La militante des droits de l'homme, Khadija Ryadi, a relevé mardi soir à Paris un «retour remarquable» aux procès politiques «inéquitables» au Maroc où la justice demeure, selon elle, «instrumentalisée». «Après les acquis arrachés dans les années 1990, nous constatons de plus en plus un retour aux procès politiques au Maroc où le régime instrumentalise la justice, tantôt en prétextant une lutte contre le terrorisme, tantôt en maquillant des procès politiques en procès de droit commun», a-t-elle indiqué lors d'une rencontre-débat, organisée par la section d'Ile-de France de l'Association marocaine des droits humains (AMDH). Pour la coordinatrice du collectif marocain des instances des droits humains (CMIDH, composé de 22 organisations de défense des droits humains), les attentats de Casablanca en 2003 avaient servi de «prétexte pour revenir à des pratiques répressives» au Maroc au nom de la lutte antiterroriste. «Il y a eu des violations des droits de l'homme, des milliers d'arrestations arbitraires, des centaines de procès politiques», a-t-elle rappelé, soulignant que «même si le chef de l'Etat (roi) lui-même avait reconnu qu'il y a eu, lors de cette campagne des dépassements, aucun procès n'a été revu et aucun détenu n'a eu le droit à un nouveau jugement». Aux yeux de la lauréate du prix des Nations unies 2013 pour la cause des droits humains, ce ne sont pas seulement les islamistes qui ont été la «cible de cette répression», mais cela s'est «généralisé par la suite, en atteignant d'autres catégories sociales et professionnelles dont les journalistes, les défenseurs des droits humains et autres étudiants activistes». «C'est une répression qui a commencé à faire tache d'huile au Maroc notamment après le mouvement de février 2011, touchant même les activistes sahraouis, depuis les évènements d'El Ayoun en arrivant au groupe dit de Gdeim Izik», a-t-elle affirmé. L'ex-présidente de l'Association marocaine des droits humains a fustigé les pouvoirs publics qui, selon elle, «se refusent, à ce jour, de reconnaître que des personnes innocentes se sont fait emprisonner pour leurs opinions politiques». «Récemment, le Conseil national des droits de l'homme soutenait qu'il n'y avait pas de prisonniers politiques au Maroc, et que les personnes dont parlent l'AMDH et les ONG sont des criminels et des malfaiteurs», s'est-elle offusquée, signalant qu'au jour d'aujourd'hui le CNDH «n'a pas encore rendu public son rapport sur des dépassements constatés lors des événements de février 2011».