Désormais, c'est officiel. Une mission de l'ONU va se rendre en Libye pour enquêter sur les allégations de violences commises par les forces de Kadhafi et par les opposants qui ne parviennent toujours pas à renverser le dirigeant libyen. Cette commission d'enquête indépendante est composée de trois membres et dirigée par Cherif Bassiouni, expert dans les crimes de guerre. Les deux autres experts nommés par l'ONU sont la juriste jordanienne Asma Khader et le Canadien Philippe Kirsch, ancien juge de la Cour pénale internationale (CPI). Les experts devraient décoller dès demain de Genève et revenir d'ici la fin du mois. Sur le terrain des combats, les opposants contrôlaient toujours, hier, la ville d'Adjedabia, au lendemain de la fuite de milliers de civils et d'opposants à la suite de rumeurs sur une attaque imminente des troupes de Mouammar Kadhafi. D'après les opposants, la ligne de front se situe toujours quelque part entre Adjedabia et le site pétrolier de Brega, environ 80 km plus à l'Ouest où les deux camps se neutralisent. Ce qui va conduire inévitablement vers un immobilisme militaire, la guerre s'annonce déjà longue ? Quoi qu'il en soit, l'Otan a réfuté, hier, l'idée qu'il y ait une «impasse» en Libye, qu'elle soit politique ou militaire, au lendemain des déclarations d'un haut gradé américain. «Bien au contraire, la communauté internationale avance pour trouver une solution politique», a déclaré à la presse la porte-parole de l'Otan, Oana Lungescu. «Nous savons qu'il ne peut y avoir de solution purement militaire», a-t-elle ajouté, rappelant la tenue d'une réunion du groupe de contact sur la Libye la semaine prochaine au Qatar, avec la participation du secrétaire général de l'Alliance atlantique, Anders Fogh Rasmussen. D'autant que l'armée du colonel Kadhafi disposerait encore de quelque 70% de ses moyens et utiliserait de plus en plus fréquemment des boucliers humains. Elle dissimulerait aussi son matériel lourd dans des zones habitées afin d'empêcher les frappes de la coalition. Ce schéma complexe s'est encore traduit sur le terrain. Hier, l'Otan a reconnu avoir commis une «bavure» survenue la veille à Brega et au cours de laquelle au moins cinq opposants ont été tués. Le contre-amiral Russell Harding, vice-commandant de l'opération de l'Otan, a précisé que l'Alliance ignorait jusqu'à présent que l'opposition disposait de chars. M. Harding a précisé que l'organisation ne s'excuserait pas pour ces victimes avant d'ajouter que les appareils de l'Otan avait effectué 318 sorties et visé 23 cibles au cours des dernières 48 heures. Le manque de communication entre les coalisés et les opposants et la désorganisation au sol de ces derniers, imposeront-ils l'option politique de fait ? Alors que la suite de la mission de l'Otan sera évoquée successivement à Luxembourg, à Doha et à Berlin dans les prochains jours, les thèmes de l'éventuel envoi de troupes au sol, de la formation des rebelles et de l'acheminement de matériel humanitaire seront débattus -, la Turquie continue d'élaborer un plan pour mettre un terme à la guerre en Libye par le biais d'un cessez-le-feu et d'un retrait des forces de Mouammar Kadhafi de certaines villes. Il sera également question de demander la mise en place d'espaces humanitaires sûrs pour apporter de l'aide au peuple libyen. Ankara a aussi demandé le lancement immédiat d'un processus politique pour satisfaire aux revendications du peuple libyen, avec pour objectif des «élections libres». Cette transition se fera-t-elle avec ou sans Kadhafi, la question sur son départ ou sur son exil ne se posant pas avec acuité comme au début du conflit ?