Un pauvre jeune fumeur de cannabis croyait ne jamais être pris par les policiers en ronde de routine. Il le croyait si bien qu'à leur vue, il a carrément avalé le joint. Il l'a avalé croyant là aussi que les policiers ne pouvaient plus dégager la preuve de l'estomac. Or les policiers l'ont surpris en train de planer et même comment il s'y était pris pour avaler la drogue. A la barre, réconforté par la présence de son avocate, maître Mana, Mounib R. a tout craché. Et lorsque nous écrivons tout, c'est bien tout. Depuis les regrets jusqu'à l'aveu. résultat des courses : le tribunal lui accorde de larges circonstances demandées expressément par le défenseur qui a pris à témoin le représentant du ministère public de la conduite du détenu. Mounib R., vingt-trois ans pile le jour du procès tenu à Boufarik (cour de Blida), avait fait éclater de rire lorsque son avocate, la très belle maître Chérifa Amel Mana, avait déclaré qu'il avait été pris en flagrant délit de détention de stups alors qu'il n'avait rien en main lors de son interpellation. - «Alors, fumiez-vous ?», avait balancé Nadia Mamèche, la juge du pénal. L'inculpé est en état dépressif. Il hésite puis : - «Oui mais à la vue des policiers, j'ai avalé le joint, j'ai eu une peur bleue, j'ai paniqué. Je l'ai de suite regretté. Au commissariat, les policiers ne m'ont pas laissé le temps de leur expliquer mon état de santé. Ils n'ont pas voulu me laisser reprendre mes esprits et je...» - «C'est bien tout ça», coupe la magistrate qui avait deviné que l'avocate avait un besoin pressant de poser une question, histoire d'interrompre son jeune client qui peut aller au-delà du mur «du son» et s'enfoncer encore plus qu'il ne l'est à l'instant où elle avait voulu demander à intervenir. - «Maître, vous vouliez dire un mot ?», demande Mamèche. L'avocate s'avance élégamment vers son client et dit : «Madame la présidente, lorsqu'il dit : ‘‘Je l'ai regretté de suite'', il a regretté quoi ? D'avoir fumé ou d'avoir avalé le joint ?» Le détenu regarde la juge qui lui demande de répondre, s'il veut bien. Il dit : «J'ai tout regretté. Et lorsque je dis tout, c'est tout. Depuis que j'ai appris à fumer jusqu'à ce mardi, quatrième jour de détention préventive.» Les circonstances atténuantes sont alors vite demandées par le défenseur, maître Mana, qui n'a pas voulu trop abuser du temps du tribunal, tout comme Khaled Kouchim, le procureur de l'audience, qui avait mécaniquement demandé tout de même une lourde peine de prison ferme. Dans ces cas où les jeunes pris en flagrant délit de «sniff», les juges du siège ont le jeu facile car la loi est claire. Mais là où cela devient de la véritable gymnastique, c'est cette histoire de commercialisation et même de détention de drogue, six mots pleins d'équivoque et donc aux contours en dents de scie. Nadia Mamèche a cette fois le gros rôle, celui de décider en fin d'audience, comme si elle voulait vider la prison de Boufarik, ce mardi soir d'automne. Bien tard dans la nuit, l'avocate quitte boufarik avec la satisfaction de voir ce jeune primaire, car c'était la première fois qu'il avait été pris en flagrant délit, rejoindre son foyer, s'en tirant avec une peine de prison assortie du sursis.