Elles étaient une centaine de femmes auxquelles se sont joints plusieurs personnalités de la société civile, de partis politiques et un nombre considérable de citoyens, à envahir ce lundi matin la placette Saïd-Mekbel de Béjaïa. Un rassemblement a été tenu pour répondre à l'appel d'un groupe de jeunes filles et de femmes diffusé sur les réseaux sociaux afin de dénoncer les violences faites aux femmes et manifester également leur colère à la suite de l'assassinat, la semaine passée, de Razika Cherif, une jeune femme de M'sila écrasée par un chauffeur dont elle a rejeté les avances. L'animatrice principale de la manifestation, Yamina Houria Dabouz, a expliqué que l'objectif de cette manifestation n'était pas simplement de s'indigner mais de provoquer un véritable sursaut de la société civile pour qu'«enfin cessent toutes les violences contre les femmes», clame l'initiatrice de ce rassemblement. «Cet assassinat, parce que c'en est, est loin de constituer un événement. Il s'inscrit dans un processus d'interdiction des espaces publics aux femmes. C'est un problème qui prend ses racines dans la politique menée jusque-là par les pouvoirs publics à l'égard des femmes», ont soutenu de nombreux intervenants. «Sans les textes législatifs réduisant la femme au statut de mineure, notre condition n'en serait pas là», renchérit une retraitée de l'éducation nationale qui a rappelé «la nécessité de l'abrogation du code de la famille aux dispositions honteuses». L'oppression patriarcale et l'éducation telle que pratiquée à l'école et au sein de la cellule familiale ont constitué l'essentiel du procès fait aux violences dont sont victimes les femmes lors de ce rassemblement. «La violence commence au sein de la famille lorsque les parents apprennent aux garçons que leur sœur n'est pas leur égal», soutient une intervenante qui raconte le drame vécu par les femmes en milieu professionnel et auxquelles les parents refusent d'aller en justice par peur du scandale. De son côté, le vice-président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme, Saïd Salhi, a dressé un véritable réquisitoire contre les pouvoirs publics qu'il n'a pas manqué d'interpeller sur les pratiques en vigueur concernant l'application des textes. «Il y a un grave problème d'atteinte aux droits les plus élémentaires des femmes que les pouvoirs publics refusent d'admettre», accuse le militant des droits de l'homme, en montrant du doigt le Conseil de la nation qui bloque encore, selon lui, la loi contre les violences faites aux femmes. A propos de l'affaire de la défunte Razika Cherif, le représentant de la Laddh a tenu à nous faire part, en marge de ce rassemblement, que l'Observatoire algérien des procès (OAP), affilié à la ligue, suivra de près le déroulement du procès de l'assassin. «La Ligue algérienne de défense des droits de l'homme veillera pour que justice soit rendue à la femme lors de ce procès», assurera Salhi.