La justice algérienne fait sa mue, doucement mais sûrement. Cette institution se replace progressivement dans le sillage de la modernité. Le vaste chantier des réformes, entamé il y a maintenant dix années, commence à porter ses fruits. Une réforme actionnée, rappelle-t-on, sous la bienveillance du président Bouteflika qui fait de l'amendement de la justice l'une de ses priorités, et ce, depuis son accession, en 1999, à la magistrature suprême. Le chef de l'Etat a, en effet, mis en relief la nécessité d'un mode de fonctionnement moderne et plus efficient du système judiciaire algérien via, notamment, la formation des magistrats, la consolidation des infrastructures relevant du secteur de la justice et surtout le perfectionnement de la législation en vue de l'harmoniser avec les mutations socioéconomiques de l'Algérie. Dans ce cadre, quelque 156 nouveaux textes législatifs ont été promulgués depuis 1999 à ce jour, informe Mokhtar Lakhdari, directeur des affaires pénales et des grâces, repris par l'APS. Voulant aller davantage dans les détails, il a tenu à préciser que 41 textes sont à caractère législatif, 13 sont des décrets présidentiels et 58 des décrets exécutifs. mais le renforcement de l'arsenal législatif ne s'arrête pas là. D'autres textes de loi sont actuellement en phase de finalisation. M. Lakhdari n'omettra pas de préciser que la révision du système législatif a pour objectif «d'adapter la législation nationale aux exigences de l'évolution socioéconomique du pays et d'adopter les normes internationales, notamment celles liées aux droits de l'homme en vue de leur adaptation avec les engagements internationaux de notre pays». Libertés et droits fondamentaux : un aspect prioritaire de la réforme La priorité se rapportait, selon lui, au système juridique chargé de l'encadrement des libertés et droits fondamentaux et à l'amélioration du système judiciaire à même de faciliter l'accès à la justice. Il rappellera d'ailleurs qu'il a été procédé à l'amendement des codes pénal, de procédure pénale et de procédure civile ainsi qu'à la loi relative à l'assistance judiciaire. «Les amendements introduits visent, entre autres, à faciliter au citoyen l'accès à la justice à la faveur de mesures simplifiées, claires et à moindre coût. En effet, plusieurs lois ont été promulguées, dont la loi relative à l'organisation judiciaire, au code de procédure civile et administrative et la loi relative à l'assistance judiciaire en vue de garantir l'égalité en matière d'accès à la justice», indique encore M. Lakhdari en mettant l'accent sur l'impératif d'adopter une méthodologie progressive lors de l'amendement de la législation à travers la prise en charge des questions urgentes. D'autre part, dans l'objectif d'accompagner les mutations d'ordre social, il a été procédé, rappelle la même source, à la modification du code de la famille, dans ses dispositions relatives au mariage, au divorce, à la filiation, à la tutelle et à certaines de ses procédures ainsi que le code de la nationalité algérienne par la consécration de la filiation par la mère. Dans le même contexte, un projet de loi relatif à la protection de l'enfant a été élaboré. Ce texte vise à déterminer les aspects de la protection sociale et judiciaire de l'enfant. S'agissant de l'adaptation de la législation à la réalité économique du pays, les codes civil et de commerce ont été modifiés dans le sens du renforcement de la liberté contractuelle et de la protection de la propriété privée en matière de location de locaux à usage d'habitation ou commercial, en prenant en considération uniquement la volonté des parties lors de la détermination des conditions du contrat et la fixation de la durée du bail. Les principales modifications du code civil ont, essentiellement, trait aux règles de conflit des lois, à l'introduction de la signature et de l'écriture électroniques comme moyens de preuve et au bail civil, à l'effet de libérer le marché de la location, notamment en donnant plus de garanties aux propriétaires afin de les inciter à consentir des baux. Assouplissement du cadre juridique commercial La révision du code de commerce a, quant à elle, introduit un assouplissement dans le cadre juridique relatif au bail commercial, en obligeant le locataire à quitter les lieux à l'échéance du contrat, sans mise en demeure ni indemnité d'éviction. En plus, un dispositif préventif a été mis en place pour réduire les cas d'émissions de chèques sans provision. Parmi les questions prioritaires figurent également la protection de la société contre les différentes formes de criminalité, notamment la corruption, la contrebande et le blanchiment d'argent, le trafic et l'usage illicite de stupéfiants et de psychotropes. Dans ce cadre, plusieurs textes législatifs ont été promulgués dont la loi relative à la prévention et à la lutte contre la corruption, la contrebande et la cybercriminalité. Pour ce qui est des amendements successifs introduits au code pénal et procédure pénale, il est question de la responsabilité pénale de la personne morale qui a été consacrée ainsi que l'incrimination de certains faits tels que le harcèlement sexuel, les atteintes aux systèmes de traitement automatisé des données, la traite des personnes, le trafic d'organes et le trafic des migrants. Il a également été question de règles garantissant la présomption d'innocence. La limitation du recours à la détention provisoire, la réparation de l'erreur judiciaire et des lois sur la détention provisoire abusive ont été instaurées.
Extension de certains tribunaux en pôles judiciaires Les tribunaux d'Alger, d'Oran, de Constantine et de Ouargla ont été installés comme pôles judiciaires spécialisés. Il a été décidé également de la mise en place d'un cadre procédural qui permet de lutter contre la grande criminalité notamment en matière d'interception de correspondances, d'enregistrement de paroles et d'images et des infiltrations après autorisation préalable du magistrat compétent. Le travail d'intérêt général comme peine de substitution à la détention a été introduit dans le code pénal. Ces amendements successifs et les nouvelles lois promulguées ont permis la mise en place d'une politique pénale ayant eu comme conséquence la diminution palpable de certaines infractions graves.