Les autorités libyennes ont procédé hier à l'arrestation de 20 journalistes exerçant dans différents médias de la société Al Ghad, un groupe de presse propriété du fils du dirigeant Mouammar Kadhafi. Ces médias avaient appelé notamment au retour aux affaires d'anciens compagnons du guide de la révolution libyenne. Parmi les 20 journalistes arrêtés par l'organe libyen de sécurité intérieure, on compte trois Tunisiens et deux Egyptiennes. Libyapress, autre média appartenant au groupe Al Ghad, a condamné les arrestations, dénonçant un «acte honteux et scandaleux». Elle a demandé aux autorités sécuritaires de libérer «immédiatement» ses journalistes, dont l'arrestation serait liée à un éditorial publié par le journal hebdomadaire Oéa, appelant au retour au gouvernement d'anciens compagnons du colonel Kadhafi, membres du conseil de la révolution libyenne de 1969, dont Abdelsalem Jalloud, ex-numéro deux du régime libyen, et ce, pour lutter notamment contre la corruption qui mine le pays. Oéa fait partie des médias du groupe Al Ghad, qui comprend également le journal Quryna, Libya Press et la chaîne Al Moutawasset (Méditerranée), qui émet de Londres, ainsi qu'un nombre de sites internet. Il a été suspendu a plusieurs reprises pour ses écrits osés et ses révélations pour le moins inhabituelles pour les lecteurs libyens. En janvier, il avait été retiré des kiosques après avoir annoncé en exclusivité la nomination de Mohamed Zouri, secrétaire du congrès général du peuple (Parlement), avant que l'information ne soit rendue publique officiellement. L'hebdomadaire, qui emploie près de 70 journalistes et techniciens, a réapparu dans les kiosques, depuis le premier juillet, pour ensuite s'attirer les foudres du secrétaire du comité populaire général de la Jamahiriya arabe libyenne, Al Baghdadi Ali Al Mahmoudi, qui a annoncé la suspension de la version papier de cet hebdomadaire gênant, le jeudi 4 novembre, soit le même jour où Seif El Islam était en visite en Algérie. Le retour des membres de la révolution Le journal avait formulé l'espoir dans l'article motif de sa suspension que le colonel Kadhafi fait appel à son compagnon de route Abdessalem Jalloud pour occuper le comité populaire général (chef du gouvernement). L'article incriminé avait également appelé à la nomination du colonel Mustapha Kharoubi au secrétariat du congrès général du peuple (Parlement), du colonel Khouildi Al Hamidi à la tête de l'appareil sécuritaire, et à confier les missions du comité permanent de la défense (ministère de la Défense) à Aboubaker Youness. Selon d'autres sources libyennes, cette campagne à l'encontre d'Al Ghad serait liée à la publication jeudi par Libyapress d'une information selon laquelle un haut dirigeant du mouvement des comités révolutionnaires libyens aurait appelé à empêcher d'anciens opposants vivant à l'étranger d'occuper des postes clé dans l'Etat. Cet appel contraste avec un projet initié par Seif Al Islam, qui dirige depuis quelques années le courant des réformateurs, permettant à des opposants, islamistes pour la plupart, de rentrer en Libye et d'occuper des postes de responsabilité, y compris dans la société Al Ghad. D'après Libyapress, Ahmed Ibrahim, ancien homme fort des années 1980, a tenu une série de réunions pour mobiliser des soutiens en vue de la création d'une «association politique» en Libye s'opposant notamment à ce projet et à l'ouverture économique que connaît le pays.