Tassadit Yacine, professeur en anthropologie, a souhaité jeudi, à Alger, la réhabilitation du "nationaliste et combattant de la cause algérienne", Jean El Mouhouv Amrouche, le poète algérien marginalisé et "oublié des siens". Dans une conférence sur le poète "déchu", donnée en marge du 16è Sila (Salon international du livre d'Alger), Mme Yacine, soutenue par nombre d'intellectuels venus assister à la rencontre a appelé les autorités publiques à "sortir de l'oubli" cette figure emblématique de l'identité et de la culture algériennes. Cette spécialiste de Monde berbère, enseignante-chercheur et maître de conférences à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) de France, a su retracer succinctement la vie de l'intellectuel algérien "qui a servi, en tant qu'intellectuel le mouvement national dès 1945". L'universitaire algérienne espère voir cet intellectuel-résistant réhabilité, à l'occasion du cinquantenaire de l'indépendance, "comme beaucoup d'autres oubliés", parmi toutes les personnalités nationales que l'histoire contemporaine algérienne n'a pas honorées. L'oratrice qui dirige également la revue d'études berbères "Awal" (La parole), co-fondée en 1985 à Paris avec Mouloud Mammeri et le soutien du sociologue Pierre Bourdieu, appelle tout ceux qui souhaitent écrire l'histoire de l'Algérie sans en exclure aucun de ses enfants quelque soit leur croyance ou obédience à appuyer la démarche qui consiste les "sortir de l'ombre". Jean El-Mouhouv Amrouche, est né le 6 février 1906 à Ighil Ali en Kabylie en Algérie et décédé à l'âge de 56 ans, la veille de l'annonce officielle de l'indépendance de l'Algérie. Après de brillantes études secondaires, El Mouhouv Amrouche entre à l'école normale de Saint-Cloud (France), avant d'embrasser l'enseignement où il est nommé professeur de Lettres françaises dans les lycées de Sousse (Tunisie). Ses premiers poèmes sont publiés poèmes en 1934 et 1937. Pendant la Seconde Guerre, il rencontre l'écrivain français André Gide à Tunis avec qui il se lie d'amitié. Après avoir été licencié de Radio France par le Premier ministre de l'époque, alors qu'il sert d'intermédiaire entre les instances du Front de libération nationale algérien et le général de Gaulle dont il est un interlocuteur privilégié, Jean Amrouche entre à radio suisse romande où il ne cesse de porter la voix de la l'Algérie indépendante. Une part de l'œuvre du poète encore non publiée se découvre progressivement, grâce aux recherches des universitaires, révélant un poète de portée universelle. En exprimant en français les Chants de sa Kabylie natale, il en fait un trésor de la poésie algérienne et universelle, a souligné Mme Yacine en conclusion de sa conférence.