David Cameron, le Premier ministre britannique qui ne comprend pas pourquoi la Turquie n'est toujours pas admise au sein de l'Union européenne, continue de dire tout haut ce que les pays occidentaux, l'Amérique d'Obama en premier, «ruminent» tout bas. Alors que la fuite géante, partie des ordinateurs du Pentagone, est reconnue comme danger potentiel menaçant les opérations en cours et celles à venir en Afghanistan, David Cameron a choisi, lui, de s'attaquer au Pakistan voisin. Le locataire du 10, Downing Street n'ira pas par deux chemins. Les services du renseignement pakistanais entretiendraient des liaisons dangereuses avec la mouvance talibane. Ce n'est ni une invention ni un caprice de Cameron, le lien périlleux en question a circulé sur la toile avant d'être repris par quelques titres de la presse américaine. Le Premier ministre britannique a-t-il fait preuve d'un excès d'audace que Mme Clinton a su contenir via le diplomatiquement correct dont elle a fait usage lors de son dernier voyage à Islamabad ? Publiquement et toujours avec la peur au ventre, quant à la maigre possibilité de voir un jour des armes atomiques aux mains des radicaux islamistes, elle s'était contentée d'inviter la République islamique du Pakistan à redoubler d'efforts dans sa guerre contre les talibans «nationaux». En échange, l'administration Obama ferait son possible pour se procurer des financements alors que le Congrès US se refuse à présent de continuer de jeter de l'argent par les fenêtres du Capitole. Ce qui est certain, le langage de la patronne du Département d'Etat était beaucoup plus soigné que celui de David Cameron qui, de fait, s'impose en tant que porte-parole du bloc occidental qui n'aurait pas fini de douter de la sincérité des Pakistanais en matière de lutte contre les talibans, sa branche afghane réussissant à prolonger la déstabilisation du fragile pouvoir à Kaboul. Se contentant de «relayer» cette information sur les supposés liens entre le renseignement pakistanais et les talibans, la White House vient de demander au site internet de taire le contenu des 90 000 documents en sa possession, David Cameron aurait-il cherché à expliquer à son opinion publique le pourquoi de la déroute actuelle de la coalition sur le front afghan ? De ce point de vue là, la fuite ne peut qu'être bénite pour son gouvernement qui ne sait plus comment et où cacher les cadavres des soldats de Sa Majesté. Sans aller jusqu'à fustiger de la sorte le renseignement pakistanais, les pays engagés en Afghanistan profiteraient-ils en douce des déclarations de Cameron pour habiller un échec collectif face à des opinions publiques occidentales, remontées à bloc contre ce «non-sens militaire» ? Si l'été afghan a été des plus meurtriers depuis 2001, ce ne serait pas la faute du renseignement pakistanais qui, après avoir rejeté ces graves accusations, a annulé la visite d'un haut responsable des services secrets à Londres. Mais les limites d'une stratégie militaire qui, avec ou sans les 30 000 soldats US supplémentaires, auraient de toute façon connu le même sort que réservaient les Afghans à l'envahisseur russe. Ce qui laisse croire que les «coalisés» finiraient par ouvrir grande la voie au projet de réconciliation du «roi» Karzaï. Quitte à réhabiliter les talibans dans leur droit à partager le pouvoir, même si ceux-là n'hésiteront pas à le reprendre sans laisser tomber de miettes ? David Cameron pourrait ne plus être au 10, Downing Street pour nous dire à qui à incomber véritablement la responsabilité de la défaite.