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Sur un air de calypso : qui sera la star, Obama ou Chavez ?
5e Sommet des Amériques à Port of Spain (Trinité et Tobago)
Publié dans Le Temps d'Algérie le 17 - 04 - 2009

Pas moins de 25 avions dont l'emblématique Air Force One ont été mobilisés pour effectuer le déplacement de Barack Hussein Obama dans les Caraïbes, où il assiste, depuis vendredi, au 5e Sommet des Amériques qui se déroule à Port of Spain, la capitale de la République de Trinité et Tobago.
Un 5e sommet dont le thème essentiel des travaux, deux jours durant, est «Sécuriser l'avenir de nos citoyens par la promotion de la prospérité humaine, la sécurité énergétique et la durabilité environnementale». Ce thème central sera au cœur des débats et discussions des 34 membres de l'Organisation des Etats américains qui comprend tous les Etats d'Amérique du nord, le Canada y compris, du Centre et du Sud, mais sans Cuba qui y a été exclue depuis l'embargo.
Avant son départ pour Port of Spain, Barack Obama a tenu, dans une lettre adressée au Premier ministre de Trinité et Tobago, à souligner que «compte tenu des enjeux auxquels nous devons faire face sur le plan mondial et régional, je comprends l'importance du sommet. J'ai hâte de rencontrer mes 33 homologues élus démocratiquement et travailler avec vous au succès de notre région».
Faire oublier les frasques de Bush à Mar Del Plata
Obama est donc impatient mais aussi «très attendu» à ce sommet que d'aucuns considèrent très important, ne serait-ce que par le fait qu'il sera l'occasion pour l'actuel hôte de la Maison-Blanche d'effacer les bourdes «bushiennes» et faire oublier, particulièrement, celles du précédent fiasco du sommet argentin.
On s'en souvient, en 2005, au sommet de Mar Del Plata, Bush a dû même quitter le sommet avant la fin, suite aux nombreuses manifestations anti-américaines qu'il avait provoquées, particulièrement avec sa proposition de créer la fameuse Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA). Qu'en sera-t-il aujourd'hui ?
Sans doute le président américain, qui a, avant tout, pour seul et unique objectif – à ne jamais oublier ! – la défense des intérêts supérieurs de son pays, fera-t-il son possible pour faire avancer les choses dans le bon chemin, c'est-à-dire dans le dialogue constructif. En cela, on peut faire confiance à Obama qui a déjà fait ses preuves au cours de ses récents déplacements en Europe, en Asie ou au Proche-Orient. Son discours plaît et en même temps ouvre la porte à des propositions et à un échange de confiance.
Toujours et encore la «main tendue»
Contrairement à son prédécesseur – est-ce le personnage ou un effet de la crise ? –, l'actuel locataire de la Maison-Blanche privilégie la diplomatie de la main tendue qu'il a amorcée depuis son discours d'investiture et qu'il applique depuis sur le terrain. Un politique qui plaît car elle permet à l'Amérique de mettre de côté son arrogance et ne plus se poser en donneur de leçons.
Les 33 homologues américains d'Obama seront-ils charmés par le personnage ? Beaucoup de facteurs jouent en faveur de cette impression, et le plus intéressant semble l'attitude affichée par Hugo Chavez qui attend «de pied ferme» le successeur de Bush, «le Diable réincarné», comme l'a toujours dénommé Chavez.
Un Chavez qui vient de recevoir de précieux conseils de son ami Fidel, le Lider Maximo, et qui s'apprête à prendre la défense de Cuba – c'est la moindre des choses ! Mais la cause cubaine et le tragique embargo qui dure depuis 1960 seront sans doute au menu des différentes rencontres de groupes de pays auxquelles Obama participera et qu'il préférera aux discussions bilatérales, tactique politique oblige…
L'Alba, «l'artillerie» de Chavez
Mais là aussi, Chavez n'a pas manqué de prévenir en affirmant : «Nous sommes en train de préparer l'artillerie.» Une phrase pleine de sens qui veut tout simplement avertir l'Oncle Sam qu'en Amérique latine et dans les Caraïbes, les choses ont changé et qu'il faudra travailler la main dans la main, mais à égalité…
Tout le monde l'aura compris, Hugo Chavez voudra jouer au «lider», influencé sans doute par les «Castro», mais il aura des difficultés, face à son homologue brésilien Lulla qui, lors du sommet du G20 à Londres, a «tapé dans l'œil» d'Obama, qui avait spontanément avoué : «I love this guy» (j'adore ce type), avant d'ajouter, «c'est l'homme politique le plus populaire du monde». Lulla, président issu de la classe ouvrière syndicaliste, dont les études ne dépassent pas celui du brevet au collège, de surcroît amputé d'un doigt lors d'un accident de travail lorsqu'il était ouvrier métallurgiste, a, en effet, fait du bon travail.
En six ans, il a réussi à stabiliser l'économie du Brésil, le plus grand pays latino-américain. Les «affinités et relations» qui se profilent déjà entre les USA, ce géant du nord des Amériques, et le Brésil, l'autre géant du sud des Amériques, seront-elles un atout pour le sommet et l'avenir des pays de l'OEA ou un risque calculé que Chavez devra prendre en compte ?
L'embargo sur Cuba, la pomme de discorde ?
Il faut espérer que les latinos ne tomberont plus dans de tels pièges, quitte à laisser Chavez y aller de sa fameuse «Alba» (Alternative bolivarienne pour les amériques) créée en 2004 par le Venezuela et Cuba pour contrecarrer les inepties «bushiennes» concernant la zone de libre-échange.
C'est, semble-t-il, ce qui est prévu, en accord avec la Bolivie, le Nicaragua, le Honduras, la République Dominicaine, l'Equateur et le Paraguay qui sont membres de l'Alba. Il y a donc fort à parier que Chavez retiendra encore – comme ce fut le cas en 2005 – l'attention des médias avec cette «offensive».
A moins qu'Obama, qui a déjà, lui aussi, pris les devants en annonçant récemment des mesures en faveur des Cubains et esquissé un «rapprochement» avec Cuba, en autorisant, notamment, sans limitation les transferts et les voyages des Américano-cubains, ne reprenne la vedette. D'autant que le président américain n'aura aucun complexe puisqu'il ne fait que détricoter les mailles guerrières tendues sur le continent latino-américain par les Bush père et fils.
Lutter contre les cartels et la mafia de la drogue
Il reste que des questions «existentielles» devront être abordées de façon très sérieuse. Elles concerneront bien sûr – et ce n'est pas par hasard si Obama s'est déjà rendu au Mexique voisin où il en a discuté avec Félipe Calderon – les cartels de drogue et tous les trafics mafieux qui sont autant de dangers actuels pour l'ensemble des pays de la région.
Au Mexique, frontalier des USA, ces questions ont une autre dimension et requièrent plus d'engagement.
C'est pourquoi, lors de sa visite au Mexique jeudi dernier, le président américain a assuré Felipe Calderon de «tout son soutien dans le combat sanglant engagé contre les cartels de la drogue». Il a aussi dit qu'il ferait tout pour faire ratifier par les Etats-Unis un accord international contre les trafics d'armes.
«Nous avons nous aussi nos responsabilités», dira Obama qui ajoute : «Nous devons faire notre part du travail. Nous devons sévir contre la consommation de drogue dans nos villes. Nous devons stopper le flux d'armes et d'argent vers le Sud.» Obama a aussi fait valoir que «90% des armes saisies au Mexique provenaient des Etats-Unis».
Un mea culpa courageux et plein de promesses
Au-delà de ce «mea culpa» courageux, le Sommet de Port of Spain ne pourra sans doute pas faire le tour des questions inscrites à l'ordre du jour des rencontres.Et, pour paraphraser le président du «Dialogue interaméricain» Peter Hakim, «le concept en vertu duquel les généraux qui dirigeaient jadis les pays d'Amérique latine allaient chercher l'aval américain avant de mener leurs coups d'État, ne fonctionne plus»…
En effet, «l'Amérique latine recherche, désormais, une Amérique du Nord moins unilatérale et moins directive, capable d'emporter l'adhésion par la persuasion».C'est tout dire nous semble-t-il…En attendant, les délégations ont eu droit à un défilé de carnaval haut en couleur et parmi les meilleurs des Caraïbes. On croit savoir que les danses furent rythmées par des steelbands, ces orchestres très bruyants composés de tambours de «récup» dont d'anciens bidons de pétrole…
Michèle et Hussein Obama ont-ils esquissé des pas de danse, sur un air de calypso, cette musique de danse populaire au rythme très africain et sur laquelle on improvise… des textes moqueurs et ironiques sur la politique, la société, l'amour... ?
C'eût été de bon ton !


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