Les trois ressortissants espagnols qui faisaient partie du convoi humanitaire à destination de Ghaza ont refusé de quitter le centre de détention du port de Beersheba pour être «rapatriés» par les soins du gouvernement israélien vers leur pays d'origine. Pour toute réponse à son choix, l'un d'entre eux lance à une chaîne de télévision internationale : «Si Israël a pu faire ce qu'il nous a fait à nous, Européens, je n'arrive pas à imaginer ce qu'il fait aux Palestiniens.» Ce jeune pacifiste qui avait pris place à bord de la flottille de la liberté à destination de Ghaza savait que l'opération humanitaire comportait quelques risques de «portée limitée» (lui semblait-il au départ) mais jamais de vivre un assaut militaire mené avec telle sauvagerie. Ce n'est pas, en fait, la conduite de l'armée israélienne qui le rassurait, loin de là, mais son passeport européen. En réalité, la question que tout le monde se pose aujourd'hui n'est pas de s'interroger sur le degré de férocité d'une armée qui a fait ses preuves dans la sauvagerie et la barbarie depuis le scandaleux partage de la Palestine, en 1947, et la création de l'Etat hébreu, une année plus tard. Du massacre de Der Yassine en 1948 à l'invasion de Ghaza à la fin 2009, les indices de cette barbarie ne manquent pas. Pour se donner bonne conscience et chercher à se dédouaner des crimes nazis contre les juifs, les pays occidentaux ont créé ce monstre appelé Israël qu'ils ont armé jusqu'aux dents. Pourtant, Israël ne tient toute sa force ni de la dernière génération des Apache américains avec lequel l'unité armée a pris d'assaut la pacifique flottille chargée de médicaments et de vivres pour le million et demi de Palestiniens de Ghaza soumis au plus criminel des blocus depuis 2009, ni même l'arme atomique du Néguev. Cette force, les pays européens l'ont constatée à leurs dépens, cette fois, Israël la tient de leur propre attitude depuis la création de l'entité juive au cœur même du monde arabe, comme une base avancée pour avoir l'Islam à portée de leurs armes. Attitude de complicité d'abord dans la décision de partage de la Palestine historique par le Conseil de sécurité et jusqu'au soutien actif de pays occidentaux, dont les Etats-Unis, la France ou le Royaume-Uni, aux agressions d'Israël contre les Etats arabes de la région décidée à en finir avec le «bellicisme de Nasser», l'allié des «fellagas» algériens. Attitude passive depuis la «guerre de six jours» et l'occupation par Israël de ce qui restait de la Palestine historique avec en plus l'annexion du Sinaï, du Golan puis en 1982 du Sud-Liban. Jamais le Conseil de sécurité des Nations unies ne s'est préoccupé d'obliger Israël à appliquer la résolution 242 sur son retrait aux frontières d'avant 1967 et les centaines d'autres qui suivront. Fallait-il aussi un débat de dix heures pour que le Conseil de sécurité vote la dernière née de cette longue série de résolutions condamnant une agression caractérisée contre des pacifistes arabes, européens et un échantillon de citoyens venus des quatre coins de la planète ? Du papier tout comme les passeports européens dont du carton et rien de plus pour Benjamin Netanyahu qui a trouvé comme argument «la légitime défense contre l'organisation terroriste Hamas» que les Américains et les Européens n'ont pas hésité un instant à classer dans leur liste des «organisations terroristes» qui, en fait, luttent dans l'espoir d'obtenir le droit de pouvoir remettre les pieds chez soi. Comble du paradoxe, c'est à l'agresseur, à Israël, que l'Union européenne dans sa fameuse «position diplomatique commune» a demandé de faire toute la lumière sur cette affaire que les Etats-Unis ont tout simplement «regretté». Un criminel qui enquête sur ses propres crimes. On aura tout vu. Attitude «constructive» enfin - le conflit du Proche-Orient n'arrangeant plus les intérêts occidentaux - destinée à promouvoir le dialogue israélo-palestinien en vue de la création d'un Etat arabe sur ce qui reste de la Palestine historique à laquelle Israël ne croit pas et ne croira jamais. Mais une attitude qui tout comme les deux précédentes encourage à l'arrogance israélienne, à la provocation et au besoin de massacre pour décourager toute solution que celle que veut Israël pour la région. Un encouragement indirect au crime contre l'humanité. Voilà sur quoi Israël fonde sa force de 1948. Sur un constat, un seul qui explique sa capacité à aller, comme il vient de le faire, vers le crime contre l'humanité : l'impunité internationale. Pour Israël et lui seul.