Oran a sacrifié dans la joie son mouton. La ville s'est réveillée très vite le matin pour partir à la quête d'une baguette de pain avant de revenir très vite à la mosquée pour la prière de l'Aïd et repartir, une fois le rite des vœux ccompli, à la maison pour la cérémonie du sacrifice. La ville a observé une halte pour permettre aux Oranais de s'improviser boucher. Les magasins ont baissé rideau et les derniers bêlements des fiers béliers s'entendaient aux quatre coins des cités. L'UGCAA, qui avait assuré que 200 boulangeries allaient assurer une permanence a été prise à défaut par les vieux réflexes de certains boulangers qui ont libéré leurs personnels pour ne livrer que quelques fournées bien avant la prière de l'Aïd. Trouver une baguette dans tout Oran l'après-midi relevait du miracle, notamment dans certains quartiers du centre-ville. «Tout est fermé, pour trouver un commerce ouvert il fallait s'y rendre le soir après la prière d'E-assar», dira un Oranais qui avait assuré que les seuls magasins ouverts étaient les boucheries qui attendaient les carcasses des moutons pour la grande découpe. «Un boucher vous découpe une carcasse en deux et trois mouvements. Il a la main et il connaît son métier. Les prix exigés pour une découpe varient de 600 à 800 dinars. Les bouchers ont fait de bonnes affaires hier. Je connais un boucher d'Es-Sedikkia qui a découpé pour la seule journée d'hier 32 moutons. A raison de 700 dinars, faites vos comptes, c'est un bénéfice net qu'il ne réalise pas peut-être durant les autres journées de l'année», fera remarquer un autre Oranais. Le transport manque toujours Les transporteurs ont pris, depuis des années, la fâcheuse manie de déserter leurs lignes d'affectation pour desservir Aïn El-Beïda et le cimetière. « D'habitude, les habitants de cette localité éprouvent mille et une difficultés pour trouver un bus et avec l'Aïd et les visites au cimetière, le nombre de bus qui desservent cette ligne est multiplié par 10», dira un habitant de cette cité, située à la sortie sud-ouest de la ville. Trouver un moyen de transport était, hier, un exercice perdu d'avance au grand bonheur des taxis clandestins qui ont fait de bonnes recettes en gonflant leurs tarifs. Des transporteurs des lignes B et 31 ont trouvé un malin plaisir à fixer l'itinéraire à leur guise. Mais tous ces aléas n'ont pas empêché Oran de vivre un Aïd dans la joie et dans la piété. Les enfants ont revêtu leurs beaux habits, ont sacrifié le mouton et allumé le feu pour des grillades jusqu'à très tard le soir. On s'est gavés de viande sans crier gare. On a effleuré l'indigestion mais on a mangé, mangé jusqu'à n'en plus pouvoir. Hier, une odeur de viande grillée enveloppait la ville qu'éclairaient de pâles rayons de soleil, qui se disputaient le ciel avec des cumulonimbus que le vent poussait vers le Sud. Oran a vécu la fête comme à son habitude. Elle a vibré de joie et surtout vécu les pénuries occasionnelles de pain et de transport qui meublent chaque fête depuis des années. Heureusement que dans cette ambiance, les services vétérinaires des abattoirs et ceux des urgences du CHUO ont rempli comme il se doit leur mission durant cet Aïd.