Le gaz algérien présente plusieurs avantages et son exportation vers son marché «naturel», l'Europe, ne sera pas concurrencée mais s'oriente parallèlement vers le marché asiatique, a rassuré, en marge de la 16e conférence internationale sur le gaz naturel liquéfié (GNL 16), Ahmed Fettouhi, directeur de la planification et de la stratégie aval à Sonatrach. Depuis 1977, il a exercé plusieurs fonctions au sein de la société nationale, d'abord au niveau du complexe GNLZ de Bethioua, à Oran, en tant que directeur des approvisionnements et de la mécanique. Il a aussi bénéficié de formations en management et en développement du business pour l'activité aval. Qu'est-ce que le GNL ? Le GNL est le gaz naturel liquéfié. Le procédé de liquéfaction a pour objectif le transport du gaz des lieux de production pour approvisionner les consommateurs. Pratiquement tous les gisements de gaz naturel dans le monde se trouvent dans des pays où il y a un excès de production. Toute la production de gaz naturel ne peut être totalement consommée, donc il fallait trouver un moyen de transport, d'où l'idée de liquéfier ce gaz. Pour liquéfier le gaz naturel, il faut réduire son volume 700 fois pour le transporter à destination des consommateurs. En Algérie, le principal gisement se trouve à Hassi R'mel, il faut le transporter par gazoduc jusqu'à la mer. Ce procédé a été transposé ailleurs à travers le monde car notre pays en est le pionnier. La première usine date de 1964 et se trouve ici qui s'appelle l'ex-Camel, à Arzew, le GL4Z, dont la capacité est de 2 millions de mètres cubes de gaz naturel. Donc toute une machine technologique s'est déclenchée à travers le monde par la construction des méthaniers, il s'agit d'usines-bateaux pour que le gaz naturel liquéfié ne s'évapore pas, il faudra le garder à une température de - 165° Celsius pour qu'il soit réceptionné au niveau de terminaux de regazéification. Comment l'Algérie transfert-elle son gaz vers ses clients ? L'Algérie est le seul pays au monde qui possède l'avantage d'avoir les deux moyens de transport. C'est-à-dire nous pouvons commercialiser du gaz naturel par pipes (gazoducs) ou par liquéfaction, donc par méthaniers. C'est une chance pour nous d'avoir cette flexibilité de commercialiser le gaz naturel par les deux gazoducs existants, le gazoduc Petro Duran Farell (GPDF) et le gazoduc Enrico Mattei (Maghreb-Europe GME), qui vont vers l'Italie et vers l'Espagne et le Portugal pour approvisionner l'Europe, et le projet en cours Medgaz. Les deux autres sont en cours dont l'un va entrer en production au plus tard en 2011, le Medgaz, pour l'exportation vers l'Espagne de 8 milliards m3 de gaz naturel et l'autre projet le Galsi qui est en maturation qui mène vers l'Italie jusqu'à la Sardaigne. En même temps, nous avons des projets de complexes de GNL, le GNL2K (Skikda) d'une capacité de 4,5 millions de tonnes avec le constructeur KBR, prévus pour 2011, et un an après nous réceptionnerons l'autre complexe d'Arzew de 4,7 millions de tonnes de GNL avec la valorisation de l'hélium avec 1,6 million m3 et de l'éthane, pour la production de produits pétrochimiques. Avec ces deux projets, nous allons atteindre 29 millions de tonnes de GNL qui sont équivalents à 63 millions m3. Avec ces deux projets, l'Algérie va maintenir sa position dans le monde en tant que 4e producteur d'autant qu'il y a beaucoup de nouveaux intervenants sur le marché international comme le Yémen à titre d'exemple. Les trois anciens trains qui sont aujourd'hui en production ont été construits en 1974 : le GNL1Z et le GNL2Z sont entrés respectivement en production en 1978 et en 1980. Vu le poids de la Russie en Europe et le Qatar, pensez-vous que l'Algérie maintiendra ses prévisions pour ce marché ? Le marché naturel pour l'Algérie reste l'Europe. Il n'y a pas de problème pour l'Algérie car nous avons des avantages sur ces deux pays dont le principal est le transport dans le bassin méditerranéen car dans le transport du GNL y a l'évaporation (boil off). Il s'agit de pertes. Donc si les Européens ramènent le GNL du Qatar ou de Russie, les pertes seront énormes pour eux. D'Algérie, ces pertes sont minimes. L'Algérie devra trouver d'autres débouchés à son gaz et orienter l'essentiel de ses exportations gazières vers l'Asie ? Il faut savoir que l'autre avantage du gaz algérien est la qualité du gaz. Le coût du processing dans le gaz algérien est plus stable que tous les autres gaz parce que le gaz algérien est propre. Il n'est pas soufré. Cela ne nécessite pas beaucoup d'installation. Il faut savoir que les coûts des installations algériennes sont amortis. Il en est de même pour l'ethno-gazoduc qui ramène le gaz du sud du pays jusqu'au nord en amont de l'activité aval. L'autre avantage est le coût de la main-d'œuvre puisque les personnels d'exploitation de ces installations sont algériens. Cette main-d'œuvre est payée en dinars. Ce qui n'est pas le cas au Qatar et au Yémen. De plus, le partenariat stratégique sur l'énergie avec l'Union européenne (UE) est en discussion, et l'Algérie est un pays fiable en matière de livraison, alors que pour d'autres pays il existe des zones de turbulences au niveau politique. C'est un élément très important pour les contrats à long terme sur le gaz pour les Européens. L'Algérie va donc maintenir les contrats à long terme ? L'énergie est vendue en millions de BTU (unité thermique britannique). Le prix du gaz naturel, qui est une énergie propre, est moins cotée que le pétrole. L'Algérie est en train de militer pour qu'il y ait une indexation juste car même pour le gaz naturel les investissements sont lourds notamment en matière de liquéfaction par rapport au pétrole. Il y a eu consensus autour de tous les pays du FPEG mais simplement il y a aussi des éléments stratégiques pour chaque pays. Donc, pour vous, la concurrence qatarie et yéménite ne menace pas l'Algérie sur le marché gazier ? Non, je ne le pense pas. Le Qatar, avant la construction de nos usines, a signé des contrats à long terme. Ce gaz ne vient pas en surplus sur le marché, il a déjà été vendu. En plus, la demande est en croissance, notamment en Chine et en Inde. Donc, il y aura toujours un marché pour le gaz naturel algérien. Nous avons déjà en commande la construction de méthaniers pour les marchés japonais, chinois, pakistanais et indien car il y a une demande exprimée. Seulement, pour le transport par gazoduc, ce ne sera pas possible car les coûts de construction sont énormes. En tout cas, ce n'est pas envisageable. La part exportable du gaz naturel exportable vers l'Asie avoisine les 20% du total des exportations. Je tiens à rassurer, tous nos produits hydrocarbures trouvent un marché et notre vision est claire dans ce sens. Combien l'Algérie met-elle sur le marché spot et accuse-t-elle de pertes en raison de la chute des prix sur ce marché ? Pour les pertes, les contrats à long terme sont confidentiels car c'est stratégique et sur le marché spot c'est au jour le jour, la semaine ou le mois, donc on ne peut se référer à ces données. Les contrats à long terme avoisinent les 80% des exportations de gaz. Quelle est la consommation globale de gaz en Algérie ? La consommation intérieure de gaz est en augmentation constante cette dernière décennie. Le taux de croissance avoisine les 10% tous produits confondus - produits pétroliers, carburants et électricité - et cela sera valable jusqu'à 2020. La consommation globale est de 230 millions de tonnes équivalent pétrole par an. La grande part est du gaz naturel et 60 milliards de mètres cubes de gaz ont été exportés. De plus, pour l'énergie solaire, l'Algérie est le foyer le plus important. F. M. Bio-express Ahmed Fettouhi, directeur de la planification et de la stratégie aval à Sonatrach, est ingénieur en mécanique sorti de l'université de Bradford et détenteur d'un master en sciences à l'université de Manchester (Royaume-Uni) et enfin d'un master en business administration à Alger en coopération avec l'université de Lille (France).
Depuis 1977, il a exercé plusieurs fonctions au sein de la société nationale, d'abord au niveau du complexe GNLZ de Bethioua, à Oran, en tant que directeur des approvisionnements et de la mécanique. Il a aussi bénéficié de formations en management et en développement du business pour l'activité aval.