Le projet de loi de finances 2016 a été adopté hier par la majorité des députés de l'Assemblée populaire nationale, sous une forte contestation des élus de l'opposition. Rares sont les lois de finances adoptées dans de telles conditions de chahut et d'altercations entre les députés des partis au pouvoir et ceux de l'opposition. Les multiples tentatives des groupes parlementaires de l'opposition tels le PT, le FFS, l'AAV, le FJD à travers la proposition de plusieurs amendements ou encore en protestant haut et fort lors de la plénière n'ont pu bloquer l'adoption de cette loi qualifiée de «dangereuse» pour le pays. Avant même qu'il ne soit soumis au vote, les députés de l'opposition ont occupé la tribune et ont exprimé leur grande colère au ministre des Finances, Abderrahmane Benkhalfa, qui est resté sur place sans réagir. Dans le vacarme et les bousculades, l'article 71 modifié par la Commission des finances et du budget a été finalement adopté par les députés du FLN et du RND. La Commission a modifié l'article en introduisant un ajout selon lequel le ministre des Finances peut opérer des changements sur les budgets, mais doit à la fin de chaque année financière communiquer à la Commission des finances une présentation générale sur les modifications apportées aux budgets. Pour contester cette adoption «forcée», les députés de l'opposition ont décidé d'investir la rue et ont improvisé un rassemblement, tout en multipliant les déclarations à la presse pour dénoncer un «forcing» pour adopter la loi de finances «coûte que coûte», avant de rejoindre une nouvelle fois l'hémicycle. Le ministre des Finances, Abderrahmane Benkhalfa, qui a pris la parole à l'issue de l'adoption du projet, a salué les députés et a dit être «fier» d'assister à cette «grande bagarre» reflétant, selon lui, «la liberté d'expression en Algérie». Ignorant ainsi tout le vacarme qui a duré près de quatre heures, le temps de soumettre au vote le projet de loi article par article, Benkhalfa a salué les interventions des parlementaires qui se soucient de la sécurité économique du pays et des intérêts des citoyens. La politique de privatisation maintenue L'article 66, qui indique que «les entreprises publiques économiques qui réalisent des opérations d'ouverture du capital social en direction de l'actionnariat national résident doivent conserver au moins 34% du total des actions ou des parts sociales», rejeté par la commission, a été finalement réintroduit lors de la séance du vote. Le ministre des Finances a proposé une modification orale à travers laquelle les entreprises privées peuvent acquérir 66% des actions des entreprises publiques avant de passer à une acquisition totale après 5 ans, au prix que fixera le Conseil des participations de l'Etat. Malgré la contestation de l'opposition, l'article en question a été approuvé par la majorité (FLN-RND). «Nous avons tout essayé, que ce soit par voie réglementaire ou par les tentatives de bloquer son adoption, l'article 66 a été finalement adopté», a déploré une députée. Certains représentants du FLN se sont opposés à cet article, mais n'ont pu rien faire. Hanachi Nadia, députée de ce parti, a fini par rejoindre les rangs du PT pour dire non à l'adoption de l'article 66. Les élus du PT, en revanche, n'entendent pas se limiter à leur action au niveau de l'APN et ont décidé d'interpeller le président de la République sur certains articles, contraires, selon eux, à ses propres engagements. Les membres de l'APN des formations de l'opposition ont critiqué «l'abandon de l'Etat de son caractère social» en proposant une telle loi, qui ne fait qu'«appauvrir les pauvres» à travers les différentes hausses prévues. Ainsi, toutes les augmentations prévues dans le PLF 2016 ont été adoptées, avec l'introduction d'une hausse supplémentaire de la taxe sur les produits pétroliers de 1 DA pour l'essence super et l'essence sans plomb (6 DA d'augmentation au total) et une baisse de 1 DA pour le gasoil au lieu de 2 DA comme proposé initialement. L'autre article qui a été fortement contesté est l'article 2 qui a été modifié pour obliger les entreprises à réinvestir 30% des bénéfices correspondant aux avantages accordés dans le cadre des dispositifs de soutien à l'investissement. Le premier amendement introduit par la commission des finances portait sur un réinvestissement de 50%, ramené à 30% dans son rapport final. Il faut savoir que la majorité des amendements proposés par les députés du PT et l'AAV notamment ont été rejetés. Budget d'équipement par secteur Le texte de loi de finances 2016, adopté hier à la majorité à l'Assemblée populaire nationale (APN), prévoit un budget d'équipement de 3.176,8 milliards (mds) DA, composé des dépenses d'investissement pour 2.403,3 mds DA et d'opérations en capital de 773,4 mds DA. Voici la répartition de ce budget par secteur (Unité : milliards DA). - Industrie : 7,37 - Agriculture et hydraulique : 271,43 - Soutien aux services productifs : 36,22 - Infrastructures économiques et administratives : 685,7 - Education-formation : 159,75 - Infrastructures socio-culturelles : 113,12 - Soutien à l'accès à l'habitat : 469,78 - Divers : 600 - Plans communaux de développement (PCD) : 60 Total investissements : 2.403,4 - Soutien à l'activité économique (dotations aux CAS et bonification du taux d'intérêt) : 542,9 - Provision pour dépenses imprévues : 230,5 Total opérations en capital : 773,4 En plus de ce budget, il est prévu un plafond d'autorisation de programme de 1.894,2 mds DA. Ce montant couvre le coût des réévaluations du programme en cours et le coût des programmes neufs susceptibles d'être inscrits au cours de l'année 2016, précise le projet de loi.