La ville de Aïn Benian était paisible en cette matinée de samedi. Aucun signe de perturbation n'était perceptible. Les gens sont sortis faire leurs achats, en ce deuxième jour de week-end. Les cafés étaient bondés de monde. Le seul changement inhabituel était la présence importante de policiers dans les grandes rues de la commune. Vers 9h, les véhicules de police faisaient des rotations, alors que le dispositif des éléments des brigades antiémeutes était déjà en place. Des habitants qui étaient informés la veille de la tenue d'une marche n'ont pas boudé les ruelles et autres endroits de la localité. Ils vaquaient à leurs tâches quotidiennes sans être inquiétés par la marche initiée par la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD). Après l'arrivée de Belaïd Abrika, représentant du mouvement des arouch, Nourredine Aït Hamouda, député du RCD, vient rejoindre un groupe de manifestants composé d'une dizaine de personnes. Ils ont décidé d'entamer la marche de l'ancienne ruelle de la commune avec deux banderoles à la main sur lesquelles ont pouvait lire «Système bara», «Yaskout anidam». Mais les manifestants n'ont pas pu faire un pas. Ils étaient empêchés par les brigades antiémeutes, qui les ont immobilisés. Sur place, encerclés par les policiers et entourés par des représentants des médias, les manifestants scandaient : «Y en a marre du pouvoir», «Massira silmiya», «Djazaïr houra démocratia». Le groupe s'est dispersé et il ne restait que deux personnes qui se sont assises par terre et continuaient à crier «Massira silmia», «Pouvoir assassin». De l'autre côté de la rue principale de Aïn Benian, plusieurs centaines de personnes étaient debout à regarder la scène. Il s'agissait plutôt de curieux. «Vive Bouteflika, rentrer chez vous. Vous n'allez rien faire», cria un des passants, qui a pu s'approcher du dispositif sans difficulté. Par ailleurs, un groupe de manifestants a réussi à échapper au dispositif de sécurité. A l'autre bout de la rue, ils se sont mis à critiquer des ministres du gouvernement en les traitant d'«incapables et de médiocres». Cela a duré jusqu'à midi. Les échanges de propos entre un groupe de manifestants et de jeunes curieux ont fini par évoquer des revendications socioprofessionnelles. «On veut un logement et un travail. La mauvaise gestion a privé les jeunes de leurs droits et les promesses faites ne sont qu'une tentative de manipulation», ont-ils constaté. Les jeunes étaient attentifs et ont partagé leurs avis sans heurts. Les manifestants se sont dispersés vers 12h30.