L'armée en action, couvre-feu décrété Le président Hosni Moubarak, en sa qualité de chef de armées, a décrété un couvre-feu de 18h à 7h au Caire, à Alexandrie et à Suez, les principaux lieux d'affrontements entre les manifestants et la police. Des véhicules de l'armée égyptienne ont fait leur apparition dans des rues du Caire, où les forces de l'ordre affrontent des milliers de manifestants antigouvernementaux. Le président Moubarak a demandé à l'armée de faire respecter la sécurité avec la police et appliquer le couvre-feu. El Baradei assigné à résidence Le lauréat du prix Nobel de la paix, Mohamed El Baradei, est assigné à résidence, selon des responsables égyptiens de la sécurité. Des policiers stationnant devant sa maison dans la banlieue du Caire lui ont dit qu'il ne pouvait quitter son domicile. Un peu plus tôt, il avait participé à une manifestation réunissant des milliers de personnes dans la capitale. Mohamed El Baradei a regagné l'Egypte jeudi soir après avoir passé un mois à l'étranger. Il s'est dit prêt à diriger une éventuelle transition démocratique. Des milliers de Jordaniens manifestent Des milliers de personnes sont sorties manifester hier à Amman après la prière, pour protester contre la vie chère et la politique économique du gouvernement, avec l'Egypte et la Tunisie en toile de fond. Des slogans antigouvernement et anti-Moubarak ont été scandés par les manifestants en brandissant des drapeaux jordaniens et de leurs partis. «A bas le gouvernement Rifaï» (le Premier ministre jordanien Samir Rifaï), «Nous voulons un gouvernement de salut national», «Pas d'alternative aux réformes politiques», «Ensemble pour des réformes politiques et économiques», est-il écrit sur les banderoles. Des partis politiques de gauche et des syndicats professionnels participaient au défilé, encadrés par un important dispositif policier. Des manifestations ont eu lieu également à Irbid (bord), Karak, Ma'an et Diban (sud), avec une première estimation totale de «près de 2000 personnes». Ces manifestations contre la vie chère sont les troisièmes dans le royaume, depuis la chute du président tunisien Zine El Abidine Ben Ali. Comme la semaine dernière, la police a distribué de l'eau et des jus de fruits aux manifestants, avant le début de leur marche. Le gouvernement a annoncé le déblocage de près de 500 millions de dollars pour augmenter les salaires des fonctionnaires et des retraités civils et militaires, favoriser la création d'emplois et faire baisser les prix. Des manifestants devant l'ambassade d'Egypte à Tunis Une cinquantaine de personnes se sont rassemblées vendredi devant l'ambassade d'Egypte à Tunis pour réclamer le départ du président égyptien Hosni Moubarak en signe de solidarité avec les manifestants en Egypte. «On veut dire que les Tunisiens sont avec les Egyptiens. Ils souffrent comme nous avons souffert, il est temps que ça change», dit Monia Mechri, une employée venue manifester. Silence du président Moubarak Contrairement au président tunisien Zine El Abidine Ben Ali, qui s'était adressé à son peuple lors des premiers jours d'émeutes, le président égyptien Moubarak s'est illustré par son silence depuis le début des manifestations qui ont fait huit morts et des dizaines de blessés à leur quatrième jour. La presse gouvernementale assurait simplement hier que le Président «suivait la situation» et avait téléphoné au gouverneur de Suez, où ont eu lieu de très violents accrochages, sans plus de détails. Elle faisait aussi état d'un appel téléphonique du dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, qui lui a exprimé sa «confiance dans la stabilité de l'Egypte». Ce dernier avait apporté son soutien au président déchu de Tunisie, Ben Ali, juste après sa fuite. Moubarak est attendu aujourd'hui pour l'ouverture du Salon annuel du livre du Caire, où il pourrait répondre à des questions sans pour autant prononcer de discours. Le siège du gouvernorat d'Alexandrie incendié Des manifestants ont incendié hier le siège du gouvernorat d'Alexandrie, dans le centre de la deuxième ville d'Egypte, selon des correspondants de presse sur place, au quatrième jour de manifestations antigouvernementales sans précédent à travers le pays. Des colonnes de fumée s'élevaient du bâtiment en flammes après des accrochages entre policiers et manifestants, alors que plusieurs manifestants ont forcé l'entrée de l'enceinte d'un commissariat d'un autre quartier du centre-ville. Réactions La haute représentante de l'Union européenne pour la politique extérieure, Catherine Ashton, a demandé jeudi aux autorités égyptiennes de «protéger» le droit de leurs citoyens à manifester pacifiquement pour défendre leurs droits politiques, sociaux et économiques. «La liberté d'expression et le droit de se réunir pacifiquement sont des droits fondamentaux de tout être humain. J'appelle les autorités égyptiennes à pleinement respecter et protéger les droits de leurs citoyens à exprimer leurs aspirations politiques au moyen de manifestations pacifiques», a dit Mme Ashton dans un communiqué. Les Etats-Unis appellent à la retenue dans les violences qui secouent l'Egypte. Le président des Etats-Unis, Barack Obama, a affirmé jeudi que la violence n'était «pas une solution aux problèmes en Egypte». Tout en qualifiant le président Moubarak de «partenaire important», la Maison-Blanche a affirmé à plusieurs reprises ne pas prendre parti. L'Exécutif américain a également appelé le gouvernement et les manifestants à faire preuve de retenue alors que huit personnes sont décédées depuis le début du mouvement de protestation, mardi. Allié de longue date des Etats-Unis, le raïs égyptien incarne un régime qui est parvenu à contenir les islamistes, avec une forte répression à l'encontre des Frères musulmans, et joue un rôle clef dans le conflit israélo-arabe. L'ONU s'est déjà prononcée, en appelant le gouvernement égyptien à écouter les demandes du peuple. Côté français, Paris réclame le respect de la liberté d'expression.