Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.
«Les dispositifs d'aide à la création d'entreprises n'ont pas eu d'impact significatif» Boualem Aliouat, professeur à l'université de Nice et directeur de recherche au CNRS :
Une enquête a été réalisée auprès des entrepreneurs algériens membres du Forum des chefs d'entreprise et autres pour déterminer leur profil. Elle est menée par Boualem Aliouat, professeur à l'université Sophia Antipolis de Nice et directeur de recherche au CNRS, qui estime que les dispositifs mis en place par l'Etat sur la création d'entreprises et d'absorption du chômage en Algérie comme l'Andi, l'Ansej , la Cnac, l'Angem et autres n'ont pas eu d'impact sur les entrepreneurs algériens, tout en abordant les autres défaillances du système de financement à la PME. Il s'est exprimé dans cet entretien accordé au Temps d'Algérie en marge du 9e symposium sur l'entrepreneuriat, organisé par MDI Business School. Une enquête a été réalisée en Algérie auprès des entrepreneurs algériens. Quel était son objectif ? L'enquête était adressée essentiellement à des dirigeants d'entreprises du FCE en ligne. Une centaine ont répondu au questionnaire qui a permis de définir le profil de dirigeants de très petites entreprises (TPE), de PME et de grandes entreprises pour établir ensuite des comparaisons avec des profils d'entrepreneurs canadiens, français, belges, italiens et tunisiens. Nous avons une idée claire des attentes et des comportements, ainsi que sur les obstacles que vit au jour le jour l'entrepreneur algérien. Parmi les 100 entrepreneurs, certains ne sont pas membres du FCE qui compte lui 250. Parmi les entreprises ayant répondu, y a-t-il celles du secteur public ? Qu'importe qu'elle soit publique ou privée. C'est le profil de l'entrepreneur qui nous intéresse. Quels sont les résultats obtenus de cette enquête ? Les résultants sont tout à fait surprenants. L'enquête a permis aujourd'hui de distinguer deux profils, celui des très petites et des très grandes entreprises où les entrepreneurs se ressemblent beaucoup et celui des PME où les entrepreneurs sont excessivement fragilisés par le système. Les PME vivent surtout du système bancaire défaillant comme étant un véritable obstacle au développement de l'entreprise alors que les grandes entreprises subissent plus négativement les obstacles juridiques et fiscaux tandis que la TPE vit la défaillance du système d'aide générale avec une véritable carence à la création d'entreprises. En dehors de ces contraintes, nous avons deux ensembles : les TPE et les grandes entreprises avec un profil entrepreneurial homogène et les PME qui sont traitées de manière très spécifique en Algérie. La PME constitue un tissu très important en nombre mais aussi dans son rôle dans la reconstitution de la chaîne des valeurs économiques en Algérie. Les grandes entreprises ont besoin de développer leurs activités mais elles ont aussi besoin de relais. Les PME sont des relais fondamentaux dans tous les pays car la PME est l'élément fondamental de création de valeur et l'innovation comme dans la sous-traitance et la cotraitance dans des secteurs qui ne peuvent pas être exploités par la grande entreprise compte tenu des coups de structure. Dans les résultats de votre enquête, vous avez évoqué la faiblesse des aides de l'Etat à l'entreprise... Cela est caractéristique à l'entrepreneur algérien comparé à son confrère à l'international car toutes les études récentes font part du rôle fondamental de l'Etat dans l'émergence et la création de la société et son développement. Précisément en Algérie, dans la perception des managers, il semble que l'Etat n'ait pas été présent. Que peut-on dire des différents dispositifs mis en place par l'Etat pour la création d'entreprises ? Il faut avoir une analyse en deux temps. Dans le cadre de l'enquête nous avons interrogé des entrepreneurs qui ont créé leur entreprise eux-mêmes (fonds propres). Il est probable que nous relançons l'enquête dans cinq ans peut-être que ce qui a été initié durant les années 2000 a eu un impact. Ces formules existent depuis plus d'un quinquennat. Pensez-vous que durant tout ce temps, nous devrions percevoir les premiers résultats ? Pour toute cette durée, nous pourrons dire clairement que ces dispositifs n'ont pas eu d'impact significatif auprès des entrepreneurs, notamment pour la TPE dont l'âge est de moins de cinq ans. Elles sont concernées par ces mesures mais elles ne les ont pas perçues comme suffisamment incitatives. Le résultat du comité ad hoc installé auprès du Cnes (Conseil national économique et social) fait état de problèmes d'investissement. Pensez-vous que c'est le cas ? Non seulement je le pense mais je l'observe à travers l'étude réalisée. Je dirai même que c'est une catastrophe l'encadrement financier, les supports financiers et le système d'aide financière est d'abord très défaillant pour la TPE qui en a besoin de manière déterminante. C'est aussi une catastrophe pour la PME qui subit de plein fouet ces défaillances tandis que la grande entreprise s'en sort un peu mieux parce qu'elle a des capacités de ressources en interne. Pour la TPE, les systèmes d'aide de l'Etat pourraient compenser les défaillances bancaires ou du marché financier. Mais pour la PME, c'est une catastrophe car elle ne peut compter sur les systèmes d'aide de l'Etat et elle n'a pas suffisamment de ressources pour se développer seule. Qu'en est-il donc du financement à travers le capital investissement et le leasing ? Ce ne sont pas des outils véritablement adaptés à la PME. Propos recueillis par Fella Midjek Bio expressBoualem Aliouat est professeur à l'université Sophia Antipolis de Nice et directeur de recherche au CNRS, spécialisé dans les clusters et les pôles de compétitivité, les parcs d'activités, l'innovation, l'entrepreneuriat et la stratégie d'entreprise. Il est aussi directeur scientifique de MDI Business School. Il est auteur de plusieurs ouvrages sur la stratégie de coopération industrielle et les alliances stratégiques en matière d'entrepreneuriat et aussi dans le domaine des stratégies de l'entreprise. Détenteur d'un doctorat en sciences de gestion obtenu en France à l'université de Lille 2. Enfin, il a une double formation en graduation de juriste et de management.