Le royaume marocain veut revenir à l'Union africaine, et ce, 32ans après l'avoir quittée pour protester contre l'admission, en 1982, de la République arabe sahraouie démocratique. Le Maroc a fait sa demande de réintégration à l'organisation panafricaine officiellement à l'occasion de la 27e session ordinaire des chefs d'Etat et de gouvernement de l'UA, réunis les 17 et 18 juillet à Kigali (Rwanda). C'est à travers une lettre adressée aux participants au Sommet africain que le Roi Mohammed VI a exprimé la volonté de son pays de retrouver sa place au sein de l'union. «Cette décision de retour, réfléchie et longuement mûrie, émane de toutes les forces vives du royaume. Par cet acte historique et responsable, le Maroc compte œuvrer, au sein de l'UA, en vue de transcender les divisions», a expliqué le roi qui évoque la place de son pays dans le continent et les conditions de son retrait, le 12 novembre 1984, de l'Organisation de l'unité africaine, OUA, ancêtre de l'UA. Dans sa lettre, le souverain marocain qualifie la République sahraouie de «pseudo Etat», d'«Etat fantôme» et réclame à l'Union africaine d'adopter une position de «neutralité» par rapport à la question. Pour lui, l'adhésion de cet Etat à l'UA est une «erreur historique» qu'il faut corriger et «un legs encombrant» dont il faut se débarrasser. «Sur la question du Sahara, écrit Mohammed VI, l'Afrique institutionnelle ne peut supporter plus longtemps les fardeaux d'une erreur historique et d'un legs encombrant. L'Union africaine n'est-elle pas en contradiction évidente avec la légalité internationale ? Puisque ce prétendu Etat n'est membre ni de l'Organisation des Nations unies, ni de l'Organisation de la coopération islamique, ni de la Ligue des Etats arabes, ni d'aucune autre institution sous-régionale, régionale ou internationale.» Il souligne qu'au moins 34 pays membres de l'union ne reconnaissent pas ou plus cette entité, ajoutant que parmi les 26 pays qui s'étaient placés dans le camp de la division en 1984, seule une stricte minorité, d'une dizaine de pays, subsiste. «Cette évolution positive est, d'ailleurs, conforme à la tendance observée au niveau mondial. Depuis l'année 2000, 36 pays ont retiré leur reconnaissance à l'Etat fantôme», poursuit-il, avant d'appeler l'UA à la neutralité. «Par sa neutralité retrouvée, elle pourrait, par contre, contribuer d'une manière constructive à l'émergence de cette solution», a-t-il indiqué, en évoquant le processus onusien de résolution de la question. Pourtant, le Maroc est accusé de blocage de ce processus onusien dont une résolution recommande l'organisation d'un référendum d'autodétermination en 1991. Soutien au peuple sahraoui L'appel du Maroc a-t-il des chances d'avoir des échos favorables auprès de l'UA ? Il serait difficile d'arracher la position de neutralité à l'UA vis-à-vis de la question sahraouie. A l'ouverture des travaux du sommet, les dirigeants africains ont observé une minute de silence à la mémoire de Mohamed Abdelaziz, ex-président de la Rasd et SG du Front Polisario. Aussi, la 27e session ordinaire des chefs d'Etat et de gouvernement de l'UA a réitéré son soutien indéfectible pour le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination. «L'UA demeure solidaire avec le peuple sahraoui et réaffirme avec force son droit à l'autodétermination», a déclaré la présidente de la commission de l'UA, Dlamini-Zuma, à l'ouverture du sommet africain. Quant à sa ré-adhésion à l'UA, elle pourrait se faire tout facilement. Le Maroc ne se serait pas aventuré à demander son adhésion avant de s'assurer du soutien de la majorité des pays membres. Avant la tenue du sommet, des messagers du roi se sont rendus dans plusieurs capitales, dont Alger, dans la perspective de ce retour. Pour le roi du Maroc, «le défi qui demeure à relever, pour notre continent, plus d'une décennie après la naissance de l'Union africaine, est celui de l'unité et de la cohésion de notre grande famille». «Par ce retour, le Maroc entend poursuivre son engagement au service de l'Afrique et renforcer son implication dans toutes les questions qui lui tiennent à cœur. Il s'engage, ainsi, à contribuer, de manière constructive, à l'agenda et aux activités de l'UA», a affirmé le souverain. Il estime que le temps est venu d'écarter les manipulations, le financement des séparatismes (est-ce pour cela que le Maroc n'a pas accordé de visa à Ferhat Mehenni ?) et de cesser d'entretenir, en Afrique, des conflits d'un autre âge.