En établissant une nouvelle liste de produits suspendus à l'importation, le gouvernement passe à la vitesse supérieure en la matière. Après l'instauration du système de quotas et de licences, on passe désormais à une nouvelle étape dans la politique de régulation des importations. En effet, le gouvernement vient d'instruire, à travers l'Abef, les banques commerciales et les établissements financiers de surseoir à toute domiciliation d'importation de produits alimentaires ou de préparations alimentaires. Les produits concernés sont les produits de préparations alimentaires (sauce, ketchup, mayonnaise…), les produits alimentaires (biscuiterie, confiserie, chocolat). D'autres produits non alimentaires sont également concernés par la décision. Il s'agit des «équipements industriels tels que les transformateurs électriques, le marbre fini, le granit fini, les produits de plastique finis, les articles de plastique finis pour ménages, les produits de robinetterie, les tapis…» Cette mesure vient confirmer que le gouvernement est préoccupé par la baisse continue des revenus pétroliers, seule ressource en devise du pays, engendrant une chute conséquente des réserves financières constituées durant ces dix dernières années. Malgré l'amélioration des cours du brut en moyenne 45 dollars le baril durant l'année 2017, l'Algérie a enregistré un déficit commercial de près de 4 milliards de dollars (3,9 mds) durant les 5 premiers mois de l'année en cours. La facture des importations, en légère diminution, s'est établie à 19,67 milliards de dollars. Grâce au redressement des cours pétroliers, les exportations des hydrocarbures ont atteint 14,86 mds usd. Les exportations hors hydrocarbures, représentant 5,4% du montant global, ont augmenté à 843 millions usd, en hausse de près de 11%. Ces données incitent le gouvernement à revoir sa politique et à envisager de nouvelles mesures pouvant permettre d'assurer l'équilibre entre les dépenses et les recettes, dans le but de préserver les réserves de change du pays qui ne cessent de chuter, se chiffrant aujourd'hui à 108 milliards de dollars. «Nous traversons une conjoncture financière qui requiert un usage judicieux des ressources et des décisions audacieuses ; nous nous employons à rationaliser les dépenses et réduire les importations sans influer sur le marché intérieur ni le niveau de vie du citoyen», a déclaré Abdelmadjid Tebboune, il y a quelques mois, avant il ne soit nommé premier ministre. Les pouvoirs publics veulent aussi protéger à travers ces mesures l'économie nationale en encourageant les opérateurs à investir dans la production locale. D'ailleurs, le Premier ministre a cité le cas des matériaux de construction, affirmant que le recours aux matériaux de construction locaux a permis d'économiser 1,4 milliard de DA au profit du trésor public. M. Tebboune a toujours assuré que dans les démarches visant à réduire les importations, l'Algérie respectera tous les accords internationaux, mais en défendant les intérêts nationaux, la sécurité et la santé des consommateurs. Les produits de première nécessité (légumes secs, céréales, huile et sucre) ne sont pas pour le moment concernés par le système de quotas et de licences. Respect des accords Le dispositif de régulation des importations a concerné jusque récemment, les véhicules neufs, les fruits, les appareils de téléphonie mobile, les matériaux de construction et l'électroménager. Cette fois-ci, le gouvernement a décidé d'aller jusqu'au bout dans sa politique de régulation des importations et de soutien à la production locale en favorisant les projets de substitution. «Un pays qui enregistre un déficit commercial de 17 milliards de dollars a-t-il le droit de laisser les gens importer du chewing-gum pour 18 millions de dollars par an ?», s'est défendu le Premier ministre. Selon lui, la facture d'importation de produits considérés comme «superflus» s'est élevée à 7,8 milliards de dollars en 2016. Le gouvernement compte réduire la facture des importations à moins de 30 milliards dollars à fin 2017. Parallèlement à ces mesures, le gouvernement s'est attaqué également au dossier de la surfacturation. Des négociations ont été engagées avec l'Union européenne (UE) et la Chine dans le cadre de la lutte contre la surfacturation. Les deux principaux fournisseurs de l'Algérie ont été sollicités à mettre à la disposition des Douanes les données relatives aux valeurs des produits qui sont importés afin de régler le problème de surfacturation. Le comité de négociations avec l'UE est piloté par le ministère des Affaires étrangères. Le phénomène de surfacturation a pris des proportions alarmantes. Les Douanes enregistrent une moyenne de 400 à 500 contentieux par an. Selon certaines sources, la surfacturation représente jusqu'à 25% de la facture des importations. En mettant en place ces dispositifs, le gouvernement devra assainir le commerce extérieur et donner la possibilité à l'économie locale d'émerger.