Les bruits qui avaient circulé au cours de la semaine dernière sur un éventuel changement à la tête du plus grand groupe public, la Sonatrach, se sont confirmés jeudi. Le P-DG Noredine Cherouati, en poste depuis mai 2010, a été en effet remercié sans explications. A sa place, le ministre de l'Energie et des mines Youcef Yousfi a installé le même jour Abdelhamid Zerguine, un enfant de la boîte. Avant cette promotion, M. Zerguine, 61 ans, assurait la présidence de Samco, une filiale de Sonatrach et de l'italien ENI, chargée de la commercialisation du gaz et siégeant en Suisse. Ingénieur de formation de l'Institut algérien de pétrole (IAP) en 1976, il a occupé plusieurs postes de responsabilité dans le secteur. Il était notamment DG de l'entreprise de génie civil et du bâtiment (ENGCB), vice-président de Sonatrach chargé de l'activité transport des hydrocarbures (TRC) et directeur exécutif chargé des activités internationales de la compagnie. «Je tiens à rendre un hommage appuyé à M. Cherouati pour les efforts inlassables qu'ils a déployés depuis qu'il a pris ses fonctions dans des conditions difficiles. Il a réussi à fédérer les énergies et à rétablir la confiance à une entreprise qui doutait d'elle-même», a déclaré M. Yousfi, cité par l'APS, peu avant la passation des consignes. «Nous avons appris à travailler ensemble, même si moi-même je ne suis pas de composition facile et agréable», a reconnu le ministre en s'adressant au cours de la cérémonie à M. Cherouati. Selon lui, le groupe a besoin de fédérer les efforts de tous ses acteurs pour atteindre ses objectifs de développement. «C'est de notre capacité à travailler ensemble, à rassembler nos forces, à unir nos efforts, dont dépendra notre succès. Nous ne pouvons réussir si nous ne travaillons pas ensemble et si nous ne réunissons pas nos compétences», a-t-il estimé. Lors de cette prise de parole, M. Yousfi a aussi souligné que le secteur de l'énergie et des mines s'était fixé six priorités à réaliser par le premier groupe énergétique africain. Il s'agit, selon lui, entre autres d'augmenter les réserves des hydrocarbures de l'Algérie, de construire une industrie pétrochimique de haut niveau, de renforcer les capacités de Sonatrach dans le domaine des services pétroliers, de développer les techniques de production et de commercialisation des hydrocarbures et d'améliorer de manière permanente la gestion interne. «C'est une entreprise dynamique, moderne, sûre d'elle-même qu'il convient de renforcer pour servir avec plus d'efficacité les intérêts nationaux», a-t-il résumé. Les priorités du nouveau P-DG Le nouveau P-DG a indiqué de son côté que sa nomination «arrivait à un moment particulier de la vie de l'entreprise», en notant que les objectifs fixés par l'actionnaire de Sonatrach (l'Etat) «étaient ambitieux, pour ne pas dire colossaux, et allaient du développement des réserves à la création de valeur ajoutée sur toute la chaîne des segments de l'activité». Dans un entretien à l'APS, M. Zerguine s'est exprimé sur plusieurs questions. S'agissant d'abord de sa nomination, il déclare : «Je viens d'être installé à la tête du groupe Sonatrach, c'est à la fois un honneur et une lourde responsabilité. A vrai dire, je connais le groupe puisque je ne l'ai jamais quitté, où j'ai exercé des fonctions de cadre dirigeant depuis 1990. J'ai participé à l'élaboration de toutes les stratégies du groupe, comme j'étais acteur à part entière de toute l'organisation qui a été faite depuis.» L'ancien vice-président de Sonatrach n'a pas l'intention de chambouler les plans de développement déjà arrêtés. «Les axes de travail sont définis de tradition dans le plan à moyen terme de l'entreprise, arrêté par l'assemblée générale et l'actionnaire unique, incarné par le ministre de l'Energie et des Mines. Les priorités fixées à ce propos consistent à soutenir l'effort de recherche et d'exploration pour conforter les réserves des hydrocarbures, augmenter la valeur ajoutée de tous les segments et les démembrements de la société, et travailler pour faire une meilleure intégration des projets énergétiques par les moyens nationaux. Ces priorités visent aussi à moderniser le groupe dans tous ses démembrements, notamment dans les domaines de gestion de ressources humaines, d'audit et d'éthique», affirme-t-il. Dans quelle situation se trouve la société après «le scandale financier» de 2009 qui a quelque peu terni son image de marque ? «Le groupe, fort de sa direction d'audit créée depuis quelques années, connaît aujourd'hui une évolution significative en termes d'organisation. Les procédures (d'attribution de marchés) ont été revues et amendées, conformément aux orientations des pouvoirs publics pour en faire pratiquement une similitude avec le code des marchés publics. Les audits se font actuellement sur la base de ces procédures. Nous considérons actuellement que la Sonatrach a un degré de surveillance de son activité assez élaboré», répond le nouveau patron de la boîte. M. Zerguine récuse le terme de «scandales» employé pour qualifier les faits qui ont secoué l'entreprise. Il préfère parler plutôt de «soubresauts». «Je reprends les déclarations de mes prédécesseurs qui avaient déclaré solennellement que Sonatrach n'a pas été ébranlée par ce que vous appelez (la presse) des scandales. Sonatrach est bien plus forte, c'est un groupe qui compte 160 000 travailleurs et qui regroupe 100 sociétés et filiales. C'est malheureux, ces soubresauts concernent uniquement la gestion de quelques dirigeants. Le groupe n'a jamais été affecté, je rejette donc cette affirmation, en témoignent les résultats obtenus même durant cette période (de crise) qui sont honorables par rapport aux objectifs fixés», explique-t-il. Concernant les projets du groupe à l'étranger, l'Etat ne l'a autorité à investir que dans l'exploration. «Nous aurons peut-être à faire évoluer cet aspect des choses en proposant le développement des projets en aval, intégrés à des projets en amont», déclare-t-il.