et sans condition d'Hervé Gourdel pour qu'il retrouve son pays et sa famille. Le reste, c'est de… l'analyse.