Comme prévu, l'Union nationale des transporteurs (Unat) a adopté hier une journée de protestation exprimée par un débrayage qui a duré toute la journée. Certains voyageurs ont été surpris de voir leurs horaires chamboulés, d'autres par contre s'attendaient au pire à l'annonce de la grève. Il est 10 h 30 et l'atmosphère est plutôt calme à la gare routière du Caroubier. Comme à l'accoutumée, des files de voyageurs devant les guichets attendent leur tour pour acheter leur ticket. Une jeune fille s'apprêtant à acheter un billet pour Béjaïa est déçue d'entendre le guichetier lui dire que le bus vers sa destination est complet et qu'il faut attendre le prochain. «Le problème est qu'aucune heure n'est fixée pour l'arrivée du prochain bus», nous dit-elle. Un jeune homme qui semble la connaître s'approche d'elle et lui propose de prendre un taxi. Abordé, ce dernier nous affirme qu'il attend depuis une heure et demie sans qu'aucun bus ne pointe à l'horizon. «Cette grève a perturbé tous nos programmes de la journée», s'exprime-t-il. Le même problème est évoqué par les voyageurs de Bouira et de Tizi Ouzou. Les autres destinations telles que Annaba, Ghardaïa et Chlef n'ont pas connu de perturbations, si ce n'est des horaires chamboulés. «Il y a des bus depuis quatre heures du matin, mais il n'y pas d'heure fixe. Ils arrivent et repartent dès qu'ils sont pleins», témoigne un guichetier de la destination de Ghardaïa. La raison est toute simple, selon le président par intérim de l'Unat, Mohamed Benkahla : les bus ne suffisent pas pour tous les voyageurs, d'autant que ceux-ci boudent les petits bus amenés par la Société d'exploitation de la gare routière d'Alger (Sogral), les comparant aux bus des opérateurs permanents. «La population, en grande majorité, nous a soutenus en boycottant les pseudo bus utilisés par Sogral», a-t-il signalé. 150 bus programmés pour la journée Effectivement, par mesure de précaution, Sogral a assuré le transport en faisant appel à la SNTV et aux privés. «Une vingtaine de bus appartenant à la SNTV et plus d'une cinquantaine appartenant à des opérateurs particuliers assurent les déplacements depuis ce matin, sans oublier la vingtaine de bus mis en attente», affirme Mohamed Maloufi, directeur de l'exploitation de Sogral. «En tout, pas moins de 150 bus ont été programmés pour cette journée. On a pu desservir des destinations à 2850 voyageurs durant la matinée s'étalant de 5 à 9h 30, sachant que l'affluence habituelle est estimée entre 10 000 et 12 000 voyageurs par jour», a-t-il ajouté, précisant que sur les 125 départs prévus pour la journée, 62 ont été assurés durant cette tranche horaire. Une façon de dire que la grève n'a pas pour autant paralysé le trafic. D'autant que nombreux sont les opérateurs qui n'ont pas suivi le mouvement de grève et ont assuré le transport le plus normalement du monde. Par le biais de M. Benkahla, l'Unat n'en dira pas autant, puisqu'elle annonce un taux de suivi de 90%. «Tous les opérateurs ont adhéré, à l'exception d'un ou deux opérateurs assurant la ligne de Tizi Ouzou et un ou deux autres assurant celles des grandes villes», a-t-il estimé. Pourquoi la grève ? Tout revient à une histoire, rappelons-le, d'augmentation du prix de l'accès aux quais d'embarquement et celui de la location des bureaux de liaison infligée aux transporteurs par la Sogral. Le premier est fixé désormais à 290 DA au lieu de 240 DA pour le quart d'heure et revient à 327 DA en incluant les taxes pour un aller. Le deuxième est fixé à 1500 DA/m2, au lieu de 650 DA. N'étant pas satisfaits de cette nouvelle tarification qui remonte à janvier 2010, les transporteurs réagissent, profitant du mouvement de grève pour relever le problème de la taxe. «Avec tous les frais que l'opérateur a, sans parler des charges fiscales et parafiscales, celui-ci doit payer la taxe de la TVA fixée à 7%. En principe, c'est à Sogral de la payer», s'exprime le président de l'Unat, M. Benkehla, ajoutant que Sogral a enfreint la loi, du moment qu'elle a appliqué ces nouveaux tarifs sans aviser les concernés et sans respecter la convention établie par la législation. «Le décret n° 4- 417 relatif à l'article 17 stipule que toute tarification doit être faite en présence des syndicats des transporteurs, des gestionnaires, de la tutelle, notamment les ministères des Transports et du Commerce. A cette question, M. Benkahla nous répond sans hésitation que l'Unat a cherché une entente avec la Sogral sans pouvoir décrocher un entretien autour d'une table avec les responsables. «La grève a été le dernier recours pour exprimer nos revendications». De son côté, la Sogral a démenti. «Il y a eu des dialogues durant ce temps. Les opérateurs, en outre, ont été avisés avant l'application de la nouvelle tarification en janvier 2010, soit en novembre 2009», explique le directeur de l'exploitation de Sogral, Mohamed Maloufi, insistant sur le fait que pas plus tard que dimanche, une réunion entre les deux parties a eu lieu. Dans tous les cas, dialogue ou pas, les voyageurs ont perçu, entre temps, une perturbation, si légère soit-elle, du trafic des bus à la gare du Caroubier. Hier, certains usagers de cette gare ne sont pas arrivés à leur destination à l'heure qu'ils voulaient.