Invité de l'émission «Nikat tahta el midjhar» de la chaîne I de la Radio nationale, Sid Ahmed Ghozali, ex-Premier ministre, actuellement à la tête du parti Front démocratique (FD) dont le dossier d'agrément est sur la table du ministre de l'Intérieur, accuse le pouvoir algérien et des partis politiques de faire de la mouvance islamiste un objet de chantage politique. «Ces derniers temps, nous entendons des discours alarmants et alarmistes : le peuple est appelé à choisir entre le mauvais et le moins mauvais ; soit nous, soit les islamistes». Un choix qui s'apparente, selon lui, à une «fraude anticipée» aux prochaines élections. Pour sa part, Ghozali fait la différence entre «une sensibilité islamiste qui croit au rôle de la religion dans la politique et un autre courant, extrémiste, usant de la violence au nom de l'islam». Sans équivoque, il ne voit aucun inconvénient à une victoire du premier courant, à condition de tenir un scrutin libre et transparent. À l'image de plusieurs hommes politiques, Ghozali craint l'abstention et pense que le taux de participation aux législatives ne sera pas meilleur que celui de 2007. À trois mois des élections, Ghozali n'a pas encore tranché sur sa participation à la course électorale : «Depuis 1999, j'ai été empêché de participer à quatre élections. On me demande maintenant d'être en lice avec des partis qui sont plus organisés et qui sont ancrés dans la société». Le patron du Front démocratique se demande ainsi s'il aura la capacité et surtout les moyens de mener une campagne en bonne et due forme dans un laps de temps très court. Ghozali a refusé de commenter le contenu des réformes politiques, estimant que les institutions de L'Etat doivent respecter d'abord les lois existantes. Pour lui, la Constitution de 89 contient toutes les dispositions législatives nécessaires pour le fondement d'un Etat démocratique et pluraliste, «mais cette Constitution a été transgressée sous le fallacieux prétexte de l'état d'urgence». C'est sur la base de cette loi d'exception, note-t-il, que le Front démocratique, qui a eu pourtant l'autorisation d'organiser son congrès en 99, a été empêché d'activer pendant 12 ans. Interrogé sur les révolutions arabes de l'an dernier, Ghozali affirme que l'Algérie a fait son printemps en 88. Il révèle néanmoins des craintes quant à une éventuelle dégradation de la situation s'il n'y a pas une volonté réelle de changement. Pour lui, le mal qui mine le système politique algérien tient en deux points. D'une part, l'absence du sens de responsabilité politique : «Personne n'est responsable de quoi que se soit dans le pays. Ce qui n'est pas normal». D'autre part, la posture qui consiste à considérer celui qui ne partage pas l'opinion du pouvoir comme un ennemi avéré.