Dans une interview accordée au média français Le Point, Bernard Henri Levy est revenu sur son voyage plutôt mouvementé en Tunisie. En réaction au rassemblement des Tunisiens à l'aéroport international Tunis-Carthage contre son arrivée, vendredi dernier, dans la soirée, il répond que «actuellement, pas grand-chose. Quelques dizaines d'islamistes ou, peut-être, d'exilés kadhafistes, qui m'attendaient à l'aéroport et s'indignaient de voir un «sioniste» (sic) poser son sale pied sur le sol du pays. Mais l'événement, s'il y en a un, c'est ce qui a suivi. Et c'est ce vent de haine et de folie qui s'est mis à souffler dans les rédactions, sur la Toile, sur les réseaux sociaux». Il a ajouté qu'«en quelques heures, j'étais devenu, dans le meilleur des cas, je veux dire dans les journaux convenables, un «intellectuel juif», ou un «agent sioniste», venu semer le désordre et déstabiliser, à moi tout seul, la jeune démocratie tunisienne». A la question du journaliste de savoir quel était le but de son séjour en Tunisie, Bernard Henri Levy répond : «Une chose très simple. Rencontrer, dans un hôtel, au vu et au su de tous, dans la plus parfaite transparence, des amis libyens sortis exprès de Tripoli, Benghazi, les villes du Djebel Nefoussa, Misrata, Zaouia, afin de poursuivre en terrain neutre, et avec moi, le dialogue de réconciliation nationale». «Mais, d'un seul coup, dans cette opinion devenue folle et biberonnée au conspirationnisme le plus débile j'avais un agenda secret qui était, pour les uns, de rencontrer les islamistes d'Ennadha, pour les autres de participer en compagnie, si j'ai bien compris, d'un des pires islamistes radicaux de la région, à une conférence dont je n'avais, évidemment jamais entendu parler ; pour d'autres aussi de comploter contre le régime issu des élections de la semaine dernière et, pourquoi pas, de le renverser. J'étais le complot sioniste à moi tout seul. L'incarnation des noirs desseins de l'étranger. J'étais, non plus un écrivain mais un agitateur professionnel sur les «agissements» de qui des groupes de crétins se mettaient à réclamer l'ouverture d'une enquête judiciaire». En réponse à une question du journaliste de savoir s'il a été expulsé de Tunisie, il rétorque : «Vous plaisantez ! Vous imaginez un citoyen français expulsé comme ça, sans raison, par un pays ami et, de surcroît, démocratique ? Et où en serions-nous si les autorités tunisiennes, sorties victorieuses de leur bataille électorale contre les obscurantistes et les nostalgiques de la dictature, cédaient à la pression, je ne dis même pas de la rue, mais de quelques poignées de fanatiques drogués à l'antisémitisme le plus enragé ? Non. Tout cela est grotesque. Je suis parti quand ma réunion libyenne s'est terminée. Et les autorités tunisiennes, pour ce que j'en ai vu et su, se sont comportées de façon parfaitement normale.»