A coups de poings, Youssef a dû compter les points qu'allaient marquer la procureure et la juge...«Je ne voulais pas l'agresser, je voulais simplement discuter avec lui et éloigner mon frère du contentieux», a crié Youssef C. trente-quatre ans, inculpé pour coups et blessures volontaires à l'encontre de Messaoud R., vingt-neuf ans. «Oui, c'est bon à savoir. Vous ne vouliez pas l'agresser et la victime s'en sort avec un arrêt de travail de quinze jours !», jette Nadia Bouhamidi, la juge d'El Harrach (cour d'Alger), plutôt calme en ce mardi gris de mai 2009. «Oui, sincèrement, je n'avais pas l'intention de lever sur lui la main, mais c'était tout de même parti», précise avec beaucoup de peine l'inculpé. «Mais, vous l'aviez fait pour une aimable somme de dinars ! Pourquoi en arriver aux mains pour l'argent ? Regardez un peu les désagréments causés aux policiers et à la justice. Bon, ça va», tranche provisoirement la présidente qui va entendre la victime lourde à la détente tout de même. «Alors, ici, nous n'allons tout de même pas reprendre les propos de cette victime, laquelle, il est bon de le préciser, était passée des coups à la tentative de meurtre !»Faïza Mousrami, la représentante du ministère public, intervient pour revenir au délit du jour : l'article loi de 66 du code pénal s'appuyant sur le certificat d'arrêt de travail, elle allait gronder l'inculpé et lui demander avec quelle arme il avait battu la victime. «Nous avons roulé à terre, nous nous sommes pris à la gorge et j'ai réussi à lui rendre coup pour coup. Vous entendez madame la présidente.»«Inculpé, la présidente c'est moi : retournez-vous lorsque vous vous adressez au tribunal et même si c'est madame la procureure qui pose les questions», coupe la juge qui a visiblement une idée sur ce qui s'est passé en ce début mai 2009 à la Glacière, lieu privilégié pour les rixes et tous les délits qui ne devraient pas avoir lieu. Se retournant vers la victime, elle articule : «C‘est quoi cette histoire de contentieux avec le frère de l'inculpé. Répondez juste à la question.» «C'est une longue histoire qu'il faudrait reprendre dès le début...» «Ah ! non. Nous n'allons pas passer la journée à écouter des trucs qui ne se trouvent pas dans le dossier.» Après quoi, Bouhamidi prend note de l'an de prison ferme et des dix mille dinars d'amende requis par la représentante du ministère public qui savait où elle allait, car le jour de leur présentation, elle était de permanence au sous-sol du tribunal. Le dernier mot appartenant à l'inculpé, la présidente ne fait aucun commentaire, surtout que l'inculpé avait crevé les us et coutumes des tribunaux en demandant la relaxe. C'est pourquoi les deux mois de prison ferme infligés par Bouhamidi ont permis à la maman de cesser de pleurer car n'ayant pas de défenseur, elle craignait le pire pour son rejeton.