Le camp mené par le Hezbollah a été défait avant-hier lors des législatives, au profit de la coalition du 14 Mars qui doit désormais relever le défi d'éviter une nouvelle crise dans le pays. Les résultats officiels étaient attendus pour hier dans la journée, mais les célébrations avaient déjà commencé dans la nuit de dimanche à lundi du côté de la majorité. «C'est un grand jour pour l'histoire du Liban démocratique», a lancé avant l'aube leur chef de file, Saad Hariri, en annonçant la victoire à ses partisans. Le succès de la majorité parlementaire était qualifié d'«historique» hier par le quotidien Al Moustaqbal de M. Hariri, selon qui elle a obtenu 71 sièges contre 57 pour l'opposition. Le principal allié chrétien du Hezbollah a reconnu la défaite. Il s'agit d'«une victoire pour la coalition du 14 Mars (nom donné à la majorité) mais aussi d'une défaite pour les Libanais qui aspiraient au changement», a déclaré Michel de Chadarevian, un membre du Courant patriotique libre (CPL) dirigé par Michel Aoun. «La majorité de retour», confirmait le quotidien Al Akhbar, proche de la minorité, évoquant la «grande défaite» de l'opposition. «Victoire du Liban», clamait à l'inverse le quotidien basé à Londres, Asharq Al Awsat. En Syrie, ancienne puissance de tutelle, des journaux ont accusé la coalition antisyrienne d'avoir «acheté des voix». «La résistance, un sujet non négociable», selon le Hezbollah Dans une première réaction, le Hezbollah a prévenu la majorité parlementaire que le puissant arsenal de la milice chiite était un sujet «non négociable». Un député du parti a prévenu qu'il était hors de question pour sa milice de désarmer. «Il faut que la majorité s'engage à ce que la "Résistance" soit un sujet non négociable, (à considérer) que ses armes sont légitimes et qu'Israël est un ennemi», a dit Mohammad Raad. Selon le député, la victoire de la majorité signifie une poursuite du bras de fer qui dure depuis quatre ans entre les deux camps. «Numériquement parlant, les résultats montrent que la crise fait du surplace, sauf si la majorité change de comportement», a-t-il souligné. «Soit la majorité donne des garanties (concernant l'arsenal du Hezbollah), soit elle accorde la minorité de blocage» dans le futur gouvernement, a-t-il précisé. Auparavant, évoquant la défaite du «parti de Dieu», le ministre israélien des Transports, Israël Katz, avait fait valoir qu'il était désormais question de procéder à ce désarmement, évoquant des résolutions de l'ONU.Le prochain gouvernement libanais devra empêcher toute attaque anti-israélienne depuis son territoire, a par ailleurs signalé l'entité sioniste, qui a mené une guerre de plus d'un mois à l'été 2006 contre le Liban. Quelle forme pour le prochain gouvernement ? A Beyrouth, la principale interrogation résidait dans la forme que prendra le prochain cabinet. Si le mouvement de M. Aoun, allié du Hezbollah, a indiqué qu'il respecterait les résultats, il a ajouté qu'il travaillerait avec la coalition de M. Hariri en vue de former un gouvernement d'union nationale. Le Hezbollah veut un gouvernement d'union, quel que soit le vainqueur. La majorité, sans écarter ce scénario, refuse que l'opposition dispose d'un droit de blocage dans un tel cabinet, comme c'est le cas dans l'actuel gouvernement d'union. «L'opposition va-t-elle insister encore une fois sur une minorité de blocage et la majorité va-t-elle de nouveau refuser de le lui accorder ?», s'interroge le quotidien As Safir, proche de la minorité. Selon le quotidien Al Akhbar, les premières réactions «indiquent que le pays est à un tournant : soit l'accord (interlibanais) de Doha est renouvelé, soit on se dirige vers une confrontation». L'accord de Doha signé en mai 2008 avait mis fin à des affrontements intercommunautaires sans précédent depuis la fin de la guerre civile (1975-1990) qui ont fait une centaine de morts.