Les comportements violents à l'égard des femmes n'ont pas beaucoup changé en Algérie. Les mêmes formes de violence constatées en 2007 existent encore et continuent d'être à l'origine de grandes souffrances engendrées aux femmes. C'est le constat établi par Rashida Manjoo, rapporteuse des Nations unies sur les violences contre les femmes. «Le rapport de 2007 a relevé que les femmes souffraient des violences au sein de la famille, de harcèlement sexuel au travail et dans la rue. Les mêmes types de violence m'ont été exposés par les femmes rencontrées lors de mon séjour», a-t-elle précisé. «J'ai également eu des témoignages sur la discrimination, l'injustice et les tentatives de contournement de la loi», a-t-elle ajouté. Mme Rashida Manjoo a appelé l'Algérie à créer un organisme spécifique pour suivre l'évolution de ce phénomène, de lever l'invisibilité qui subsiste et le silence qui domine. Lors d'une conférence de presse tenue hier matin au siège du ministère de la Communication, Rashida Manjoo, rapporteuse spéciale des Nations unies sur la violence contre les femmes, a appelé le gouvernement à instaurer un dialogue et un échange permanent avec la société civile pour parler et débattre des problèmes de violence à l'égard des femmes et tenter de trouver des solutions aux préoccupations posées dans ce domaine par les victimes. «Il faut débattre de ce phénomène car c'est ça le véritable défi qu'il faut relever. Le débat permet de connaître quelle voie choisir et à quelle porte frapper. La loi peut être un outil de protection et de prévention. La démarche multisectorielle peut résoudre le problème», a-t-elle souligné. Rashida Manjoo s'exprimait à l'issue de sa mission «très dense» d'une durée de 10 jours en Algérie et qui lui a permis d'aller dans plusieurs régions et de discuter avec plusieurs parties impliquées dans le phénomène de violence à l'encontre des femmes. «Ma mission consiste à voir les choses sur le terrain. Je suis là pour discuter avec le gouvernement, écouter la société civile et les femmes concernées pour pouvoir élaborer mon rapport», a-t-elle précisé. Absence de statistiques fiables La rapporteuse des Nations unies a relevé le problème de manque de statistiques fiables chez le gouvernement et même au niveau de la société civile. «Je n'étais pas en mesure d'obtenir des chiffres chez les associations que j'ai rencontrées mais il est important de les avoir», a-t-elle ajouté. Par ailleurs, Rashida Manjoo a affirmé que l'Algérie respecte ses engagements internationaux en matière des droits de l'homme et les prend très au sérieux. Elle a précisé que sa mission tient compte du passé douloureux, du contexte social et des blessures subies par les femmes que ce soit durant la période coloniale ou encore la décennie noire. «Bâtir un nouvel Etat passe par le renforcement des institutions et de la cohésion sociales ainsi que la prise en charge des droits de l'homme et de la femme. Le passé est difficile à supporter, il est extrêmement douloureux et très récent mais il doit être confronté», a-t-elle souligné. Elle a relevé les efforts fournis par l'Etat dans le domaine de l'égalité des genres à travers la refonte législative, et la création d'institutions pour la protection de la femme. La rapporteuse spéciale des Nation unies a tenu à souligner que sa mission s'est déroulée dans de bonnes conditions et lui a permis de rencontrer les acteurs de la société civile dans les locaux des associations quand cela a été possible ou à l'hôtel dans le cas contraire. «Nous avons tout fait pour respecter la confidentialité et garantir la sécurité des gens qui nous donnent des informations», a-t-elle précisé. A une question sur les femmes ayant subi des violences à Hassi Messaoud, Rashida Manjoo a affirmé qu'elle n'a pas pu les rencontrer car elles étaient absentes. «J'ai rencontré la société civile et les personnes qui les connaissent. J'ai relevé beaucoup d'informations contradictoires. Je ne peux pas me prononcer sur la question car j'ai besoin d'effectuer plus de recherches», a-t-elle ajouté, en précisant qu'elle n'a pas rencontré les familles des disparus. La rapporteuse de l'ONU a enfin souligné qu'elle remettra son rapport au conseil des droits de l'homme en juin 2011.