Les nouvelles conditions d'octroi de visas aux opérateurs économiques nationaux imposées par l'ambassade de France à Alger ne sont que la dernière étape d'un processus d'intimidation, d'humiliation et d'ingérence pratiqué depuis plusieurs années. Depuis 2007, les demandeurs de visas pour l'échange de visite dans la cadre de la coopération et l'échange économique étaient contraints de fournir des documents administratifs qui relèvent du domaine de la confidentialité vis-à-vis de l'entreprise et des personnes. Les premières mesures jugées confuses par les opérateurs économiques ont été prises en 2008 où le dossier de demande de visa fut étoffé de nouvelles pièces. Il s'agit de l'exigence d'une attestation de mise à jour à la caisse d'assurance sociale des non salariés (Casnos), le C 20, le certificat d'existence, le bénéfice sur le chiffre d'affaires, l'historique trimestriel du compte commercial en dinars et l'état d'extrait de rôle apuré délivré par les services fiscaux. Les hommes d'affaires avaient dénoncé l'attitude du consulat français en qualifiant ces conditions de «pure ingérence française dans les affaires internes des opérateurs». «Quelle serait la réaction des opérateurs étrangers, français particulièrement, si nos représentations consulaires leur exigeant pareils documents ?», s'interrogent les opérateurs, qui affirment que «même en fournissant tous ces documents, plusieurs cas de refus de visa ont été enregistrés». «C'est une véritable atteinte à l'honneur et à la considération de la personnalité algérienne. Les dernières mesures selon lesquelles l'opérateur présente une déclaration sur l'honneur enfoncent encore le clou et visent à placer le peuple algérien otage des relations politico-économiques», estiment-ils. Outre la déclaration sur l'honneur de ne pas demander un titre de séjour en France, de ne pas bénéficier d'une prestation sociale ou médicale, les opérateurs affirment qu'ils payent les frais de l'assurance voyage avant même d'effectuer le déplacement. «A quoi sert l'exigence d'une assurance voyage dans ce dossier censé couvrir la personne en déplacement ?», se demandent-ils. Ces mesures sont appliquées uniquement aux opérateurs algériens, et les déclarations de la partie française selon lesquelles l'attestation sur l'honneur n'est appliquée que pour les nouveaux commerçants est dénoncé par les opérateurs nationaux : «Le formulaire de l'attestation est remis à tous les opérateurs qui demandent le visa, qu'ils soient répertoriés ou non dans le fichier du consulat.» Visa France : le doute s'installe Pis encore, l'existence même du correspondant de «TLS contact visa France», société privée chargée de l'étude des dossiers de demande de visa, est remise en cause par les opérateurs. Lors de sa création, cet organisme a été considéré comme une annexe de l'ambassade de France, mais cela a vite pris la tournure d'agence commerciale qui emploie plusieurs personnes de différentes nationalités. «L'existence de ce bureau est-elle conforme à la réglementation algérienne en la matière ? A-t-il un bilan ? A-t-il le droit d'exercer sur le territoire national sans rendre de comptes à nos autorités ?» Ce sont autant d'interrogations que l'on se pose depuis les dernières révélations. Pour chaque dossier de visa, le demandeur paye 8500 dinars, qui plus est non remboursables en cas de refus. 2500 DA reviennent à TLS contact visa France pour le traitement du dossier. Le bureau reçoit des centaines de demandes quotidiennes, ce qui représente des sommes faramineuses en fin de compte. Plus qu'un bureau de contact, c'est une véritable usine à sous. Le bureau ne paye aucun centime au Trésor algérien (TVA). Pour preuve, il délivre un reçu au demandeur où sont mentionnées toutes les informations sur la procédure, mais aucun timbre fiscal n'est apposé ni une mention sur le montant de la TVA perçue sur ce reçu. Ce type de bureau n'existe qu'en Algérie. Ailleurs, ce sont les agences de billetterie voyage qui s'occupent de toutes les formalités d'obtention de visa. L'opérateur se contente juste d'en faire la commande et ces agences ont toute la latitude d'agir auprès des services consulaires, notamment lorsqu'il s'agit des relations de coopération économique. Pendant de longues années, la mention «refus» a été estampillée sur le passeport du demandeur. Un procédé déloyal qui vient d'être dénoncé officiellement par les pouvoirs publics par le biais du ministre des Affaires étrangères qui interdit de tels agissements. En dépit des recommandations de l'Union européenne sur la facilitation d'octroi de visas dans le cadre de l'accord de libre-échange, basée sur le principe de la liberté de circulation des biens et des personnes à travers la simplification de la procédure et le raccourcissement des délais de traitement, le bureau continue de refuser les visas sans en exprimer le motif alors que la transparence n'a jamais été de mise dans la procédure de recours. Toutes ces pratiques contredisent le principe de libre circulation des biens et des personnes prôné par les pays de la rive nord de la Méditerranée. Les autorités nationales sont invitées à se prononcer sur ces méthodes qui portent atteinte à la souveraineté du pays. L'application du principe de réciprocité est vivement recommandée.