La société se porte bien mal car des dossiers portant sur des parents battus par leurs propres enfants ne cessent d'arriver sur le pupitre des magistrats. El Harrach ne détient pas le record des dossiers de cette nature : il y aussi Bir Mourad Raïs, Chéraga, Blida, et même la tranquille Larbaâ, la calme Boufarik et Alger avec... Hussein-Dey. Décidée à trancher au plus vite avec ce bonhomme inculpé de coups et blessures volontaires, insultes, destruction de biens sur ascendant, un papa handicapé, victime d'un accident du travail, est venu supplier le tribunal de le débarrasser de ce «phénomène négatif» (l'expression est du papa). Selma Bedri avait montré à la veille de ce mois de juillet 2009 des dispositions à ne pas se faire prendre au jeu de ce comédien raté, de ce Abdelbaki Z. 32 ans, déjà condamné pour menaces sur le papa il y a de cela une année. «Alors, on ne veut pas craindre Allah, à défaut de la justice. Les trois mois de prison ferme de l'année dernière semblent n'avoir eu aucun effet sur vous !» tonne la présidente de la section pénale d'El Harrach (cour d'Alger), une présidente si sûre de sa démarche que certains avocats présentent à tort comme étant une magistrate sévère à la limite de l'agressivité. Elle est sévère ? Agressive ? Peut-être bien pour la sévérité, mais l'agressivité, nous n'avons à aucun moment des longs débats décelé le moindre signe d'incorrection. Visiblement bien élevée, excellemment notée à la Fac, nous a-t-on susurré à l'oreille, très estimée par ses collègues, Bedri avait ce samedi un dossier chaud. Elle l'a si bien étudié ainsi que la personnalité du détenu qu'elle avait beaucoup d'aisance à suivre les plaintes du papa. «Ma paralysie ne me fait pas souffrir autant que mon propre sang !» avait résumé hadj Tahar, la victime. Ces mots sont allés droit aux oreilles de Youssef Menasra, le procureur, qui allait requérir le maximum de la peine pour coups sur ascendant, sans prendre en compte le reste des poursuites. Le détenu n'a même pas eu le courage de demander pardon, ni même de tenter de regarder le pauvre papa dans les yeux. Et le verdict tombera en fin d'audience : Abdelbaki écope de quatre ans de prison ferme et c'est tout un toit en tuiles rouges qui va s'écrouler sur sa tête alors que le papa n'était plus dans la salle...