La décision de renforcer les prérogatives de l'UA et la volon té de cette organisation de prendre sérieusement en charge les questions sécuritaires liées au continent est à encourager. Mais dans les faits, il va falloir créer les conditions idoines pour mettre en œuvre cette ambition continentale. Ce qui n'est pas une mince affaire. Les efforts pour venir à bout d'une crise libyenne qui n'a que trop duré, semblent se multiplier. A Oran, où s'est tenu, trois jours durant, le 4e Séminaire sur la paix et la sécurité en Afrique, des ministres des Affaires étrangères africains et des personnalités importantes ont souligné la nécessité d'intensifier les efforts politiques et diplomatiques pour ramener la paix dans une Libye meurtrie par près de 5 ans d'instabilité et de terrorisme. Le ministre tchadien des Affaires étrangères, et président du Conseil exécutif de l'UA, Moussa Faki Mahamat, a, dans ce cadre, indiqué que l'Afrique «doit jouer un rôle plus important sur la scène internationale», dans la mesure où «l'UA a les moyens de le faire» soulignant par la même occasion que la paix et la sécurité figurent parmi «les priorités des Africains pour la réalisation du développement durable». Un défi de taille et pas de tout repos quand on sait qu'il s'agit là d'un continent où les conflits et devisions en tout genre sont légion. Certes, les mécanismes dune telle ambition existent aujourd'hui et l'Afrique peut, à terme, résoudre elle-même ses conflits. A condition de mettre les moyens mais aussi d'établir une stratégie commune pour tout le continent. Concrètement, et dans le cas de la Libye, l'UA a décidé de réactiver le Comité des chefs d'Etat qui est annoncé pour bientôt en Libye. Mission : tenter de consolider la solution politique de sortie de crise, a annoncé depuis Oran, le président du Conseil exécutif de l'UA. «Le Comité des chefs d'Etat, initié dans le cadre d'un mécanisme de l'Union africaine, compte se rendre prochainement en Libye pour voir les possibilités de réunir les parties libyennes dans le cadre d'une réconciliation nationale», a déclaré Moussa Faki Mahamat à la presse. La décision de renforcer davantage les prérogatives de l'UA et la volonté de cette organisation de prendre sérieusement en charge les questions sécuritaires liées au continent est à saluer et à encourager. Mais dans les faits, il va falloir créer les conditions idoines pour mettre en œuvre cette ambition continentale. Ce qui n'est pas une mince affaire. Une stratégie commune Des puissances mondiales ont déjà un pied ferme en Afrique et les jeux d'influence, parfois par armées interposées, sont monnaie courante. De même que les déséquilibres, en termes de développement économique, de force de persuasion militaire et d'influence diplomatique entre pays africains ne plaident pas, pour le moment, pour une Afrique capable de parler d'une seule voix mais aussi de faire face aux ingérences étrangères. Djallil Lounnas, enseignant en relations internationales ne cache pas ses doutes quant à la capacité de l'UA à jouer un rôle de premier plan dans la résolution des conflits et le maintien de la paix sur le continent noir. «En manque de moyens, l'UA ne pourrait, malheureusement, pas assurer ce genre de mission. En tout cas, pour l'instant rien ne montre que cette organisation puisse avoir un quelconque poids face aux puissances mondiales. La Libye, le Mali, pour ne citer que ces deux exemples, sont quasiment soumis à la volonté stricte de ces puissances alors que l'UA demeure totalement absente de ces deux pays», déplore-t-il. Notre interlocuteur est formel : «Pour pouvoir peser sur l'échiquier, il faut d'abord doter cette organisation de beaucoup de moyens. Il est vrai que les mécanismes existent, mais ils restent très mal gérés pour le moment», soutient encore Djallil Lounnas, qui ne manque pas de rappeler qu'«il faudrait, par ailleurs, dépasser les rivalités et les divisions qui minent le continent noir».