Depuis l'annonce de la volonté du président Bouteflika à amender la loi sur la monnaie et le crédit et les propositions faites dans ce sens par le nouveau gouvernement, des voix d'experts et d'opposants politiques se sont élevées pour dénoncer le choix de l'éxécutif qui consiste à recourir à la planche à billets pour juguler la crise financière que traverse le pays depuis le début de la chute des prix du pétrole. Très attendu donc sur ce chapitre, même s'il a été également question d'autres volets dans le cadre de la présentation du plan d'action du gouvernement, le Premier ministre Ahmed Ouyahia a profité de sa première «comparution» hier devant les députés pour défendre sa politique économique, et par là même tenter de rassurer l'opinion publique. D'un mal nécessaire, Ouyahia a estimé que le recours au financement non conventionnel s'est imposé dans la conjoncture actuelle comme étant le moindre mal, avant de trouver même un «impact positif direct» à cette procédure, à laquelle ont d'ailleurs recours, rappelle le Premier ministre, des pays ou des groupes de pays comme les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, le Japon ou encore l'Union européenne. Premier argument avancé par le chef de l'exécutif, ces emprunts non conventionnels auprès de la Banque d'Algérie «permettront à l'Etat de continuer de fonctionner normalement sans devoir imposer aux citoyens de nombreux impôts nouveaux». Evoquant les entreprises et leurs créances impayées par l'Etat, Ahmed Ouyahia a expliqué que grâce au recours au financement non conventionnel, les entreprises locales recouvreront leurs créances sur l'administration et pourront ainsi survivre et se développer, «alors que certaines autres PMI sont malheureusement déjà vouées à la disparition». Parallèlement à la poursuite du fonctionnement de l'Etat et au paiement des dettes envers les entreprises, le trésor «financera aussi le remboursement de ses importantes dettes vis-à-vis de la Société nationale des hydrocarbures (Sonatrach) ou des banques publiques engagées dans l'assainissement de Sonelgaz, de sorte que les banques publiques retrouvent des liquidités qu'elles utiliseront pour le financement de l'investissement économique», a détaillé le Premier ministre. Ce financement exceptionnel sera limité à une durée maximale de 5 années, et sera «accompagné de réformes économiques et financières» pour rétablir l'équilibre des finances publiques ainsi que l'équilibre de la balance des paiements, a-t-il insisté. Il ne sera pas cause d'inflation Ainsi, l'Algérie va recourir «temporairement» à ce type de financement pour faire face à une crise financière qui dure depuis plus de trois ans, induite par une grave chute des prix des hydrocarbures, a-t-il encore souligné. Pour répondre à ses détracteurs qui avertissent sur les conséquences néfastes du recours au financement non conventionnel, qui stimule l'inflation, le Premier ministre a méthodiquement indiqué que les fonds qui seront empruntés par le Trésor auprès de la Banque d'Algérie ne seraient pas source d'inflation puisqu'ils seront destinés à financer exclusivement l'investissement public. «Certaines voix ont accueilli l'annonce du recours au financement non conventionnel interne en prédisant au pays une explosion de l'inflation. Le gouvernement tient donc à rassurer la population avec deux arguments», a déclaré Ahmed Ouyahia. «En premier lieu, les fonds qui seront empruntés par le Trésor auprès de la Banque d'Algérie ne sont pas destinés à alimenter la consommation mais bien à financer l'investissement public. Ce qui ne sera donc pas source d'inflation», a-t-il expliqué. «En second lieu, le Trésor fait face actuellement à une dette publique qui ne dépasse pas les 20% du Produit intérieur brut. Il dispose ainsi d'une marge raisonnable d'endettement», a relevé Ouyahia, en observant qu'à titre de comparaison, le pays européen disposant des finances publiques les plus solides a aussi une dette publique proche de 70% du Produit intérieur brut.