Le petit village d'El Eulma, constitué de quelques familles d'une même fraction de tribu, a été baptisé en 1854 par le colonialisme au nom du tristement célèbre maréchal Saint-Arnaud. Sa population autochtone, qui avoisinait les dix mille habitants avant l'indépendance, n'a jamais cautionné la dénomination coloniale de la ville, continuant à l'appeler El Eulma. La région était réputée pour sa production agricole mais les meilleures terres où se pratiquait surtout la céréaliculture et le maraîchage ont été accaparées par les gros colons. La population arabe habitait dans des regroupements ruraux ou des habitations individuelles de fortune ; la plupart des Algériens travaillaient comme employés saisonniers, manutentionnaires, ouvriers occasionnels. Malgré les conditions de vie très difficiles, la grande masse des Algériens était acquise aux idées nationalistes. A l'indépendance, bien des choses allaient changer, transformant ce paisible village en une plaque tournante commerciale d'envergure nationale. Dubaï, du bazar au quartier des affaires Depuis ces dix dernières années, la commune d'El Eulma est devenue célèbre grâce à son quartier dit «Dubaï». Le lieu est devenu un véritable pôle régional et même national du commerce, et le fameux souk n'en finit pas de grandir. En effet, des milliers de visiteurs viennent des quatre coins du pays au quotidien pour s'y approvisionner et y échanger des marchandises. Il faut dire aussi que des sommes d'argent considérables circulent et s'échangent dans ce marché connu aussi par son commerce informel. Plus que la moitié des masses monétaires, qui transitent par ici échappent au contrôle de l'Etat. A l'origine, «Dubaï» n'était qu'un petit souk informel où s'écoulait la marchandise de contrebande, généralement l'habillement et l'électroménager. Puis, avec l'ouverture économique, des importateurs et des contrebandiers organisés y ont élu domicile, transformant le souk en une zone de business et de commerce de marchandises, acheminées depuis les Emirats arabes unis, Dubaï en tête. Ils ont ainsi fait de cet espace un lieu qui deviendra par la suite un grand carrefour commercial. Près de 20 000 emplois Il y a des années, lorsqu'on passait par cette petite ville très modeste, les passagers sentaient qu'ils traversaient juste un petit douar. Sa situation stratégique, qui en fait un lieu de passage obligatoire entre l'est et le centre du pays, et sa proximité du marché de Tadjenanet, autre haut lieu de commerce informel, sont les facteurs prépondérants qui ont incité les maîtres du business parallèle à créer un pôle commercial, faisant concurrence au lobby connu de Tadjenanet. L'une des particularités de ce souk est qu'il est implanté en plein quartier résidentiel. Il convient de signaler que les commerçants ne sont pas les seuls à tirer profit de la renommée du souk, puisque les propriétaires des locaux louent à prix fort, dépassant parfois les 250 000 DA par mois. Les jeunes oisifs aussi ont trouvé occupation et en tirent profit, qu'ils soient portefaix ou gardiens de parking. Ce grand marché est occupé par plus de 3000 commerçants et accueille, au quotidien, des centaines de milliers de tonnes de marchandises diverses. Les locataires sont issus de toutes les régions du pays. Il faut rappeler aussi que ce marché offre 20 000 postes d'emploi. Enfin, seul inconvénient dans cet endroit, le désordre et l'anarchie.