Entamé le 19 janvier, le cycle de rencontres entre le président du Forum des chefs d'entreprise (FCE), Ali Haddad, et les hauts responsables de l'Etat se poursuit durant la semaine en cours. Pendant près de deux semaines de rencontres avec une quinzaine de ministres, le patron du FCE a proposé plusieurs solutions pour la promotion des entreprises algériennes et la diversification de l'économie. La délégation du FCE, conduite par son président, a été reçue, en premier, par le ministre du Commerce, Amara Benyounès. Les échanges entre les deux parties ont porté essentiellement sur le commerce extérieur, la protection de la production nationale, le crédit à la consommation et le marché informel. Lors de cette rencontre, Haddad avait plaidé pour la promotion de l'économie nationale, rappelant la mise en place de 27 commissions sectorielles chargées d'identifier les difficultés que rencontrent les entreprises et de proposer des solutions concrètes. Après des échanges fructueux, les deux parties ont convenu notamment d'installer une commission permanente qui se réunira à chaque fois que cela est nécessaire dans le but de prendre en charge les blocages que rencontrent les entreprises. Aussi, le ministère s'est engagé à lancer dans les prochains jours une campagne de promotion du produit national. Le président du FCE a rencontré par la suite le ministre de l'Habitat, de l'Urbanisme et de la ville, Abdelmadjid Tebboune, qui a mis l'accent sur la nécessité de prioriser et d'encourager le produit national pour diversifier l'économie nationale et réduire la facture d'importation. A la lumière des échanges entre les deux parties et en réponse aux doléances du FCE, plusieurs décisions ont été annoncées. Il s'agit, notamment, de la révision de loi sur la promotion immobilière et celle régissant l'activité des bureaux d'études. Les nouveaux textes seront présentés prochainement au Conseil des ministres. En rencontrant le ministre de l'Agriculture, Abdelouahab Nouri, le patron du FCE a pris connaissance du plan de développement du secteur agricole et a exprimé son engagement pour l'épanouissement dudit secteur. Il a plaidé pour l'organisation du secteur par filières qui seront les interlocuteurs directs des services techniques, un meilleur ciblage des aides et soutien de l'Etat et l'encouragement du partenariat public-privé (PPP). «Consommons national» Ali Haddad n'a pas omis d'insister sur la campagne «Consommons national» que le FCE défend depuis 2002. Il compte poursuivre cette campagne pour promouvoir le produit national, ce qui va permettre de renforcer l'entreprise algérienne et limiter les importations. Cette cause a été également défendue lors de sa rencontre avec le président du Conseil de la nation, Abdelkader Bensalah. Les échanges entre la délégation du FCE et Bensalah ont porté sur d'autres thèmes tels que l'informel, le poids des subventions et des transferts sociaux sur le budget de l'Etat et la place de l'entreprise dans la politique économique nationale. Le FCE a suggéré d'approfondir les discussions sur ces sujets à travers des séances de travail avec les parlementaires et partager avec eux des propositions qui visent la défense de l'entreprise nationale. Bensalah a assuré de la disponibilité du Conseil de nation à mettre des passerelles entre le FCE et le Sénat. Il a estimé que ces passerelles doivent être la règle, en particulier lors de la discussion des lois de finances et des grands textes économiques soumis par le gouvernement. Il a également été favorable à la demande du FCE pour l'organisation de rencontres conjoncturelles au niveau du Conseil de la nation, pour discuter de points particuliers liés à l'actualité, mais également des conférences et des symposiums ouverts à la société civile, aux universités et à des experts. Une loi de finances complémentaire Le président du FCE a été également reçu par le ministre de la Santé et de la Réforme hospitalière, Abdelmalek Boudiaf, l'occasion d'aborder plusieurs sujets en relation avec la promotion de la production pharmaceutique. Le patron du FCE a estimé que la réduction des importations d'environ 50% est tout à fait à notre portée. Il suffit notamment de permettre aux entreprises de tourner à leur pleine capacité. Face au ministre des Finances, Mohamed Djellab, les patrons ont exprimé leur mécontentement sur l'unification à 23% du taux de l'impôt sur le bénéfice des sociétés (IBS) pour les producteurs et les importateurs, une mesure introduite dans la loi de finances 2015. Les membres du FCE ne se sont pas contentés de soulever des problèmes maintes fois posés comme le manque de foncier, ils ont également évoqué des sujets plus pratiques, comme les techniques de fraude utilisées par les importateurs pour transférer des devises vers l'étranger. Ils ont soulevé d'autres aspects comme la nécessité d'adopter une démarche sélective vis-à-vis des IDE en affinant la règle des 49/51%, le code des marchés publics et la nécessité d'en utiliser les possibilités pour développer la sous-traitance. Avec le ministre de l'Industrie et des Mines, Abdessalem Bouchouareb, le patron du FCE a souligné la nécessité de l'ouverture de tous les secteurs à l'initiative privée, y compris le secteur de l'énergie ; il a également insisté sur le besoin impérieux du soutien à l'investissement national. De ce fait, les patrons ont préconisé des mesures visant principalement à atteindre une croissance globale de 7 à 10%, d'augmenter la part de l'industrie dans le produit intérieur brut (PIB) de 5% actuellement à 15%. Ces mesures prévoient également la création de quelque 500 000 emplois directs et de réduire la facture des importations de 10 milliards de dollars, tout en augmentant substantiellement les exportations hors hydrocarbures. C'est dans ce sens que le président du FCE a proposé, lors de sa rencontre avec le président de l'Assemblée populaire nationale (APN), d'aller vers l'élaboration de la loi de finances complémentaire 2015. Ceci pour l'unification du taux de l'IBS à 23% pour les activités de production et d'importation. Le président du FCE a demandé à ce que cette disposition soit revue dans le sens qui privilégie davantage les producteurs et également dans le but de donner plus de cohérence à la politique économique affichée par le gouvernement en matière de promotion de la production nationale. Ouverture du transport aérien et maritime au privé Lors de leur réunion avec le ministre des Transports, Amar Ghoul, les patrons en ont profité pour revendiquer notamment l'ouverture du transport aérien et maritime au privé. Comme ils se sont plaints de la concurrence déloyale du secteur informel. Ils ont aussi demandé la fin des privilèges accordés aux entreprises étrangères en matière de main-d'œuvre et la suppression des barrières d'accès aux marchés publics. Dans ce sens, une série de propositions élaborées par la Commissions transport du Forum a été soumise au ministère. Il s'agit notamment d'impliquer davantage les entreprises nationales dans le secteur aérien (transport, formation) avec la création d'une agence de régulation dont la mission sera de veiller au bon fonctionnement des règles de commercialité. Le FCE préconise, en matière de transport routier, la remise en place de la bourse de fret et le développement du transport multimodal route-chemin de fer avec un schéma de mise en place de plateformes logistiques reliées au chemin de fer. Quant aux ports et transport maritime, le FCE propose la démonopolisation des activités portuaires de manutentions, d'aconage et de remorquage, la mise en place du PCS (Port Community System) et de plateforme d'échange de données entre tous les opérateurs portuaires. Lors de leurs rencontres avec les ministres des Travaux publics et des Ressources en eau, les chefs d'entreprise se sont plaints aussi des cahiers des charges pour la réalisation des grands projets. Ils jugent que leurs rédactions et les conditions qu'ils imposent favorisent les groupes étrangers.
Encourager l'exportation S'agissant du secteur de la Formation professionnelle, Ali Haddad a plaidé, lors de sa rencontre avec Noureddine Bedoui, pour la révision des produits de la formation en vue de les adapter aux exigences des entreprises. Il y a lieu, dans ce cadre, de procéder à leur identification, de revaloriser certains emplois dont l'économie a besoin et qui sont délaissés par les jeunes et de revoir le fonctionnement du Fonds national de développement de l'apprentissage et de la formation continue (Fnac). Pour le FCE, il s'agit désormais pour le secteur de réfléchir non pas en termes de nombre de jeunes formés, mais en termes de contribution de la formation au développement. S'agissant du secteur des Affaires étrangères, Haddad a souligné, lors de sa rencontre avec le premier responsable du département, Ramtane Lamamra, la nécessité d'orienter les entreprises nationales à l'exportation. Les membres de la délégation du FCE ont plaidé, de ce fait, pour la construction de passerelles entre la diplomatie algérienne et le monde de l'entreprise. Cette nécessité appelle l'échange d'informations «up to date», ainsi que l'organisation d'un lien permanent avec les ambassades. Ils ont souligné en outre la nécessité de représentations économiques au sein de toutes les ambassades algériennes à travers le monde. A noter que le cycle de rencontres entre Ali Haddad et les hauts responsables de l'Etat se poursuit. A la fin de ces rencontres, le patron du FCE remettra au gouvernement un rapport détaillé sur ses échanges avec les ministres.