Le moindre incident est suffisant pour déclencher des bagarres rangées entre les jeunes des communes de Oued Koreiche et Bab El Oued, en utilisant des armes blanches. Depuis octobre, les deux groupes se sont mesurés à trois reprises, provoquant souvent des dégâts matériels et faisant des blessés dans les deux camps. A la wilaya, les responsables cherchent l'apaisement. Interrogé par la presse le 24 décembre dernier sur l'origine de ces événements, le wali Mohamed Kébir Addou a répondu : «Il s'agit de quelques jeunes animés du sentiment de vengeance pour des raisons que je préfère ne pas citer ici.» C'est au moment où l'équipe nationale de football jouait sa qualification, dimanche soir, aux demi- finales de la Coupe d'Afrique des nations face à la Côte d'Ivoire qu'une bagarre rangée entre des groupes de jeunes a eu lieu dans le quartier Saïd Touati, sur les hauteurs de Bab El Oued. Comme d'habitude, ce sont les jeunes de la Carrière Jaubert de la commune de Oued Koreiche qui se sont mesurés à ceux du quartier Saïd Touati (ex-Bazeta) de Bab El Oued, a appris hier Le Temps d'Algérie auprès de l'APC de Oued Koreiche. La situation serait encore floue pour connaître le mobile exact de cette rixe généralisée. «Chacun raconte sa version. On parle surtout d'un vol de portable», indique un élu. Dans cette partie du centre-ville de la capitale, le moindre incident, vol de portables, insultes, provocation de femmes... est suffisant pour donner lieu à une bagarre où des groupes de jeunes s'opposent à l'aide de couteaux, de sabres ou de barres de fer. «Il y a une mauvaise maîtrise de la situation sécuritaire dans ces quartiers», ajoute l'élu de Oued Koreiche. La situation sécuritaire semble être ingérable, sachant que les deux communes forment ensemble un triangle de misère qui inclus les cités Bazeta, Diar El Kaf et le bidonville Sonatro. La non-prise en charge des besoins de la population ouvre en effet les portes à toutes les dérives possibles. La cité Diar El Kaf (anciennement appelée Carrière Jaubert) baigne dans un incroyable laisser-aller. Le programme de requalification des logements de la cité, initié en 2000, traîne en longueur et fait perdre patience aux résidents. Des familles entières continuent ainsi de vivre dans une seule pièce. En novembre, il est vrai, il y a eu l'évacuation de 289 familles vers de nouvelles cités implantées dans les localités de l'ouest de la capitale. Ce recasement a immédiatement provoqué la colère des occupants du bidonville Sonatro de la même commune qui s'estiment ignorés par les autorités locales. La wilaya prévoit la distribution de 6000 logements, entre février et juin, aux occupants des chalets et des habitations précaires des communes du centre-ville. On ignore pour le moment si les gens de Sonatro sont concernés par cette opération.
Jamais deux sans trois C'est la troisième fois que des rixes pareilles se produisent depuis début octobre 2009. La première fois, c'était dans la nuit du 13 octobre. Le théâtre des événements était le jardin Taleb Abderrahmane (Bab El Oued). Ce jour-là, la situation était telle que le ministère de l'Intérieur a été obligé de réagir. «Deux jeunes se sont bagarrés et la situation a dégénéré dans la nuit, lorsque à 00h30, un groupe de 30 personnes, des mineurs pour la plupart, ont tenté de venger leur ami. Ce qui a provoqué beaucoup de bruit dans le quartier silencieux. Les habitants ont alors commencé à jeter des bouteilles de leurs fenêtres. Les policiers sont intervenus afin de les séparer, et sur leur chemin, les jeunes ont vandalisé 21 voitures», a indiqué le ministère dans un communiqué. La bagarre a opposé les jeunes de Diar El Kaf et du bidonville Sonatro à ceux de Bab El Oued pour une histoire de chawarma. Selon des habitants de Sonatro, qui se sont confiés au Temps d'Algérie, en novembre, un jeune avait pris l'habitude de commander des sandwiches dans une gargote du jardin Taleb Abderrahmane sans payer. Il a été tabassé à cause de cela. Pour se venger, il a ameuté les gens de son quartier qui sont descendus à Bab El Oued et ont semé la pagaille. Ces premiers événements ont été à l'origine de la fermeture de ladite gargote qui était aussi à l'origine du mécontentement du voisinage. Les habitants ont d'ailleurs demandé sa fermeture à minuit au moment où la gargote restait ouverte jusqu'à 3h du matin, regroupant ainsi tous les marginaux rôdant dans les environs. Après les événements du 13 octobre, les jeunes se sont mesurés une deuxième fois à la mi-décembre. Lors d'une nouvelle bagarre générale, il a été enregistré la détérioration de véhicules en stationnement et plusieurs blessés. Les services de police auraient à l'occasion procédé à l'interpellation d'une dizaine de jeunes qui auraient été présentés au procureur de la République pour atteinte à l'ordre public et attroupement illégal. Selon des témoignages, «les jeunes de Diar El Kaf ont procédé à une descente punitive pour venger un des leurs, agressé par les jeunes de Climat de France». «Les jeunes étaient, des deux côtés, armés de sabres, de hachettes et d'autres objets contondants et la violence dont ils ont fait montre a conduit à des dégradations de diverses natures», s'est-on confié au Temps d'Algérie. La wilaya n'a communiqué sur ces événements qu'à l'occasion de la dernière session annuelle ordinaire de l'Assemblée populaire de wilaya organisée le 24 décembre. En marge des travaux de la session, le wali Mohamed Kébir Addou a été interpellé par la presse sur l'origine de ces bagarres et les mesures à prendre pour les endiguer. La réponse de M. Addou était : «Il s'agit de quelques jeunes animés du sentiment de vengeance pour des raisons que je préfère ne pas citer ici.» Lui emboîtant le pas, le secrétaire général de la wilaya, Ould Salah Zitouni, a appelé (la presse) à «ne pas gonfler ce conflit entre bandes de quartiers».