L'Algérie est une terre d'accueil et d'asile par excellence. Et ce n'est pas faire preuve de nombrilisme ou de patriotisme incantatoire que de rappeler cette vérité adossée aux valeurs humaines faites d'altérité et de partage qui ont façonné l'algérien, l'Amazigh, depuis la nuit des temps. Pour avoir été pendant sa longue histoire sujette à des invasions successives, elle mesure mieux les souffrances des peuples autochtones sous le joug des occupants. C'est donc naturellement que l'Algérie était devenue la «Mecque des Révolutionnaires», selon la formule proverbiale d'Amilcar Cabral. D'Afrique et d'ailleurs. Sommes-nous, donc, transformés en racistes violents et n'acceptons pas que notre terre soit «souillée» par des immigrants clandestins qui viennent manger à leur faim ? La rafle, la semaine dernière de près de 1 500 ressortissants de pays subsahariens vers Tamanrasset avant de les reconduire chez eux, a fait très mal. Elle a écorné l'image immaculée d'une Algérie où l'étranger se sent chez lui. Au plan de la communication, la gestion de cette opération fut un désastre. Mine de rien, l'immense capital sympathie dont disposait le pays et qu'il a accumulé des décennies durant, s'est effiloché sur l'autel de l'improvisation et du manque d'anticipation. C'est le genre d'impairs à ne pas commettre. Notre pays, qui faisait rêver des millions d'Africains - comme si nous venions de Mars ! -, à perdu de son clinquant et de son crédit dans cette affaire. Bien sûr qu'elle est louche cette campagne médiatique contre l'Algérie en provenance de l'Hexagone et du Maroc. Qui pourra s'émouvoir de ces larmes de crocodiles versés en France sur le sort des ressortissants africains expulsés d'Algérie, en pensant aux Roms humiliés et martyrisés avant de les renvoyer chez «eux»… ? Faut-il rappeler le drame de Calais où - tiens, tiens - !, des milliers d'Africains et de réfugiés syriens furent brutalement chassés. N'est-ce pas inhumain ça ? N'a-t-on pas justement baptisé médiatiquement ce lieu par le vocable peu glorieux de «jungles» ? Il est bien commode de dénoncer des atteintes aux droits de l'Homme ailleurs et fermer les yeux quand le traitement inhumain des personnes se déroule sous nos yeux. Cette indignation sélective est inacceptable. Le refoulé finit toujours par vous rattraper. à Paris, à Rabat comme à Alger. Le Makhzen a cru avoir trouvé une fenêtre de tir sur l'Algérie en exploitant cette regrettable et maladroite opération de reconduite des clandestins africains effectuée par les autorités algériennes. Le roi a même bombé le torse en ordonnant une mesure de régularisation des sans papiers. Tant mieux dirons-nous et pourvu que cela dure… Mais ce rare moment de «lucidité» humaine va-t-il survivre au-delà de cette propagande circonstancielle contre l'Algérie ? Rien n'est moins sûr. Personne n'est dupe pour oublier les dizaines de Subsahariens, avec femmes et enfants, que les services du «roi du cœur» convoyaient en 2013 depuis les postes frontaliers de Ceuta et Melila, dans des camions avant de les lâcher dans le grand désert marocain… Qui pourra oublier ces voyages au bout de l'enfer où il y a eu des morts, des disparus et des blessés ? Il suffira à nos confrères marocains, les plus zélés, de cliquer sur Google pour rafraîchir leurs mémoires sciemment oublieuses. L'Algérie n'est certainement pas un pays modèle dans le respect des droits de l'Homme. Cela fait mal d'entendre le président de la Commission consultative des droits de l'Homme, Me Farouk Ksentini, accuser les Subsahariens d'être porteurs du sida. Où lire certains articles puant le racisme dans certains de nos journaux. Ceci nous horripile et nous le dénonçons à chaque fois que l'occasion nous est offerte. Mais enfin… L'Algérie n'est pas réductible à ce malheureux acte manqué. On ne peut pas, on ne doit pas faire l'impasse sur l'immense générosité de ce pays qui accueille près de 100 000 réfugiés sahraouis sur son sol depuis près de quarante ans, chassés justement par l'occupant... marocain. On ne peut pas non plus occulter que des dizaines de milliers de réfugiés syriens et palestiniens se sentent quasiment chez eux en Algérie. Ceci confirme, si besoin est, que notre pays est une terre d'asile. Que l'on soupçonne l'Algérien de devenir de plus en plus raciste ou xénophobe, cela peut être vrai. Des manifestations sonores et des comportements physiques laissent penser, en effet, que certains ressorts psychologiques ont lâché… Et c'est dommage.