Habitués à réagir très vite sur tout ce qui concerne la Syrie, les Etats-Unis commentent de moins en moins l'actualité syrienne. Alors que de nouvelles négociations sur la Syrie doivent se dérouler à Genève le 23 février, la nouvelle administration américaine garde le silence sur la crise syrienne. Et c'est l'envoyé spécial des Nations unies pour la Syrie qui le fait remarquer. Staffan de Mistura est allé jusqu'à se poser des questions sur l'engagement des Etats-Unis à rechercher une solution politique en Syrie, à quelques jours de la reprise des négociations sur le règlement du conflit à Genève. «Où sont les Etats-Unis ? Je ne peux pas vous le dire, car je n'en sais rien», a-t-il déclaré à propos de l'engagement américain dans la recherche d'une solution politique à la crise syrienne dans le cadre de la Conférence sur la sécurité à Munich. «Je comprends qu'ils ont en tête trois priorités : combattre Daech, limiter l'influence d'un certain acteur régional [l'Iran] et ne pas mettre en danger l'un de leurs principaux alliés dans la région», a reconnu Staffan de Mistura. «Comment résoudre cette quadrature du cercle ? C'est ce qui est en débat à Washington», a ajouté l'émissaire de l'ONU. «Ma question est : voulez-vous combattre ou vaincre Daech définitivement ? Pour vaincre Daech, il faut une solution politique crédible» en Syrie, a-t-il insisté. Jusqu'à présent, l'administration Trump n'a pas donné de signes, ou alors très peu, sur son implication dans les efforts diplomatiques pour tenter de résoudre le conflit qui ravage la Syrie depuis six ans, coûté la vie à plus de 310 000 personnes et jeté des millions de réfugiés sur les routes. L'administration américaine ne s'est pas prononcée non plus sur la solution politique qu'elle envisage, et plus particulièrement sur le sort du président syrien Bachar al-Assad, dont l'opposition réclame le départ, tout comme l'avait fait l'administration Obama. «Nous sommes en train de revoir tout le processus de fond en comble», a répondu l'envoyé spécial américain de la coalition antidjihadiste, Brett Mc Gurk, qui participait aux débats. «Nous serons très égoïstes concernant la protection et la promotion de nos intérêts», a-t-il ajouté. De nouveaux pourparlers intersyriens doivent reprendre le 23 février à Genève sous l'égide de l'ONU, après trois sessions en 2016 qui n'ont permis aucune avancée en raison du fossé immense séparant les belligérants quant à la façon de procéder à une transition politique et sur le sort d'Assad. «Il est temps d'essayer de nouveau», a lancé Staffan de Mistura, rappelant que les conditions avaient changé avec le rapprochement entre Moscou, allié indéfectible de Damas, et Ankara, soutien de l'opposition. Ce rapprochement a permis l'établissement fin décembre d'un cessez-le-feu et d'un processus de négociations au Kazakhstan centré sur le respect de ce cessez-le-feu. A Genève, les discussions porteront sur la résolution 2254 de l'ONU, la feuille de route internationale pour un règlement du conflit, a insisté l'envoyé spécial de l'ONU. Cette feuille de route prévoit «une gouvernance crédible et inclusive, une nouvelle Constitution écrite par les Syriens, et non par des étrangers, et des élections sous la supervision de l'ONU, incluant les réfugiés syriens», a énuméré Staffan de Mistura. «Nous irons à Genève pour discuter d'une solution politique», a déclaré Anas al-Abdeh, chef de la Coalition nationale syrienne, la composante principale de l'opposition, également présent à Munich.