La commune de Douéra s'est dotée, cette semaine, d'un nouveau marché de 225 étals, une capacité loin de répondre à la demande exprimée en la matière(1483 demandes enregistrées par l'APC). Aussitôt «inaugurée», cette infrastructure a été livrée au commerce parallèle. Les vendeurs qui n'ont pas bénéficié de places ont immédiatement occupé le parking et continuent d'exercer leur métier comme ils le font depuis des années.
Chassez le naturel, il revient au galop. L'adage s'applique parfaitement à l'initiative prise par les services de l'APC de Douéra qui ont supprimé un marché informel tout en créant un autre. Les faits : dimanche 11 avril, l'APC annonce l'ouverture d'un nouveau marché au chef-lieu, doté de 225 étals destinés à remplacer l'ancien marché (informel) de la ville qui a été rasé. Un élu, qui s'est exprimé le même jour sur les ondes de la radio El Bahdja, a précisé que les services locaux avaient enregistré en tout 1483 demandes d'étals, tout en invitant les demandeurs mécontents -il y en a beaucoup- à déposer des recours et à réagir dans le calme. Sur le terrain, les services locaux se sont faits piéger par leur propre initiative : le commerce informel est de retour ! Le nouveau marché a été implanté derrière le commissariat de police à l'entrée de la ville à partir de la deuxième rocade sud d'Alger. Lundi matin, soit au deuxième jour de l'inauguration, la nouvelle infrastructure est livrée au commerce parallèle. Des centaines de vendeurs, non autorisés à travailler dans le marché, ont étalé leurs marchandises devant le bloc «poissonnerie» (encore fermé), un lieu destiné en principe à être un parking public. La plupart de ces vendeurs proposent des fruits et légumes et ils attirent l'essentiel de la clientèle. A l'intérieur du marché proprement dit, l'activité est réduite au service minimum. Malgré l'«inauguration» publiquement annoncée, l'infrastructure demeure un chantier. Les gens qui ont bénéficié d'un étal doivent eux-mêmes réaliser les travaux d'installation. Lundi matin, certains s'occupaient à forer dans le goudron afin de poser et fixer leurs étals faits de barres de fer. Le marché inauguré se résume en vérité à une grande placette bitumée. A ce niveau, l'APC a décidé de créer un espace pour effets vestimentaires. Le pavillon des fruits et légumes est aménagé sur le côté gauche de la principale placette, à partir de l'entrée. Ici également, les travaux sont en cours. Les bénéficiaires de carreaux s'affairaient à terminer l'installation. Mais pourquoi le marché n'est pas entré en activité comme annoncé ? Les réponses sont nombreuses. Une fois la liste des bénéficiaires publiée, c'est la colère chez les commerçants du marché anarchique qui a été rasé. Leurs tentatives de prendre langue avec le président de l'APC, au sujet de l'attribution des carreaux, ont été vaines. L'attroupement des vendeurs provoqué ainsi devant le siège de l'APC a fait intervenir la police qui a procédé à des interpellations suite à des rixes ayant opposé les policiers aux vendeurs. «La bagarre était inévitable. Un policier a provoqué un jeune en évoquant sa mère en des termes insultants. Le jeune est devenu rouge de colère, ce qui se comprend. Nous le connaissons tous ici. Sa mère a été égorgée devant lui par des terroristes», témoigne-t-on. S'estimant lésés dans la distribution des étals, les mécontents ont décidé enfin d'occuper le parking du marché et de continuer à exercer leur métier. «Je suis commerçant depuis 15 ans. J'ai toujours travaillé dans l'ancien marché. Aujourd'hui, on vient me priver et priver mes enfants de leurs ressources alors que des étals ont été loués à des gens qui n'ont rien à voir avec le commerce», affirme un vendeur. Dans le parking, les jeunes critiquent sévèrement l'APC, accusée de proposer des étals à des maçons et des gens qui travaillent dans des supérettes de la ville, qui ne sont donc pas dans le besoin. L'occupation du parking a immédiatement gelé l'activité à l'intérieur du marché. L'installation des étals se fait en effet à un rythme très lent. Il y a même des bénéficiaires qui ne sont pas pressés d'y prendre place. «Comment voulez-vous travailler alors que ce sont les vendeurs du parking qui attirent la clientèle», s'interroge-t-on. La plupart des prétendants ont été exclus de l'affectation des étals, officiellement, pour un problème de résidence, souligne-t-on. Ces jeunes ne seraient pas originaires de la commune de Douéra. Les plus mécontents, cependant, ce sont les vendeurs légalement établis dans cette localité, mais qui n'ont pas été touchés par l'opération.