Cette nouvelle publication aux éditions Casbah de Rachid Ouaïssa sur la guerre d'Algérie perçue par les acteurs français permet de remettre les pendules à l'heure et de mieux appréhender «cette guerre selon un œil plus scientifique que militant» . Cet ouvrage a donné à «cette guerre une place de choix parmi les grandes guerres en la plaçant dans le cadre des grands enjeux internationaux et dans le cadre des contradictions du système mondial et des rapports de force entre l'Est et l'Ouest, entre le Sud et le Nord», selon les propos de l'auteur allemand Harmut Elsenhans, jeune étudiant en France à l'époque de ces entretiens. Rachid Ouaïssa a remis au goût du jour ces carnets de cet Allemand pour avoir une idée précise de la conjoncture de l'époque et des divers enjeux. Cette œuvre parue en 1999 à Publisud sous le titre La guerre d'Algérie 1954/1962 la transition d'une France à une autre a été boycottée et la guerre d'Algérie est restée prisonnière des mémoires officielles, mais aussi du monopole d'une certaine classe «d'homo academicus» dit-il dans sa préface. L'Algérie épine dorsale de l'histoire française A partir de ses entretiens, avec de hauts responsables, notamment des intellectuels de gauche, des responsables de la droite, de l'extrême droite, des militaires et hauts fonctionnaires, Pierre Messmer, Jean Marie le Pen, Jacques Soustelle, Alexandre Sanguinetti, Bernard Tricot, Vidal-Naquet , Jacques Mitterrand, Daniel Mayer, Hartmut, Elsenhans fait une analyse de cette guerre qui lui fait dire que «la guerre d'Algérie, c'est le destin politique de la France sur l'échiquier international qui se dessine et son passage d'un statut de puissance mondiale à celui de puissance régionale tout en mettant à nu le déchirement de la société française». Ce livre tente de montrer à travers les entretiens de Hartmut Elsenhans que ce passé tumultueux non reconnu et ce visage hideux de la colonisation pèseront sur la France tant que le désir de résipiscence ne sera pas fait. A ce sujet , l'auteur allemand s'exprime ainsi : «L'Algérie restera l'épine dorsale de l'histoire française ; tant que la France officielle n'aura pas le courage de dire que la guerre d'Algérie était injuste, criminelle et n'aurait jamais dû avoir lieu. Or avec la loi du 23 février, c'est encore une chance ratée pour la France de se réconcilier avec ses colonies mais avec elle-même et avec sa conscience».
La guerre d'Algérie est toujours en débat Les multiples entretiens montrent les visions contradictoires de la France, notamment les intellectuels de gauche qui stigmatisent cette guerre et leur soutien inconditionnel comme le réseau Janson ou «les porteurs de valise» et ceux partisans d'une «Algérie française». Pour l'auteur «la guerre d'Algérie n'a pas forgé la nation algérienne, mais aussi la nation française qui continue à construire l'histoire des générations futures sur les mythes, les crimes et les mensonges des générations passées», dit il Cet ouvrage est intéressant par sa position impartiale et la vision d'Elsenhans qui, au regard des cinquante années, depuis le déclenchement de la guerre d'Algérie, cette guerre reste toujours en débat. L'ouvrage est accompagné d'un glossaire pour les abréviations et d'une postface de Hartmut qui essaye d'expliquer les divergences entre les deux pays pour ce devoir de mémoire et de contrition.