Le couvre-feu nocturne en vigueur depuis des années à Bagdad a été levé samedi à minuit (21H00 GMT) alors qu'au moins 32 personnes ont été tuées au cours des heures précédentes dans des attaques dans la capitale irakienne. Alors que l'organisation jihadiste Etat islamique (EI) contrôle de larges pans du territoire irakien, Bagdad est considérée comme à l'abri d'une attaque majeure des jihadistes. Mais elle reste la cible d'attentats réguliers visant en particulier les forces de sécurité ou la communauté chiite. Samedi, l'attaque la plus sanglante s'est produite dans un restaurant du quartier Bagdad al-Jadida (est), vers 11H00 (08H00 GMT). Un kamikaze a fait détonner sa ceinture d'explosifs, tuant au moins 23 personnes et faisant près de 43 blessés, selon des responsables. Une autre attaque, dont le mode opératoire reste encore incertain, a fait au moins neuf morts et 28 blessés dans un centre commercial du cœur de la capitale irakienne. Malgré les attaques régulières visant Bagdad, le couvre-feu nocturne a été levé samedi à minuit (21H00 GMR) à la demande du Premier ministre Haider al-Abadi qui a ordonné cette mesure afin que "la vie soit aussi normale que possible bien que (le gouvernement) soit engagé dans une guerre". Les cafés et restaurants, qui pourront rester ouverts après minuit, espéraient une hausse de leur activité avec la fin du couvre-feu. Symboliquement, l'attaque de samedi a visé l'un d'eux. Le couvre-feu avait été établi afin de mettre un frein aux violences particulièrement meurtrières du milieu des années 2000. Les heures du couvre-feu ont varié au fil des années, mais il était récemment en vigueur de minuit à 05H00 locales (21H00 à 02H00 GMT). Selon un communiqué de son bureau, M. Abadi a en outre demandé que les rues importantes de la capitale soient rouvertes "afin de faciliter le mouvement des citoyens" et que les quartiers d'Azamiyah et Kazimiyah, dans le nord de Bagdad, soient des "zones démilitarisées". Les barrages de l'armée et de la police à travers Bagdad causent d'énormes embouteillages, ce qui exaspère nombre d'habitants de la capitale. Nouveau charnier Alors que dans le nord et l'ouest du pays, les forces kurdes et l'armée gouvernementale, appuyée par des milices alliées, tentent de poursuivre leur reconquête des régions tombées aux mains de l'EI, un nouveau charnier a été découvert dans un secteur récemment libéré. Cette fosse commune, mise au jour vendredi près du village de Bardiyane (nord), sur la base d'une information donnée par un habitant, contenait les restes des corps de 23 hommes yazidis, a indiqué le porte-parole du ministère des Martyrs de la région autonome du Kurdistan irakien. Fouad Othmane a précisé que les victimes avaient toutes été tuées par balles et que certaines avaient les mains attachées. Dimanche dernier, des combattants kurdes avaient déjà découvert les restes des corps de 25 Yazidis --hommes, enfants et femmes-- dans un charnier situé plus au sud, dans le secteur du Mont Sinjar, un fief de cette communauté kurdophone. Et selon M. Othmane, des dizaines d'autres corps se trouveraient dans un autre charnier dans le secteur d'Hardane. Considérée comme hérétique par l'EI, la minorité yazidie a été particulièrement visée par les jihadistes. Ils ont procédé à de multiples exécutions d'hommes et enlevé des centaines, sinon des milliers, de femmes, vendues comme épouses aux jihadistes ou réduites à l'état d'esclave sexuelle, selon Amnesty International. L'EI multiplie les exactions dans les régions sous son contrôle en Irak comme en Syrie voisine, où il est impliqué dans la guerre depuis 2013. Les défenseurs des droits de l'Homme et l'ONU ont accusé cette organisation ultra-radicale sunnite de nettoyage ethnique et de crimes contre l'Humanité.