Mise en application après sa prochaine approbation par les deux chambres, les licences d'importation seront accordées dans la transparence avec possibilité de recours pour les opérateurs contestataires. Sans remettre en cause le principe de la liberté du commerce extérieur, la licence d'importation vise à protéger le produit national, comme c'est le cas à travers le monde, a expliqué hier à Alger le ministre du Commerce, Amara Benyounès. «Il est hors de question que l'Etat revienne au monopole du commerce extérieur», a tranché le ministre qui a rencontré les organisations patronales et l'Union générale des travailleurs algériens (UGTA) pour définir les mécanismes pour protéger le produit national. «La souveraineté de l'Algérie sur son commerce extérieur est garantie» et la mise en application de ces licences n'entrave en rien les négociations pour l'adhésion à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) comme elle ne remet pas en cause les accords signés avec l'Union Européenne et la Zone arabe de libre-échange, a poursuivi M. Benyounès. Dans l'objectif de rationaliser les importations et améliorer la gestion du commerce extérieur, le ministère va instaurer des licences d'importation et d'autres pour l'exportation. Plusieurs réunions ont été tenues entre le ministère du Commerce, le patronat et l'UGTA dans le but de dégager des recommandations à mettre en œuvre pour protéger le produit national, après approbation du gouvernement. La réunion d'hier, qualifiée de «fondamentale», sera suivie par d'autres jusqu'à la détermination de ces mécanismes à même de concrétiser cette importante opération. Le ministre a insisté, dans ce sens, sur le caractère urgent de cette action visant à donner la priorité au produit national et par là même rationaliser les importations. La protection du produit national est une étape déterminante car elle contribuera à accompagner efficacement les producteurs appelés à se mettre à niveau rapidement. Néanmoins, il précisera que les licences d'importation seront limitées dans le temps et en termes de quantités, citant à titre d'exemple les produits agricoles qui ne seront autorisés à l'importation que durant les périodes de soudure. Les licences concerneront aussi les marchandises des filières menacées. Ainsi, précisera-t-il, «aucun produit ne sera interdit à l'importation». Il a expliqué aux opérateurs économiques que l'interdiction totale d'importation d'un produit doit répondre à trois critères principaux. Il s'agit d'une production de qualité répondant aux standards internationaux, une tarification avantageuse et compétitive par rapport à celle de l'importation en plus de la capacité de couvrir la demande nationale à longueur d'année. La licence d'importation sera délivrée lorsque le produit national ne satisfait pas la demande exprimée sur le marché national ou lorsqu'il n'est pas fabriqué en Algérie.
Fin du monopole de certains importateurs Du moins, reconnaît M. Benyounès, l'industrie nationale est naissante et ne peut répondre rapidement aux exigences internationales. «Nous allons lui donner le temps nécessaire pour se développer», surtout avec l'engagement de l'Etat de relancer le secteur industriel public qui a bénéficié d'un budget de 12 milliards de dollars, sans omettre les investissements privés engagés dans le domaine industriel. Ceci dit, les licences d'importation seront soumises à deux conditions, à savoir la transparence et la non-discrimination entre les importateurs. La mise en œuvre de ces licences permettra, selon le ministre, de lever le monopole de certains importateurs qui sont les mêmes depuis de longues années. La transparence prônée par M. Benyounès sera garantie à travers l'affichage des licences dans la presse en plus du droit de recours prévu pour les importateurs. Dans le sillage de l'opération de protection du produit national, un appel est lancé à l'adresse des consommateurs qui doivent privilégier des marchandises fabriquées localement, convaincus qu'ils contribuent de cette manière à sauvegarder ou à créer de nouveaux emplois. M. Benyounès a annoncé dans ce sens le lancement, dans une vingtaine de jours, de la «campagne nationale sur la consommation» visant à protéger la production nationale dans toutes les filières. Une journée nationale pour consommer national sera également proposée au gouvernement la semaine prochaine. Quant à l'avant-projet de loi modifiant et complétant l'ordonnance du 19 juillet 2003 relative aux opérations d'importation et d'exportation de marchandises, il sera présenté devant l'Assemblée nationale populaire au cours de la session de printemps qui a débuté lundi dernier. A propos de la licence d'exportation, elle vise à limiter les exportations de matières premières comme le corail afin de répondre en premier lieu aux besoins nationaux. Pour sa part, le patron de l'UGTA, Abdelmadjid Sidi Said, a applaudi la démarche du ministère du Commerce et a souligné que «c'est une vision qui consiste à booster la production nationale. Nous passons d'étape de vision à une action pratique». Sans que l'information ne soit confirmée ou infirmée par le ministre, il a salué la décision du gouvernement de mettre fin aux entreprises étrangères spécialisées dans l'importation. «C'est une décision historique importante», s'est-il réjoui.