Après avoir écarté le recours aux financements extérieurs, par crainte de perdre sa «souveraineté», le gouvernement trouve désormais des vertus à cette option. Le ministre du Commerce défend le recours à l'endettement en avançant des arguments pour convaincre l'opinion publique du bien-fondé de cette alternative. A défaut d'entendre les explications du ministre des Finances, Abderrahmane Benkhalfa, plus habilité à s'exprimer sur ce sujet, c'est son collègue du Commerce qui vient en éclaireur. Hier, Bakhti Belaïb a tenté de défendre la décision du gouvernement de recourir à l'emprunt extérieur dans le contexte de la crise financière actuelle engendrée par la chute des prix du pétrole. En effet, il a indiqué qu'«un éventuel recours de l'Algérie à un emprunt extérieur pour financer des projets d'investissement ne devrait pas être diabolisé, car il ne signifie, en aucun cas, une vulnérabilité financière du pays». Le ministre du Commerce, qui a répondu à une question de la presse en marge d'une réunion de travail avec l'Union nationale des paysans algériens (Unpa), s'est interrogé sur les critiques faites par certains milieux après l'annonce officielle de contracter des prêts extérieurs : «Pourquoi diaboliser l'endettement (extérieur) de cette manière ? C'est (le fait de diaboliser) une démarche qui n'est pas sensée». Pour étayer ses propos, il a expliqué que «même des pays riches recourent à des emprunts extérieurs, et lorsqu'un pays utilise judicieusement l'argent emprunté, il lui serait alors préférable d'épargner les ressources financières qu'il possède». Et d'ajouter : «Beaucoup de pays sont endettés dans le monde, et très souvent, il s'agit de pays des plus riche. Mieux encore, la raison de leur richesse s'explique par un bon endettement.» S'agissant du montant et du taux d'intérêt du prêt que l'Algérie envisage de contracter auprès de la Chine, Belaïb a estimé qu'«un gouvernement sérieux, lorsqu'il évoque la possibilité d'emprunter, ne peut pas donner les résultats à l'avance avant même de s'entendre avec son partenaire (créancier)». Une fois contracté, le prêt en question permettra de financer des projets «utiles», a-t-il assuré. Les explications apportées, hier, par le ministre du Commerce au sujet du financement chinois sont loin de rassurer l'opinion publique, notamment les opérateurs économiques. Ces derniers s'interrogent sur les modalités et les conditions de mise en œuvre de cette formule. Les entreprises chinoises seront-elles favorisées par rapport aux autres compagnies dans la réalisation de projets structurants algériens ? Comment l'Algérie pourra-t-elle rembourser ces prêts alors que les caisses de l'Etat risquent d'être vides dans une année, voire deux ans ? Pour les plus avertis, l'économie algérienne n'a jamais pu honorer ses dettes, ni moins les services d'intérêts bancaires. Totalement absente sur la scène internationale, à l'exception de l'exportation du pétrole et du gaz, l'Algérie avait utilisé ses réserves de change pour procéder à des remboursements anticipés de sa dette extérieure. Ce désendettement a été effectué grâce aux recettes pétrolières et non pas par le fait de la machine économique considérée parmi les plus faibles de la région méditerranéenne. Quant à la comparaison faite par le ministre du Commerce avec les pays riches qui s'endettent, elle est en partie inappropriée, dans la mesure où il s'agit de pays fortement industrialisés et solvables.