Les chiffres communiqués hier par le gouverneur de la Banque d'Algérie sur la situation financière du pays sont inquiétants. Ils confirment que la baisse des revenus pétroliers a été fortement ressentie. En effet, Mohamed Laksaci a décliné hier des chiffres inquiétants sur les réserves de change de l'Algérie qui ont baissé à 152,7 milliards de dollars (mds usd) à fin septembre 2015 contre 159,03 mds usd à fin juin 2015, soit une baisse de 6,33 mds usd entre juin et septembre. En une année (septembre 2014 - septembre 2015), la contraction des réserves de change a été de 32,57 mds usd. Au niveau actuel, elles permettent d'assurer un peu plus de deux ans d'importations. Le Fonds de régulation des recettes (FRR) et le stock d'épargne du Trésor s'élèvent à 2913,3 milliards de dinars (27,22 milliards de dollars) contre 4488,2 milliards (42 milliards USD) à fin décembre 2014, soit une baisse de 1574,9 milliards de dinars (14,71 milliards de dollars). Il est clair que les réserves de change ont été fortement affectées par la forte baisse des exportations algériennes d'hydrocarbures, qui ont baissé de plus de 35 milliards de dollars cette année en raison de la chute du prix du baril. Le déficit de la balance des paiements a également atteint un seuil historique. Il s'élève à 20,8 mds usd au cours des neuf premiers mois 2015 contre un déficit de 3,02 mds usd durant la même période de 2014. Ce déficit risque de dépasser les 25 milliards de dollars pour l'année 2015. Ce qui constitue un précédent pour l'Algérie et corrobore avec les prévisions du Conseil économique et social (Cnes) annonçant un déficit de près de 30 milliards de dollars. Le gouverneur, dans sa présentation du rapport de la conjoncture économique et financière en présence des PDG des banques et établissements financiers en activité en Algérie, a apporté des explications sur cet énorme déficit de la balance des paiements. «La contraction des réserves officielles est induite par le creusement du déficit de la balance des paiements sous l'effet du choc externe, résultat d'une baisse drastique et surtout continue des cours mondiaux du pétrole, a expliqué Laksaci, estimant que la situation actuelle est différente de celle de 2009 où les prix du pétrole s'étaient rapidement relevés. Mais, selon des sources bancaires, ce déficit s'explique par les transferts effectués par les compagnies internationales en activité en Algérie et la facture des importations. Les finances publiques détériorées L'impact du «choc externe» de grande ampleur sur les fondamentaux a induit une dépréciation de 19,57% du cours moyen du dinar contre 1 dollar américain entre janvier et septembre 2015, et de 2,16% par rapport à l'euro, a souligné également Laksaci dans son rapport, tout en estimant que «le taux de change effectif réel du dinar reste apprécié par rapport à son niveau d'équilibre de moyen terme, en situation d'élargissement du différentiel d'inflation et de tensions sur les marchés des changes». Le gouverneur de la Banque centrale a tiré la sonnette d'alarme quant à l'impact du «choc externe» sur les finances publiques, en présentant des chiffres peu rassurants. Ainsi, les recettes de la fiscalité pétrolière ont atteint 1834,14 milliards de dinars (mds DA) à fin septembre 2015 contre 2603,4 mds DA à la même période de 2014. Ainsi, le solde global du Trésor s'est détérioré davantage pour atteindre un déficit de 1653,6 mds DA au cours des neuf premiers mois de 2015 contre un déficit de 789,6 mds DA à la même période de 2014. En conséquence, le stock d'épargne financière du Trésor a chuté à 2913,3 mds DA à fin septembre contre 3521 mds DA trois mois auparavant. «Au total, les ressources du Trésor ont subi une érosion drastique de l'ordre de 1972,8 mds DA entre fin septembre 2014 et fin septembre 2015, soit une réduction de 40,4% en l'espace de douze mois seulement, après plusieurs années d'efforts soutenus d'épargne budgétaire.» Il se trouve aussi que même la liquidité globale au niveau des banques a accusé une baisse. Elle passe de 2700 milliards DA à fin 2014 à 1828 milliards DA en septembre 2015. La Banque centrale devra refinancer certaines banques dès ce 1er trimestre 2016. Par ailleurs, le gouverneur de la Banque d'Algérie a annoncé la mise en place d'une série de mesures pour faire face aux fluctuations de la valeur du dinar. Il s'agit d'une couverture des risques à terme permettant aux entreprises et aux opérateurs de s'assurer contre les pertes de change. Concrètement, il est proposé deux mécanismes, à savoir l'achat des devises à terme ou la souscription à une assurance sur le risque de change. Cette décision devra permettre aux opérateurs économiques de faire face aux pertes liées aux pertes de change et d'assurer une sécurité dans les transactions commerciales internationales.